Un retour à l’adoption nationale ? 1/2

L'adoption internationale étant de plus en plus compliquée, les parents vont-ils se tourner vers l'adoption nationale ? Le point.

Les candidats français à l’adoption se sont progressivement détournés de l’adoption nationale pour passer à l’adoption internationale dans les années 70-80. A ce moment-là, l’IVG et la contraception, ainsi que l’acceptation sociale de la maternité en solo, ont fait baisser très sensiblement le nombre des enfants abandonnés à la naissance en France. Pour adopter des bébés, les parents se sont alors tournés vers l’international, en acceptant que l’origine étrangère des enfants soit –le plus souvent- visible physiquement.

Mais aujourd’hui l’adoption internationale elle-même est en baisse très sensible, entre autres parce que les pays d’origine, surtout les pays émergents, mettent en place ou développent l’adoption en interne, qui privilégie les enfants les plus jeunes et en bonne santé. De ce fait, les enfants adoptés à l’international ne sont plus eux-mêmes des bébés, mais souvent des enfants grands, ou en fratrie, ou encore atteints de pathologies ou handicaps, et même ainsi l’effectif annuel continue à diminuer.

Dans le même temps, de nombreux enfants français vivent des situations de délaissement parental. Ils sont plus de cent mille confiés de manière durable à la Protection de l’Enfance, mis soit en foyer soit en familles d’accueil, livrés à eux-mêmes lorsqu’ils ont 18 ans… Quelle que soit la qualité des familles d’accueil, elles ne sont pas pour l’enfant, et d’ailleurs ne doivent pas être, des parents de remplacement. Si cette situation se justifie dans un nombre important de cas, parce que la famille de naissance doit faire face à des difficultés temporaires, elle ne se justifie pas toujours : un certain nombre d’enfants aurait intérêt à être déclarés pupilles, par application de l’article 350 qui de fait le permet mais est très peu utilisé. D’autres pays d’Europe ont une politique de protection de l’enfance sensiblement différente.

C’est cet état de fait que dénonce un «Plaidoyer pour l’adoption nationale» signé par plusieurs professionnels de la protection de l‘enfance, paru en septembre dans Ouest-France et disponible sur Internet. Ce plaidoyer demande, dans l’intérêt supérieur de l’enfant, que des projets personnalisés soient élaborés, définis, pour ceux que leurs parents ont de fait définitivement abandonnés aux services sociaux.

Est-ce à dire qu’ils deviendraient alors tous adoptables ? Pas nécessairement. On peut penser aussi à des tiers dignes de confiance à qui serait confié l’éducation de l’enfant sans abolir ses liens parentaux antérieurs, et son identité ; on peut penser à un parrainage de proximité, si l’enfant déjà grand n’est plus vraiment adoptable ou ne le souhaite pas ; et on peut aussi penser à l’adoption, sans doute assez souvent une adoption simple pour préserver des liens avec des grands-parents, des oncles et tantes, avec le passé. C’est donc aussi la demande des candidats à l’adoption qui devrait évoluer, pour prendre en compte les besoins de ces enfants et pas seulement leur souhait –si légitime soit-il- à devenir parents ou à agrandir leur famille «biologique».

Actuellement les liens du sang sont sacralisés par la culture ambiante en France, et l’adoption plénière s’inscrit comme une contre-culture. Mais les manières de faire famille se diversifient avec les familles recomposées, avec les dons de sperme etc. Il est probable, souhaitable, que les adoptions se diversifient également. Espérons que la loi en préparation au Ministère de la Famille aille dans ce sens, dans l’intérêt supérieur des enfants.

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