Geneviève Leroy-Villeneuve
est rédactrice en chef de "Questions de Femmes".
Elle parle de son magazine, de son métier et aussi
de ses coups de coeur.
Quelle est la journée
type d'une rédactrice en chef ?
Généralement, on arrive vers 10h, on prend
un café ensemble, on parle de l'actualité, de
l'air du temps. Les journées sont ensuite vraiment
différentes selon l'avancement du magazine. En ce moment,
nous sommes en bouclage, c'est un aspect plus technique, et
moi je réfléchis déjà au prochain
numéro. Je prends un "chemin de fer" vierge
et je commence à réfléchir à ce
que nous allons mettre dans le magazine : les articles, les
photos, les publicités que nous aurons. Je prépare
un brouillon. Ensuite, le lundi, nous avons une première
réunion avec tous les collaborateurs, directeurs artistiques,
maquettistes : nous faisons le point, nous regardons les illustrations,
nous cherchons à savoir si on a toutes les photos nécessaires.
Jusqu'au dernier moment, on essaye de coller à l'actualité.
Combien
d'heures travaillez-vous par semaine ?
C'est variable. On peut finir certains soirs à
plus de 20 heures, mais parfois moins. En tout cas, on n'est
pas aux 35 heures, on n'y pense même pas !
Est-ce obligatoire d'être
une femme pour être rédacteur en chef d'un féminin
?
Sincèrement oui ! Nous n'aurons jamais la même
sensibilité que les hommes. Daniel Filipacchi (à
l'époque directeur des éditions Hachette, ndlr),
quand il m'a confié la rédaction en chef de
Elle, m'a expliqué que le journaliste que je
remplaçais était un très bon journaliste,
mais qu'il n'aurait jamais la sensibilité d'une femme.
Aujourd'hui, j'ai périodiquement des divergences de
vue avec Alain Ayache (l'éditeur de Questions de
Femmes, ndlr) : il me laisse très libre, mais je
lui soumets toujours la couverture avant de l'envoyer à
l'imprimerie, et j'ai parfois du mal à le convaincre.
Il tente souvent de modifier une accroche, nous n'avons pas
la même vision des choses. Par exemple, nous avons beaucoup
discuté à propos du livre de Nadine Trintignant
: contrairement à lui, je ne pense vraiment pas que
nous puissions parler d'un livre à scandale, quand
une mère parle de la mort de son enfant. Les hommes
n'ont pas la même sensibilité que les femmes.
Quel a été
votre parcours dans le monde de la presse ?
Je suis entrée par hasard dans la presse. Quand j'étais
encore étudiante, j'ai épousé un journaliste,
et je suis entrée un peu malgré moi dans ce
monde, que j'ai trouvé plutôt sympa... et j'y
suis restée ! Mon premier magazine, ce fut Podium,
un magazine pour jeunes : c'est normal, je n'avais pas beaucoup
plus que les lectrices à l'époque. J'ai rencontré
Daniel Filipacchi qui voulait racheter Podium, nous
avons déjeuné ensemble, et le lendemain il me
rappelait pour me proposer d'être rédactrice
en chef de Elle. C'était une vraie surprise.
Je suis ensuite gardé ce poste à Questions
de Femmes.
Que préférez-vous
dans votre magazine ?
C'est difficile. Tout... Je trouve qu'il a su garder sa spécificité
par rapport aux autres, il privilégie le texte par
rapport à l'image. Et j'apprécie qu'il n'y ait
pas des pages et des pages de mode. Toutes les pages me semblent
intéressantes. Et tant que j'ai du plaisir à
lire les papiers que je reçois, ça me rassure.
Que préférez-vous
dans votre travail ?
Il y a deux étapes : quand je reçois un papier,
tel que je l'attendais, que j'ai du plaisir à le lire,
voire à le "corriger", c'est un moment très
agréable. Quand je vois que l'on m'a envoyé
un papier que j'attends, c'est un vrai plaisir. Et il y a
aussi le moment où je vois ce papier mis en page, mis
en valeur par les photos.
Quels sont les aspects
que vous aimez moins ?
A Questions de Femmes, pas grand chose. J'ai de la
chance : nous n'avons pas une rédaction importante,
il y a peu de gens fixes. Nous travaillons beaucoup avec des
pigistes, ce qui évite d'avoir à gérer
les conflits, les états d'âme et les jalousies
d'une grande équipe, comme j'ai pu le vivre ailleurs
! C'est tout un aspect organisationnel que je n'ai pas à
gérer.
Y a-t-il un magazine
féminin que vous appréciez, que vous lisez ?
Je les parcours tous, avec un oeil professionnel. En tant
que femme, je ne sais sincèrement pas lequel je lirais.
Je lis plutôt des magazines généralistes.
Le seul que je lis par plaisir et non par obligation, parce
qu'il ne s'agit pas de presse française, c'est Vanity
Fair. J'ai toujours rêvé de travailler dans
ce magazine, j'ai même essayé pendant des années
! Je crois que je me régalerais à être
rédactrice en chef d'un tel magazine.
Essayez-vous de faire en sorte que Questions
de Femmes lui ressemble ?
Je n'ai pas la prétention de
faire la même chose, nous n'avons pas les mêmes
possibilités, pas les mêmes budgets.
Comment arrivez-vous
à concilier vie familiale et vie professionnelle ?
Je ne trouve pas ça difficile. Ce n'est pas la quantité
de temps qu'on peut donner qui compte avant tout. On est encore
plus contente de se retrouver avec son mari et ses enfants
après une journée épanouissante, quand
on a vécu des choses intéressantes. Je ne crois
pas au côté fusionnel dans un couple. Et puis,
une femme qui reste à la maison n'a peut-être
pas grand chose à raconter le soir à son mari...
Pour les enfants, c'est pareil. Quand on s'organise, ils n'en
souffrent pas. On leur donne de la qualité et non pas
de la quantité. Et si on s'organise, on arrive à
éliminer les tâches les plus fastidieuses.
Vous avez un parfum préféré
?
Non ! J'adore alterner. Le matin, ça fait partie de
mes petits plaisirs que de me dire : "que fais-je mettre
aujourd'hui ?" J'ai quand même un type de parfum
préféré, je n'aime pas les parfums sucrés
et capiteux, mais plutôt fleuris et exotiques.
Un créateur de
mode préféré ?
J'ai pas mal de choses de Vivienne Westwood : contrairement
à ce qu'on pense, c'est une créatrice très
originale, qui fait malgré tout des vêtements
très portables. J'aime les vêtements asymétriques.,
qui ne ressemblent pas aux autres.
Quels sont vos derniers
coups de coeur littéraires ?
Récemment, j'ai lu le nouveau livre de Katherine Pancol
"Embrassez-moi", qui est vraiment bien. Je ne suis
pas objective, car c'est une amie, mais j'ai beaucoup aimé
!
Le disque qui tourne en ce moment sur vos platines
?
Je n'ai pas de disque préféré. Je ne
suis vraiment pas du style à repasser toujours la même
chose. Les gens qui font ça, qui disent "je ne
me lasse pas d'untel ou untel" m'étonnent toujours.
Moi je cherche toujours à découvrir des choses
différentes. Je me lasse très vite et je passe
à autre chose. Par exemple, j'adore Sting, mais je
ne l'écoute pas toute la journée !
Utilisez-vous Internet ?
Oui, bien sûr, toute la journée. Cela devient
vite une drogue, on s'aperçoit qu'on serait perdu si
on n'avait pas Internet aujourd'hui. Je l'utilise pour des
choses pratiques, chercher une adresse : j'ai tout de suite
le réflexe Internet.
Suite : Interview
de Françoise De La Forest,
rédactrice en chef de Cocktail
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