Bébés morts à Chambéry : l'insupportable doute

Immense détresse des parents. Sentiments de rage et d'impuissance, mais nécessaire prudence. Les interrogations sont nombreuses après le décès de trois nourrissons dans un l'hôpital de Savoie, début décembre.

Les trois bébés, dont deux prématurés, étaient hospitalisés dans le service de réanimation néonatale de l'hôpital de Chambéry. Chloé, la fille de Maud, née le 28 octobre 2013 trois mois avant terme, a été la première petite victime de cette bactérie meurtrière. "On l'avait dans les bras tous les jours. Elle ouvrait les yeux, souriait, nous reconnaissait", se rappelle en larmes, Laurent, son père, âgé de 37 ans. Née à 750 grammes, Chloé pesait 1,85 kg un peu plus d'un mois plus tard. Le 6 décembre, son état s'est brutalement dégradé. Elle est morte en trois heures de temps. Même scénario pour Théo. "Tout allait bien, il respirait seul pendant les soins ", explique Jonathan. Il a succombé le 7 décembre après "avoir lutté pendant deux jours", raconte à l'AFP sa maman, Sophie, dans une telle souffrance qu'elle dit : "On a gâché nos vies ".
Milie, qui a rendu l'âme le 12 décembre, avait elle été hospitalisée à Chambéry en raison d'insuffisances respiratoires. "Elle n'était pas prématurée mais elle devait être intubée car elle avait du mal à respirer toute seule. Ils ont installé cette poche en début de soirée, elle est morte à minuit ", déplore son papa, Antoine, 41 ans.
Ce n'est que quelques jours avant Noël, après qu'un quatrième nourrisson eut réchappé au pire, que les parents apprendront ce qui leur a arraché leur progéniture chérie. Des poches de nutriments, servant à les alimenter par perfusion, étaient contaminées par une bactérie.

A qui la faute ?

Les trois couples ont déposé plainte pour homicide involontaire contre l'hôpital. L'établissement a porté plainte contre X. "Nous assumerons" si nous sommes mis en cause, a assuré Guy-Pierre Martin, le directeur de la structure qui affirme que ce genre d'infection est inédit à sa connaissance.
Dans la foulée, le parquet a ouvert une enquête préliminaire."Quand, comment et par quoi ont été contaminées ces poches? Pour l'instant, on l'ignore. Il faut remonter toute la chaîne : composition, fabrication, livraison puis administration de ces produits et faire des analyses. C'est très technique et cela va demander du temps", a insisté Fabienne Moulinier, vice-procureure à Chambéry.

Principe de précaution

Marisol Touraine a rencontré les familles endeuillées. Aux malheureux qui ont perdu leur enfant, elle a exprimé sa "sympathie" et sa "solidarité". Au personnel médical, elle a rendu hommage : "C'est un service dans lequel les soignants sauvent des vies. Ils sont confrontés à la douleur de ce qui s'est passé", a-t-elle déclaré, refusant de mettre en cause des responsabilités.
D'après un rapport de l'Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) de 2006, il y a deux fabricants de poches de ce type en France: Fasonuts et Marette. "Le laboratoire français est identifié, mais je ne veux pas le mettre en cause car on ne sait pas s'il est responsable", a souligné Marisol Touraine, ajoutant que l'institut Pasteur avait été saisi pour identifier le type de germe contenu par les poches.

La Ministre a par ailleurs assuré qu'il n'y avait plus "dans les hôpitaux, de produits semblables à ceux qui ont été utilisés ". Sans attendre les résultats des analyses et les conclusions de la justice, "nous avons fait retirer tous les lots de produits qui étaient concernés (...) C'est un accident gravissime qui justifie la mobilisation de toutes les autorités sanitaires (...) Nous devons, à la mémoire des enfants, que toute la lumière soit faite", a-t-elle promis.

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Bébés morts à Chambéry : le point sur l'enquête © sudok1 - Fotolia.com