Comment bien vivre le départ des enfants de la maison ?

Il peut être difficile de voir son enfant quitter le domicile familial. Pour éviter que cette étape ne soit douloureuse, suivez les conseils de Brigitte Bloch-Tabet, auteur de "Lorsque l'enfant s'en va", aux éditions Chiron.

Le départ d'un enfant du domicile familial est-il forcément douloureux pour les parents ?

La plupart des parents ne s'en portent pas plus mal que ça. Il y en a même qui sont soulagés, et qui se disent "bon débarras". En effet, ils ont enfin du temps à eux, du temps pour s'adonner à leurs activités favorites, par exemple. D'autres se disent que le départ de leur enfant n'est que le début d'une nouvelle relation, d'adulte à adulte, plus mûre et enrichissante. Par contre, il arrive que des parents pensent que leur enfant est parti trop tôt, ils s'inquiètent, l'appellent tous les jours. Et d'autres ne supportent pas cette absence.

Justement, jusqu'où cela peut-il aller et comment cela se manifeste-t-il ?

Environ 35 % des parents, en majorité des mères, souffrent de ce qu'on appelle "le syndrome du nid vide". C'est une dépression qu'on peut apparenter à la dépression post-partum. Je l'ai moi-même appelée la dépression "post-departum". Cela se traduit par un sentiment d'abandon, de vide, de vacuité. Les mères ont l'impression de ne servir à rien, de ne plus être elles-mêmes. Parfois, des symptômes assez graves aux niveaux physiologique et psychosomatique peuvent apparaître, comme un cancer du sein ou de l'utérus, mais aussi des problèmes de peau (eczéma) ou digestifs. Ce sont généralement les organes maternels qui sont touchés ou ce qui rappelle la maternité, comme les genoux qui recevaient l'enfant par exemple. Dans d'autres cas, la mère compense ce départ et devient boulimique, hyperactive ou prostrée. Elle peut même souffrir de folie passagère en faisant comme si l'enfant était toujours là. Mais, heureusement, ces cas sont pathologiques et extrêmement rares.

"Il faut s'y préparer comme on se prépare à la retraite."

Comment faire pour que cette transition ne soit pas trop dure ?

Il faut s'y préparer comme on se prépare à la retraite. C'est d'abord un travail sur soi-même. Les parents doivent intégrer le fait que leur enfant ne sera pas toujours là, savoir aussi ce qu'ils feront lorsqu'il sera parti. Pour une mère au foyer, c'est également chercher du travail. Même à 40 ans, il existe des stages professionnels. Et puis, il faut moins s'occuper de lui, le laisser se débrouiller, ne plus faire sa chambre, ne plus remplir le frigo pour lui. Bref, ne pas lui rendre la vie trop facile. Car ce qui se passe actuellement, c'est qu'il y a une trop grande permissivité. Les parents acceptent beaucoup de choses, la petite copine qui vient dormir à la maison, l'organisation de fêtes... Et finalement, l'enfant n'a aucune envie de partir. Il faut donc faire en sorte qu'il ne se sente pas si bien que ça à la maison.

Que faire en cas de réelle difficulté ?

Le problème est que cette dépression est souvent cachée par d'autres choses. A cette période de la vie, il peut s'agir de la ménopause, par exemple, ou des parents âgés qui tombent malades. Donc, on ne sait pas trop ce qui cause cet état fragile. Le gynécologue ou le médecin généraliste peut déjà vous aider à y voir plus clair. Et après, peut-être, vous pourrez envisager de voir un psy. Car si ce départ se passe si mal, c'est qu'auparavant, il y a déjà eu des problèmes de rupture. En général, ce sont des femmes qui ont déjà mal supporté de quitter leurs parents, et plus tard, d'être abandonnées par un ou des compagnons. Du coup, le départ de leur propre enfant réactive ce sentiment d'abandon. Tout le monde ne va donc pas faire ce syndrome. Ne pas avoir une activité forcément très passionnante, ne plus être très amoureuse de son conjoint ou être sans profession, tout cela crée un terrain propice à la dépression.

Quels derniers conseils souhaitez-vous donner aux parents ?

Il ne faut pas paniquer et faire confiance à l'enfant. Il faut savoir qu'il est beaucoup plus responsable qu'on ne pourrait le croire. Pensez aussi qu'il peut changer radicalement. Je prends mon exemple de mère. J'avais un enfant qui ne mangeait pas, qui ne s'intéressait pas à la cuisine et maintenant, il devient cuisinier et a pris du poids. J'ai une fille qui n'était pas du tout maîtresse de maison et qui, désormais, est une très bonne maîtresse de maison. Tout peut arriver. Parfois, le fait de quitter les parents déclenche quelque chose chez l'adolescent. Les relations parents/enfant peuvent même être meilleures, il faut être positif. On peut vivre des instants très forts avec lui, même si on ne le voit pas souvent. Et surtout parce qu'on ne le voit pas souvent...

 Voir : tous les conseils famille

 Et aussi : participez à notre appel à témoin "Comment avez-vous vécu le départ de vos enfants du domicile ?"