Une psychiatre, accusée d'homicide involontaire

C'est un procès exceptionnel qui s'ouvre ce mardi 13 novembre devant le tribunal correctionnel de Marseille. Une psychiatre doit être jugée pour un crime commis par son patient.

[Mis à jour le 14 novembre 2012, à 8h57] Après plusieurs heures de délibération, la justice a finalement condamné la psychiatre Danièle Canarelli à 1 an de prison avec sursis. Avant de commencer, le président du tribunal a tenu à préciser : «On ne juge pas la psychiatrie, on ne juge pas les psychiatres. Il s'agit de savoir si on retrouve les éléments constitutifs d'un homicide involontaire».
Les faits remontent au 9 mars 2004. Joël Gaillard, pris d'une crise délirante, assassine le compagnon de sa grand-mère. Ce crime aurait-il pu être évité ? Depuis 2000, tous les spécialistes qui examinent ce patient concluent qu'il est atteint de schizophrénie paranoïde et d'un déni complet de son état psychologique. Malgré des agressions d'une violence inouïe, la psychiatre Danièle Canarelli le juge irresponsable de ses actes. Suite aux nombreux non-lieux psychiatriques, Joël Gaillard est dirigé vers l'hôpital Edouard-Toulouse de Marseille, un établissement spécialisé où travaille le docteur Canarelli. Celle-ci obtient en février 2000 la levée de son hospitalisation, estimant que, grâce à son traitement, il ne "présente aucun élément de dangerosité psychiatrique". Le problème est que, malgré les médicaments, le patient récidive et ne cesse les allers-retours en centre hospitalier. Le 9 mars 2004, Joël Gaillard se lève en pleine consultation avec le docteur Canarelli et fugue. La police ne sera prévenue qu'au bout de quelques heures, ce qui a suffi au forcené pour tuer le compagnon de sa grand-mère.

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Une psychiatre est jugée d'homicide involontaire pour un crime commis par un des ses patients © Corgarashu - Fotolia.com

Pour le juge, la psychiatre était pleinement consciente de la dangerosité de son patient. En effet, quand elle signale la fugue, elle prévient aussitôt la famille du "risque de passage à l'acte". Selon maître Chemla, conseil de la partie civile, "il n'y a pas d'exemple d'un tel entêtement dans le déni de la part d'un psychiatre". Ce procès soulève une importante question : une faute professionnelle peut-elle constituer une faute pénale ?