"Un bijou réussi est un accessoire qui s'associe même avec un jean"
Femmes > Luxe >  Joaillerie > Interview : Victoria Casal
Dossier
23/10/2006

"Un bijou réussi est un accessoire qui s'associe même avec un jean"

Victoria Casal Des créations acidulées, une boutique boudoir : Victoria Casal n'a pas le profil typique d'un joaillier de la Place Vendôme. Rencontre avec une créatrice qui a su s'imposer en faisant rimer mode, joaillerie et féminité.
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SOMMAIRE
description brève de l'image

Comment êtes-vous arrivée dans le monde de la joaillerie ?

Je n'ai pas un parcours classique dans la joaillerie. J'ai commencé par travailler dans le textile, comme consultante après avoir fait l'ESMOD. C'est ensuite ma belle-famille, qui a une vraie tradition joaillière, qui m'a initiée. En réalité, ma première approche a été celle d'une consommatrice. Je ne trouvais pas dans le commerce ce que je recherchais. J'ai eu la chance de pouvoir utiliser les ateliers familiaux pour commencer. J'ai créé une mini-collection d'une dizaine de pièces centrée sur les bagues. Mes amies ont adoré, la presse a suivi. Cela m'a permis d'ouvrir mon propre atelier. Je ne suis donc pas arrivée dans la joaillerie dans les règles de l'art mais avoir une expérience dans la mode m'a donné un oeil différent.

Comment définiriez-vous vos créations : bijouterie ou joaillerie ?

J'ai toujours défini mes créations comme des accessoires de joaillerie. C'est d'ailleurs devenu une véritable appellation. Je ne fais pas de la bijouterie. Mes modèles viennent compléter la silhouette d'une femme d'aujourd'hui. Pour se faire une place dans ce milieu, il faut avoir une idée innovante. Je n'ai pas joué sur les pièces extraordinaires. Mon idée de départ était de compléter une ligne par un beau pendentif, toujours ludique, qui ferait vivre une tenue pour la saison. C'est le même principe qui a guidé l'organisation de la boutique de la Place Vendôme : les clientes peuvent s'admirer dans un grand miroir, se voir en total look et évaluer si le bijou correspond à leur identité.

 

Pendentif Hello Kitty de Victoria Casal
Pendentif Hello Kitty en or . et diamants © Victoria Casal Voir le diaporama joaillerie ludique

Des fées, des fruits, une boutique boudoir : votre univers est très féminin. Pourquoi ?

Quand on ne vient pas du milieu de la joaillerie, on a ses propres codes. A mon arrivée sur le marché, j'ai voulu retrouver le côté seconde peau du bijou, faire de la lingerie-joaillerie, de l'apparat qui vit et évolue avec la femme d'aujourd'hui. Il s'agissait pour moi de démocratiser la joaillerie mais dans le bon sens du terme. Dans notre secteur, 87% des clients sont des femmes. Pour moi, il était nécessaire qu'elles se sentent bien avec leur bijou comme dans les boutiques. Je ne voulais pas de l'accueil strict que l'on trouve dans certaines boutiques même si il est souvent synonyme de qualité. Nous avons énormément travaillé l'ambiance de la boutique : les odeurs, le thé. Je voulais un univers joyeux où les femmes prennent du plaisir avant tout.

 

On vous connaît surtout pour vos créations Hello Kitty. Comment sont-elles apparues dans les collections ?

Les premières pièces Hello Kitty datent d'il y a 4 ans. Je suis une fan de Kitty et mon objectif était d'en créer un en or. J'avais déjà fait des recherches en la matière puis nous sommes arrivés Place Vendôme. Tous les acteurs de la place avaient leur animal fétiche, à l'image de la panthère de Cartier. Je me suis dit qu'il m'en fallait un absolument et que ce serait naturellement le chat Kitty. Je suis donc allée à Tokyo pour négocier la licence de ce Kitty de luxe. J'ai trouvé ça aberrant que l'on me dise oui tout de suite mais ça a marché. Depuis, le Kitty est devenu notre doudou, toutes les femmes qui l'achètent y adhèrent… J'aime le revendiquer.

 

Comment se déroule la création d'une collection, et notamment le choix de pierres ?

Je suis depuis toujours très amoureuse des pierres dures comme la nacre ou l'onyx. Je les trouve à la fois élégantes et vintage, très seventies. Cela contribue à créer l'image générale de la marque. A chaque début de saison, je choisis un symbole et crée deux collections. La collection estivale de cette année était ainsi centrée sur un palmier très "L.A" décliné en diamants, en nacre, et en or. Il y aussi eu le sifflet. Et c'est sans compter les déclinaisons permanentes, pensées en 4 ou 5 couleurs différentes. En fait, je vois le bijou comme une étagère de pulls. L'important est que la femme ait le choix et ce, parmi des tonalités très douces. Le bijou doit s'inscrire dans un univers drôle sans pour autant être trop enfantin. A mes yeux, un bijou réussi est un accessoire, il s'associe avec tout, même avec un jean. Je travaille beaucoup avec la mode : j'ai un "mur de tendances" où sont affichées toutes les couleurs phares de la saison.

 

Pendentif plaques militaires de Victoria Casal
Pendentif plaques militaires © Victoria Casal

Quant aux motifs, aux thématiques : qu'est-ce qui vous inspire ?

J'aime beaucoup travailler avec des images fortes, des symboles - telle la plaque militaire en nacre rose de la collection d'été - mais aussi avec des codes assez répétitifs. Pour moi, la joaillerie est un peu comme la musique, c'est un air qu'on a déjà entendu, quelque chose qui fait partie de notre paysage auditif ou, dans notre cas, visuel. C'est pour cela que j'ai créé ma collection de l'été 2007 autour du soleil, des bébés soleils, des grands soleils. Il y a beaucoup de "have fun", de plaisir, dans ma démarche. Pour cet hiver, on retrouvera une palette de nacres notamment chocolat et de l'or rose. J'ai prévu de grands sautoirs ornés de papillons ou d'oiseaux et j'ai aussi intégré un éléphant porte-bonheur, décliné en nacre rose et diamants. Quand on crée une collection, il faut savoir oser sans partir dans des déliriums, se faire plaisir tout en restant judicieux.

 

Vous créez autant pour les clientes à petit budget que pour les grosses acheteuses. Cherchez-vous à démocratiser la joaillerie ?

En matière de tarifs, j'ai pensé à moi. Je déteste le "non", je veux pouvoir me faire plaisir sans me sentir mal à l'aise. Il y a évidemment de grosses clientes avec des moyens importants qui vont vouloir, par exemple, un palmier énorme en diamants. Notre rôle est alors de créer sans faire dans le "too much", le vulgaire. Mais celles qui n'ont pas des moyens supers importants doivent aussi pouvoir venir chez nous et se faire un petit plaisir. C'est pour moi une démocratisation dans le bon sens, c'est comme porter un top Zara avec des chaussures Marc Jacobs. Aujourd'hui, nous avons la chance de pouvoir adopter ce positionnement car nous ne faisons pas partie d'un grand groupe.

 

Vous avez ouvert une boutique Place Vendôme. Comment se faire une place face aux "monstres sacrés" de la haute joaillerie ?

Mon arrivée sur la Place Vendôme était une histoire d'opportunité, de rencontre, comme l'a d'ailleurs été tout mon parcours. Ceci étant, se situer aux côtés des "châteaux" de la Place Vendôme nous donne un crédit extraordinaire. Je pense qu'aujourd'hui, il est très important que la Place Vendôme puisse accueillir de petites marques. Il y a évidemment les châtelains, mais il y a aussi les bébés châtelains. C'était important pour nous d'être là. Cela plaît à nos clientes car on n'achète pas un bijou de la même manière quand on se rend Place Vendôme. Aujourd'hui, nous voulons être le diesel, le jean de Vendôme : offrir un espace luxueux et lové à la fois, dans lequel la cliente entre plus facilement.

 

Bague "Youme Etiquette" de  Victoria Casal
Bague "Youme Etiquette" © Victoria Casal

Vous développez aussi vos activités dans la mode avec Victoria Couture. Pourquoi ?

J'ai toujours souhaité faire de la joaillerie mais je voulais aussi donner naissance à un bébé groupe, composé de plusieurs départements. On y retrouve le Hello Kitty, toujours dans sa version luxe, avec notamment des pulls en cachemire, etc. C'est actuellement un pan très important de la société qui n'a absolument pas décrédibiliser la joaillerie. Nous continuerons dans ce sens dans deux saisons avec l'ouverture d'un nouveau département consacré à l'accessoire. A terme, je voudrais également une branche mode plus globale. Ce sera difficile car nous devons continuer à nous développer dans le luxe et cela prend du temps. Mais nous sommes dans une société où il faut être à la fois actif et réactif.

 

Quel b.dressez-vous de ces 6 années dans la joaillerie ?

Un b.? Il est extraordinaire ! J'ai énormément de chance de vivre cette passion, même si elle a évidemment des plus comme des moins. Nous allons ouvrir une boutique à Miami : c'est toujours très intéressant de se dire "Oui, ca peut marcher" même si la démarche est très difficile. Aujourd'hui, ce b.est extrêmement positif, en grande partie grâce à la reconnaissance des gens, de la presse et surtout des femmes. J'ai la chance de pouvoir beaucoup voyager, ce qui me permet d'étudier encore plus la femme. J'ai trois garçons, je viens d'un univers très masculin, pour moi, il est donc essentiel de revendiquer toujours plus cette féminité.

 

En savoir plus Le site de Victoria Casal : www.victoriacasal.com

 

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Véronique Deiller, Journal des Femmes

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