En Europe, le droit à l'avortement régresse

Un rapport publié par le Conseil de l'Europe fustige une régression du droit des femmes en matière d'avortement, dans les États membres. Le texte met en garde l'Italie, la Russie, l'Arménie ou encore la Pologne et propose quelques recommandations à suivre pour garantir le respect des droits humains.

En Europe, le droit à l'avortement régresse
© ISABELLES/SIPA

[Mise à jour le 13 septembre 2019 à 13h30] Le recul des droits des femmes en Europe : c'est le constat alarmant d'un rapport publié par le Conseil de l'Europe, le 5 décembre. "On observe une tendance préoccupante dans l'ensemble de l'Europe [...] à revenir en arrière sur les garanties obtenues par les femmes, notamment en introduisant des restrictions aux droits à l'avortement et à la contraception", explique Nils Muiznieks, Commissaire aux Droits humains du Conseil de l'Europe.

Le texte pointe du doigt des pays comme la Slovaquie, qui interdit explicitement la prise en charge des contraceptifs par la sécurité sociale, l'Arménie, la Macédoine, la Géorgie, ou la Russie. Ces dernières années, des projets de loi et autres propositions d'interdiction de l'IVG ont fusé à travers l'Europe. En 2014, Mariano Rajoy, le Premier ministre espagnol, avait mis en place un projet de loi qui visait à interdire le droit à l'avortement, sauf en cas de viol et de risque pour la santé de la mère. L'initiative a finalement été abandonnée, mais il s'en est fallu de peu pour que l'Espagne rejoigne le clan des huit pays européens qui mènent une politique extrêmement restrictive en matière d'avortement. Parmi eux, on compte l'Irlande du Nord, la Pologne, Monaco, ou encore Malte (où l'IVG est totalement interdit).

Une interdiction pas si éloignée de nos frontières

En Andorre, principauté indépendante située entre la France et l'Espagne, le droit à l'IVG est également interdit même en cas de viol, d'inceste ou de danger de mort pour la mère. A l'ocassion d'une visite du président de la République (qui est aussi coprince d'Andorre) le 12 septembre 2019, Albane Gaillot, députée du Val-de-Marne, a interpellé le chef de l'Etat sur "cette situation insupportable".
Dans une lettre ouverte où elle rappelle les engagements d'Emmanuel Macron sur l'égalité des sexes et les droits des femmes, la politicienne martèle que ces dernières risquent jusqu'à 6 mois de prison et les médecins 3 ans, à laquelle s'ajoute une interdiction d'exercer de 5 ans s'ils pratiquent l'IVG, dans cette région. 

L'avortement, un droit bafoué

"Même dans les pays où la loi est moins restrictive, les femmes doivent parfois faire face à des obstacles importants", assure Nils Muiznieks. En Turquie, par exemple, une femme mariée ne peut interrompre sa grossesse qu'avec l'accord de son époux. En Italie, 70% des professionnels de santé n'autorisent pas l'avortement et invoquent une clause de conscience pour se justifier. Les Italiennes peinent souvent à trouver un médecin disposé à pratiquer l'IVG, à tel point que certaines finissent par dépasser le cadre légal et se voient dans l'obligation de mener leur grossesse à terme. 

Dans le rapport, le Commissaire aux Droits de l'homme soumet également quelques recommandations aux États membres du Conseil de l'Europe. Il préconise ainsi de "veiller à ce qu'un budget suffisant soit alloué à la santé sexuelle et reproductive", "garantir une éducation sexuelle complète" ou encore "veiller à ce que des méthodes de contraception efficaces soient abordables". Des consignes pertinentes... si ces pays daignent les appliquer.