Izia Higelin, la belle impétueuse

"Cette fille en jette", comme dit ma mère. Izia Higelin est une tornade, un raz de marée, une boule d'énergie… Pas une star tempétueuse, non, mais un souffle intense, un tourbillon ardent qui vous emmène aussi bien au XIXème en héroïne de "Rodin" que dans son monde moderne et tendre fait d'art, de musique et de fantaisie. Rencontre.

Izia Higelin, la belle impétueuse
© Wild Bunch Distribution

Façonnée par la scène, fascinante, elle est libre, sincère, spontanée... Vous connaissez beaucoup d'artistes qui courent après une journaliste dans la rue pour l'embrasser, le remercier pour cet échange et lui dire "au revoir" après une interview ? La fougueuse Izia Higelin ne fait pas seulement cela. Elle a du chien, du bagou, de la répartie, se lève quinze fois, mime des scènes de la vie quotidienne, vous serre dans ses bras... Actrice née, généreuse et attentionnée "par nature", Izia Higelin incarne avec délicatesse et subtilité la géniale et tourmentée Camille Claudel aux côtés du maître Vincent Lindon

Quelle a été la genèse de ce projet ?
Izia Higelin : Le réalisateur Jacques Doillon m'a appelée. On s'est rencontré au restaurant et il m'a parlé de Rodin et Camille Claudel pendant trois heures, avec conviction… avant de me donner le scénario.

Et vous, d'accepter immédiatement le rôle ?
Je suis très instinctive. Je me pose beaucoup moins de questions que vous. Quand je commence un tournage, je ne "prépare" pas mon interprétation, je joue. Ce n'est pas réfléchi.

© Wild Bunch Distribution

Comment décririez-vous le personnage de Camille Claudel ?
C'est une fille téméraire, passionnée, amoureuse et talentueuse. Elle est aussi très moderne, indépendante, ambitieuse, déterminée, sûre d'elle malgré un terrain psychologique fragile... Il y a plein de choses qui me correspondent en elle. Je ne l'ai jamais abordée comme une femme folle, mais comme une femme désespérée.

On vous connaît une énergie virevoltante. Comment avez-vous intériorisé votre dynamisme pour incarner Camille Claudel ?
Le
carcan des vêtements me donnait un vrai cap pour ce personnage. Le corset m'a beaucoup aidé pour le maintien, la tenue et une force en retenue... J'ai adoré jouer avec ce corsage hyper serré, même si j'étais soulagée de l'enlever en fin de journée. Imaginez le plaisir de retirer son soutien-gorge... multiplié par 5.000 !

Dans votre façon de vous mouvoir, d'occuper l'espace, vous avez beaucoup aidé les filles s'approprier leur corps. Quel rapport entretenez-vous avec cette enveloppe charnelle ?
Mon corps est mon instrument d'expression, d'une façon presque asexuée. Tout mon corps bouge lorsque je fais quelque chose, je me lève en sautant de mon siège dès que je prends la parole (Izia a déjà bondi quatre fois lorsqu'elle prononce cette phrase, ndlr). J'aime de plus en plus cet outil, j'en prends soin, mais je ne l'envisage comme un moyen de séduction.

Avez-vous dépassé la pression de la minceur ?
Je suis un yo-yo, comme toutes les femmes. Ma silhouette fluctue. Certains jours, je ne me sens pas bien dans ma peau, mais globalement je me regarde avec bienveillance car je m'assume davantage.

En voulez-vous parfois à ce corps au point de lui infliger certaines choses ?
Pas du tout. Je suis d'une nature heureuse et fuis la souffrance. Je suis très sensuelle, j'aime faire l'amour, chanter, manger, danser... Je veux ressentir des choses positives, mener une vie intense et palpitante jusqu'au bout.

Aucun moment de blues, alors ?
Si, bien sûr. Auparavant, je les faisais partager, ils sont devenus intimes et n'interviennent plus qu'en musique, occasionnellement.

© Wild Bunch Distribution

On est dans univers tactile, Rodin sculpte la terre. Êtes-vous dans le contact avec l'autre ?
Je suis très réceptive aux énergies et je touche tout le temps les gens, même les inconnus. Je défie ainsi le monde en permanence, mais en provoquant la bonne humeur.

Qu'est-ce qui peut vous rendre violente ?
Les injustices comme les manifestations contre le mariage pour tous me révulsent... au risque de tomber dans une spirale d'incapacité qui peut être très frustrante. Je peux être révoltée ou en colère, mais pas violente. Je parviens toujours à mettre des mots sur mes émotions et je me connais de mieux en mieux.

Qu'avez-vous réussi de mieux jusqu'à aujourd'hui ?
Je suis parvenue à réaliser mes rêves d'enfant. Mon souhait de petite fille était de devenir comédienne et chanteuse. Il n'y a rien de plus beau, non ?

A quoi songez-vous en entendant les mots "enfance" et "vacances" ?
La Corse, mon refuge. J'ai une double-vie là-bas. J'y retourne très souvent.

Votre plus grand luxe ?
Voyager dans de très bonnes conditions quand j'en ai envie. Je ne peux rien prévoir dans ma vie, partir à l'étranger sur un coup de tête, c'est mon caprice.

Savez-vous cuisiner ?
J'apprends, mais je ne suis pas douée. En revanche, j'adore que l'on me fasse des petits plats. Comme j'habite seule, je suis une pro de la livraison à domicile !

Sans quoi ne pourriez-vous pas vivre ?
La scène. C'est ce que je préfère. Je m'y sens à l'aise. Le cinéma reste une facette, prétendre à une autre vie en  jouant la comédie...

Les femmes ont-elles de l'humour ?
C'est qui nous sauve. Faut pouvoir rigoler aux blagues pourries que l'on entend et pour ne pas sombrer dans la folie. C'est compliqué d'être une femme et plus facile pour moi de faire le clown !

Quel est votre talent caché ?
Les claquettes… et plus généralement, l'intrépidité. Je suis volontaire pour tout et je me lance sans peur du danger ou des conséquences.