"Si on rit aujourd'hui de la grossesse, c'est que ça n'était pas si dur"

Nadia Daam est une mauvaise mère. Avec trois de ses collègues, elle a décidé d'écrire un livre sur les joies, ou plutôt les galères de la maternité. Non, ce n'est pas un moment merveilleux !

"Si on rit aujourd'hui de la grossesse, c'est que ça n'était pas si dur"
© Nadia Daam/La Journal des Femmes

Comment est venue l'idée d'écrire un livre décalé sur la maternité ?

Johana Sabroux, Emma Defaud et moi nous sommes rencontrées au travail. Jeunes mamans, nous avons commencé à discuter, échanger sur notre nouveau statut de mère. De fil en aiguille, la parole s'est libérée, et nous avons fini par nous confier les choses pénibles et les galères. Après ces discussions autour de la machine à café, nous avons fini par nous dire que si nous étions déjà trois, nous ne devions pas être les seules à se considérer comme mauvaises mères. Nous avons alors ouvert un blog dans lequel nous racontions des petites andecdotes et dont le but était aussi de de recueillir des témoignages d'autres mamans. Mais très vite, l'idée d'un livre s'est imposée. Nous avons donc mis le blog en stand-by avant de le réouvrir en octobre lors de la sortie du livre.

De façon générale, qui sont les mauvaises mères ?

Les mauvaises mères sont des mamans qui ont des doutes, qui ne font pas toujours tout bien, qui considèrent que l'on devient maman avec le temps, et que ça ne s'impose pas comme ça en sortant de la maternité. Nous revendiquons le droit de faire des erreurs, de ne pas toujours savoir ce qui est bon pour notre bébé et que cette histoire de 6e sens de la mère, c'est quand même une ânerie ! Etre maman, c'est avant tout faire ce qu'on peut, donc mal faire parfois.

Et aux yeux de la société ?

Etre une mauvaise mère aux yeux de la société, c'est ne pas cesser de penser à soi dès que l'on devient maman. Certaines mères ne veulent exister qu'à travers leur enfant, ça n'est pas notre cas. Nous avions une existence, une personnalité propre avant ce nouveau statut. Il n'y avait donc aucune raison que cela cesse. Etre mauvaise mère, c'est déposer son enfant à la crèche un jour de RTT et rentrer à la maison regarder un DVD.

Comment votre ouvrage a-t-il été accueilli par le public ?

C'est un accueil tout à fait positif. Pourtant, le titre pouvait laisser présager des réactions plus violentes. Nous avons créé un groupe auquel ont adhéré 620 mamans. Toutes disent qu'elles se sentent moins seules, qu'elles aussi s'étaient toujours considérées comme mauvaises mères sans le formuler. Sur le blog, de nombreuses mamans commentent et racontent leur propres anecdotes souvent très drôles. Hormis quelques grincheux qui nous reprochent d'être des enfants gâtées, pas conscientes de notre chance, nous sommes ravies des réactions suscitées par le livre.

Finalement, est-il possible de profiter de cette période qu'est la maternité ? Ou est-ce mission impossible ?

Oui, c'est tout à fait possible ! En revanche, cette période de sérénité, de plénitude décrite par certains guides de la grossesse type Laurence Pernoud, ça, il faut oublier tout de suite. En fait, nous avons toutes les trois eu des grossesses très différentes décrites dans certains passages du livre. Il y a plein de moments chouettes et agréables, mais bon, globalement, quand on est enceinte, on ne rêve que d'une chose : ne plus l'être ! On n'est pas des exemples. Mais oser dire que ce n'est pas toujours que du bonheur, ça fait beaucoup de bien.

"Etre mauvaise mère, c'est déposer son enfant à la crèche et rentrer à la maison regarder un DVD"

A qui faut-il offrir votre livre : aux futurs mamans pour les prévenir, aux papas... ?

Ce qui nous a motivées pour l'écriture du livre, c'est que très tôt, on s'est dit qu'on voulait écrire le livre que l'on aurait aimé lire enceintes. Parce que comme toutes les femmes enceintes, on s'est abreuvées de guides et autres manuels. Ce qui ne nous a pas empêchées d'être complètement démunies à la douzième nuit blanche ou pendant le baby-blues. Quant aux jeunes ou futurs papas, nous les égratignons très gentiment. Alors, ils peuvent le lire sans crainte. Certains de nos amis hommes l'ont même offert à toutes les femmes enceintes autour d'eux.

Avez-vous eu peur d'aller trop loin dans l'écriture ?

Evidemment, pendant l'écriture du livre, on s'est demandées si on n'allait pas trop loin, s'il ne fallait pas laisser aux futures mamans le soin de découvrir telle ou telle joyeuseté. Mais comme on a décidé de traiter les choses avec de l'humour, cela dédramatise les moments plus difficiles que nous évoquons. Les lectrices vont comprendre que si on en rit aujourd'hui, c'est que ça n'était pas si dur. Bref, il n'y aura aucune incidence sur la courbe de natalité en 2009 !



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