Le journaliste Loïc Prigent et ses mots si justes, entre humour et amour

 

En voyant ce coeur en galets sur le sol dans un village perdu des Andes, je pense à Sonia Rykiel. Elle dessinait une mode pour celles qui voulaient le beurre, l'argent du beurre et le cul du crémier. Pour aller au théâtre elle avait fait faire des poches latérales à ses robes pour que son voisin puisse la divertir si la pièce était trop soporifique. Elle était une vraie rousse et a donné au fond de patrimoine de sa maison des Polaroïds qui le prouvent. Elle écrivait, des livres et sur des pulls. Elle rajoutait des bouches sur les robes parce qu'elle aimait manger et embrasser et mentir. Je l'ai regardé dessiner des silhouettes et elle alignait souvent ses femmes par grappe, qui avancent bras dessus bras dessous, une communauté rieuse et soudée. Elle avait des convictions. En 2002 elle soutenait Lionel Jospin et quand il a lamentablement perdu dès le premier tour de l'élection présidentielle, elle et sa fille Nathalie ont fait mettre des urnes dans ses vitrines, appelant à repousser l'extrême droite. Elle a travaillé en famille avec sa fille Nathalie qui est comme son second cerveau, avec sa sur Danielle et même son gendre. Ses collaborateurs semblaient ses enfants, mais c'était toujours elle qui rajoutait le dernier noeud, le strass en plus, pour que ce soit juste comme elle disait. Elle était un plan séquence permanent, il suffisait d'allumer la caméra et c'était la femme parisienne par excellence. Elle enrageait de ne pas avoir eu l'idée de faire clignoter la Tour Eiffel la nuit, tellement génial d'enrager pour ce genre de choses. C'est en l'écoutant que j'ai entendu parler la mode pour la première fois et réalisé à quel point cette folie douce était magique. Elle me criait presque dessus pour que je la tutoie et bien sûr je n'ai jamais pu, je la respectais trop. Salut Sonia, tu es fantastique.

Une photo publiée par Loic Prigent (@loicprigent) le

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