"Il est urgent de faire une loi interdisant les violences envers les enfants"

Trois psychiatres déplorent dans une tribune l'absence de loi interdisant les châtiments corporels envers les enfants.

"Il est urgent de faire une loi interdisant les violences envers les enfants"
© Cathy Yeulet - 123RF

Dans une tribune publiée dans le journal Le Monde, les trois psychiatres Marie-Rose Moro, Daniel Delanoë et Thierry Baubet s'étonnent de l'absence de loi interdisant les violences contre les enfants au sein de la famille. Si un amendement du texte de loi "Egalité et citoyenneté" introduisant notamment dans la définition parentale l'exclusion des violences corporelles envers les enfants, a bien été voté le 22 décembre 2016, il a finalement été censuré par le Conseil constitutionnel le 26 janvier dernier.

Cela fait pourtant plusieurs années que l'absence de prise de position de l'Hexagone sur le sujet est pointée du doigt. Le Comité des droits de l'enfant de l'ONU avait ainsi rappelé à l'ordre la France au sujet du droit de correction, qui "autorise les parents à frapper leurs enfants, jusqu'à un certain niveau, et suspend dans la famille l'application du droit pénal qui sanctionne les violences légères envers les enfants", précisent les psychiatres. Mais alors que l'interdiction des violences éducatives aurait pu être inscrite en 2014 aussi bien dans l'amendement proposé sur la loi sur l'autorité parentale et l'intérêt de l'enfant, que dans la loi de la protection de l'enfance, il n'en fut rien. Le Conseil de l'Europe avait également reproché à la France en mars 2015 de "ne pas énoncer l'interdiction expresse et complète de toutes les formes de châtiments corporels infligés aux enfants", rappellent les auteurs. Et pour cause, la France est en retard à ce sujet. En Suède par exemple, la loi interdit les châtiments corporels et apporte un soutien aux parents, et ce depuis 1979. Ainsi, "beaucoup moins d'enfants sont morts des suites de la violence familiale, le nombre de procès pour maltraitance d'enfants a diminué, de même que le nombre d'enfants soustraits à leurs parents", rapportent les psychiatres.

Alors pourquoi la France est-elle aussi réticente à interdire les violences éducatives ? Selon les auteurs, c'est "probablement par crainte d'affronter l'opposition d'une partie de la classe politique et de l'opinion, et de relancer un mouvement de protestation de la droite religieuse du même style que celui de la "Manif pour tous" de 2012-2014 contre la mariage entre personnes du même sexe". Pourtant, "au moment où la régression de la démocratie guette les sociétés occidentales, il est urgent de faire une loi constitutionnelle interdisant les violences envers les enfants, comme l'ont déjà fait plus de trente pays membres du Conseil de l'Europe".