Egalité femmes-hommes : en route vers une Constitution féminisée ?

En amont de l'avant-projet de loi constitutionnelle présenté le 9 mai aux ministres, le Haut Conseil à l'égalité a dévoilé 9 mesures pour en finir avec l'exclusion des femmes de la Constitution. Si l'inscription de droits fondamentaux, comme l'IVG ou la contraception, a été suggérée, le recours à une écriture égalitaire fait aussi partie des exigences exprimées par le HCE.

Egalité femmes-hommes : en route vers une Constitution féminisée ?
© Piotr Adamowicz/123RF

[Mise à jour du 19.04.2018 à 15h38] Le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE) a rendu publique, mercredi 18 avril, une liste de neuf recommandations visant à inscrire dans la Constitution l'égalité des genres. Ces propositions arrivent en amont de la réforme constitutionnelle qui doit être présentée le 9 mai au Conseil des ministres. Pour le HCE, si "la Constitution en vigueur ne fait pas obstacle à l'égalité femmes-hommes", elle "porte encore les traces de siècles d'exclusion des femmes de la citoyenneté". Pour en finir avec ces considérations archaïques, l'instance consultative propose de faire entrer le droit à l'IVG, à la contraception ou encore le droit à une "vie sans violences sexuelles et sexistes" dans le texte fondamental de la Ve République. Outre ces ajouts, le Haut Conseil souhaite rendre les femmes visibles en effectuant quelques rectifications langagières. Un souhait inspiré de la pétition lancée par le groupe le Parlement du Féminin.

Les mots sont parfois lourds de sens. Le Laboratoire de l'égalité souhaite changer la Constitution pour tenter d'atteindre l'égalité hommes-femmes au sein de la société. À l'occasion de la première édition du Parlement du Féminin qui a eu lieu le 18 décembre, l'association a exprimé ses revendications dans une pétition disponible sur le site Change.org. Une initiative nommée "l'appel du 18 décembre". L'article premier de la Constitution stipule :"La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion". Après "citoyens", l'association veut ajouter le mot "citoyennes" et faire suivre le terme "sans distinction de religion" par "de sexe".

D'autre part, l'organisation demande que le mot "favorise" soit remplacé par "garantit" dans la phrase : "La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales".  Pour Olga Trostiansky, la différence est fondamentale. "Nous souhaitons que la loi 'garantisse'. Ce n'est pas une nuance. 'Favoriser' permet d'aller vers. 'Garantir', c'est une obligation de résultat", a-t-elle expliqué au micro d'Europe 1.

Parmi les signataires, on reconnaît les noms de certains politiques comme Nicole Ameline, députée Les Républicains, Julien Bargeton, sénateur La République en Marche ! ou Roselyne Bachelot, ancienne ministre de la Santé. Des dizaines d'associations, dont Action'elles, Femmes ici et ailleurs ou Cyberelles ont également soutenu le projet. 

Symbolique ou concret ?

Une question se pose : quels changements pourraient engendrer cette simple modification de termes dans la Constitution ? Cette initiative permettrait-elle d'atteindre l'égalité professionnelle, loin d'être une réalité en France ? Si l'on peut douter du bien-fondé de cette requête, Corinne Hirsch, experte en égalité professionnelle et administratrice du Laboratoire de l'égalité, explique que la mesure serait efficace et aurait une visée préventive. "Certains textes fondamentaux pour l'égalité comme la loi sur la parité en politique [...] ont nécessité des modifications constitutionnelles avant de passer. Nous ne voulons pas que de prochains projets de loi puissent être retoqués parce qu'ils se heurteraient à ces imprécisions de la Constitution. C'est bien plus que symbolique", souligne-t-elle à ELLE. Reste à savoir si ces changements permettront de tendre vers une égalité réelle entre les femmes et les hommes.