Petit-déjeuner : trop d'enfants arrivent à l'école le ventre vide

Près d'un enseignant sur deux constate que les enfants ne prennent pas de petit-déjeuner avant de se rendre à l'école, selon une étude Credoc réalisée auprès de 500 professeurs pour le collectif Les Petits-Déjeuneurs.

Petit-déjeuner : trop d'enfants arrivent à l'école le ventre vide
© Oksana Kuzmina

Le petit-déjeuner constitue le repas le plus important de la journée. Il doit apporter à l'enfant l'essentiel des besoins énergétiques de la journée, soit 20 à 25 %, afin d'être en forme et de pouvoir se concentrer en classe. Un petit-déjeuner complet et équilibré doit ainsi contenir un aliment céréalier, un produit laitier, un fruit et une boisson chaude ou froide. Pour un enfant de 7 à 11 ans par exemple, cela représente entre 350 et 450 kcal. Pourtant, selon une étude Credoc menée auprès de 500 enseignants, directeurs d'écoles, médecins et infirmières scolaires, 47 % des personnes interrogées constatent que les enfants (du CP au CM2) arrivent en classe le ventre vide au cours de l'année scolaire. En moyenne, ce sont 3 élèves par classe qui ne mangent pas le matin (hors éducation prioritaire), 4,3 dans les écoles du réseau d'éducation prioritaire (REP) et jusqu'à 5,2 dans les REP+. De plus, dans 40 % des cas, ces mauvaises habitudes sont récurrentes, estiment les professeurs.

Conséquences : les enfants qui ne prennent pas de petit-déjeuner le matin sont plus fatigués (82 %), moins concentrés et attentifs en classe (83 %) et moins participatifs (61 %). Ils peuvent également rencontrer des problèmes physiologiques : malaises, crampes d'estomac et maux de ventre, chutes de glycémie... "S'il ne déjeunent pas le matin, les enfants ont mal au ventre vers 10h, ensuite, ils ont mal à la tête vers 11h-11h30", constate Florence, directrice enseignante d'une classe de CE1-CE2. Difficile aussi de se concentrer explique Pierre-Mickael, directeur enseignant (CE2 en REP) : "En cours de matinée, les enfants se retrouvent avec des coups de fatigue importants, sont apathiques, endormis, ils ne sont absolument pas en capacité de réfléchir correctement et ne peuvent pas se concentrer".

Pourquoi les enfants sautent-ils le petit-déjeuner ? 

"Le petit-déjeuner a perdu de son importance,
s'individualise et n'est plus considéré comme 
un moment de partage" © fotolia

Plusieurs facteurs entrent en jeu : le contexte familial (dans 68 % des cas), le fait de réveiller son enfant à la dernière minute (47 %), le manque d'appétit le matin (17 %) ou encore les raisons socio-économiques (17 %). En effet, l'étude révèle que le mode de vie de parents représente l'une des raisons principales. "Les parents travaillent et partent avant l'enfant. Il se retrouve seul et donc, n'a pas le réflexe de déjeuner", explique David, enseignant de CM1-CM2. Parfois même, les parents n'ayant pas d'activité professionnelle laissent les enfants se réveiller et aller à l'école seuls. Ils deviennent alors de plus en plus autonomes et livrés à eux-mêmes. "Le recul du petit-déjeuner s'explique par un phénomène de "déritualisation". Ce repas a perdu de son importance, s'individualise et n'est plus considéré comme un moment de partage", analyse encore Pascale Hébel, Directrice du pôle consommation et Entreprises du Credoc. Autre cas : les parents qui ne pensent tout simplement pas que le petit-déjeuner est indispensable pour l'enfant. 

Par ailleurs, le fait que l'enfant se réveille tard ne lui permet pas de prendre le temps de manger : il est stressé, en retard pour aller à l'école et part le ventre vide. S'il n'a pas faim, c'est peut-être aussi parce qu'il s'est couché trop tard la veille, ou qu'il a dîné à une heure tardive... ? "Les tablettes, les smartphones et la télévision impactent de façon indirecte la prise du petit-déjeuner des plus jeunes. Ces objets retardent le moment où l'enfant s'endort et cela est compensé par un réveil plus tardif, qui empêche la prise d'un petit-déjeuner complet", explique Pascale Hébel. 

Enfin, la composition et le niveau des revenus du foyer sont aussi à prendre en compte. Ainsi, les enfants issus de familles nombreuses et de ménages modestes déjeunent moins régulièrement que les autres le matin, selon le Credoc.

Sensibiliser les élèves à l'importance du petit-déjeuner

Selon l'étude, "86 % des enseignants pensent qu'il faut aborder à l'école les fondamentaux du modèle alimentaire français et l'importance des trois repas équilibrés quotidiens, et du goûter comme 4ème repas".  Dans un tiers des cas, les instituteurs mettent en place des actions de prévention, échangent avec les écoliers dans le cadre de débats en classe et d'ateliers, discutent avec les parents, et dans certaines situations, distribuent un encas aux enfants. Enfin, "une mobilisation de l'ensemble de la communauté éducative et des parents est considérée comme essentielle pour permettre au petit-déjeuner de retrouver sa place dans le quotidien des enfants".