Marine Delterme : le juge est une femme… épatante

Sublime, c’est un fait. Naturelle, spontanée, brillante, mais aussi studieuse et bienveillante : voilà une gageure dans le métier. L’actrice Marine Delterme qui incarne Alice Nevers depuis 14 ans sur TF1, allie merveilleusement intelligence, souci de l’autre... et du travail bien fait. Rencontre.

Marine Delterme : le juge est une femme… épatante
© TF1

Actrice, artiste, sculptrice, Marine Delterme est la femme amoureuse solaire et inspirée de l'écrivain Florian Zeller, de dix ans son cadet, la maman exemplaire de Gabriel, 18 ans et Roman, 8 ans, elle est surtout, pour la majorité des Français, l'héroïne d'Alice Nevers, Le Juge est Une Femme, une fiction procédurale à succès qui revient sur vos écrans pour dix épisodes.
La quarantaine rayonnante, la silhouette à l'avenant et le sourire diamant, Marine Delterme a tout pour plaire. Intuitive, généreuse, cultivée, cette star qui évolue à distance des mondanités, garde les pieds sur terre et nous surprend par sa fraîcheur et son talent.

Marine Delterme © TF1

Le Journal des Femmes : Racontez-nous votre cheminement jusqu'à ce personnage d'Alice que vous incarnez depuis 2002…
Marine Delterme : J'ai commencé par le cinéma, j'ai joué l'actrice pendant une quinzaine d'années. Pour des raisons personnelles, j'ai arrêté de travailler pendant deux ans et demi pour aider quelqu'un... Puis je me suis heurtée aux désirs des réalisateurs. Impossible de retrouver des personnages intéressants et denses comme dans Te Quiero ou Vatel, on ne me proposait que des rôles de jolies filles, de séductrices. Alice Nevers a été une révélation. J'ai toujours adoré les séries (de La Petite Maison dans La Prairie à The Affair, House of Cards, Game of Thrones, ou True Detective dont je suis fan), j'ai étudié le droit, je voulais être avocate…
L'histoire de cette femme juge d'instruction, c'est la plus ancienne série de TF1. On a commencé en 90 minutes, sans feuilletonner, il n'y avait pas d'humour, rien sur la vie privée…. La série, que je co-écris aujoud'hui, a complètement mué, on a changé de comédiens, de looks, de metteurs en scène. On est passé au format 52 minutes et l'on se concentre davantage sur l'intimité des protagonistes.

Quelle est selon vous l'évolution d'Alice, celle que vous souhaitez lui apporter ?
Le capital sympathie dont on bénéficie nous permet de prendre des chemins de traverse, d'oser des choses un peu folles. Si Alice incarne une profession rigoureuse, emblématique dans la société, elle se retrouve face à un destin et des décisions personnelles complexes. L'année dernière, la saison était sombre. Alice faisait par l'hypnose un voyage dans une partie de sa vie qu'elle avait occultée, elle retrouvait son père biologique. Dans cette saison, l'intrigue amoureuse l'emporte… C'est cet aspect romanesque du scénario que je préfère.

Nombre de vos consœurs sont à Cannes. La Croisette, le côté star et paillettes vous l'appréciez ou vous le rejetez ?
Il y a dans ce festival une ambivalence qui convient à notre époque puisqu'on est à la fois dans la profondeur et la superficialité. Le bling-bling, les marques de luxe, les égos des acteurs ne m'intéressent pas, mais je peux être fascinée par des films exigeants, par une présence, une voix, un corps, une incarnation à l'écran.

Le paraître, c'est un jeu auquel vous consentez ?
Bien sûr, c'est un devoir vis-à-vis du public. D'autant que l'on a la plus grosse communauté de fans chez TF1. Un lien fort s'est développé. Je suis attachée à rendre des comptes et les téléspectateurs se montrent très généreux en retour.

Comment décririez-vous votre éducation ?
Très stricte, bourgeoise, à l'ancienne. Basée sur les principes et l'effort, la réussite dans les études, l'activité physique, la musique… Cela n'a pas été drôle tous les jours, mais je remercie mes parents, c'était payant. Je sais que dans la vie il y a très peu de talent et beaucoup de boulot. Mon père et ma mère peignaient et dessinaient, je me suis passionnée pour la photo. Mon physique plantureux, atypique, m'a permis de devenir mannequin dès 17 ans et de conjuguer mon idéal avec un intérêt pour la mode et les magazines.

En êtes-vous sanguine ?
Je suis à fleur de peau et très sensible. J'ai un trop plein d'énergie que je dois canaliser dans le sport, la méditation. Je déteste la violence, mais je me défends par la parole.

Pourriez-vous vivre sans téléphone portable ?
Ce serait très difficile. Je ne suis pas bavarde, mais c'est un outil de travail. Je lis mes mails, je suis accro à l'actu, je regarde l'info du jour et surfe sur de nombreux sites.

Vous arrivez à déconnecter ?
Oui, je suis une grande solitaire, j'ai des moments où j'ai besoin de vide. Quand je suis à l'atelier, j'adore être seule. Quand je fais de la sculpture, ou des bijoux, je suis seule à décider…

À quelle question n'aimez-vous pas répondre ?
Celle que tous les journalistes me posent : "Est-ce que jouer dans une série vous coupe du cinéma ?"

Qu'aimeriez-vous que je dise de vous ?
Je suis assez détachée du regard des autres, c'est une force de ne pas trop se poser de questions sur l'image que l'on renvoie. Je suis assez libre là-dessus.

Avez-vous souffert de l'hyper-médiatisation ?
Non. Je trouve les gens qui se plaignent d'être connus, sidérants et capricieux. Quand on me reconnaît dans la rue, c'est un beau cadeau que l'on m'offre, plein de gentillesse.

Savez-vous cuisiner ?
Pas du tout. Je n'ai aucune patience, mais je fais très attention à manger sain et bio.

De quoi êtes-vous la plus fière ?
De cette exigence que je mets à bien éduquer mes deux fils. Cette flamme qui m'anime, c'est de leur enseigner la meilleure manière d'être heureux plus tard.

Les femmes ont-elles de l'humour ?
Un sens comique différent de celui des hommes. Et je pense que malheureusement, dans le showbiz, on ne peut pas être belle ET drôle… J'ai conscience de ne pas être la femme la plus fun du monde, mais j'adore rire.

Avez-vous déjà eu peur du ridicule ?
Beaucoup quand j'étais jeune. J'avais peur d'être jugée, cela m'obsédait. Maintenant plus du tout. Je fais seulement attention à ne pas être égocentrée.

Qui admirez-vous ?
Les réalisateurs, parce que c'est extrêmement difficile de construire une œuvre, il faut se battre.

S'il y en avait un à citer ?
David Lynch. Je l'ai vu travailler à Los Angeles. Il est extraordinaire. Il sublime l'inconscient avec un talent fou.

Qu'est-ce que vous ne savez vraiment pas faire ?
Rassurer les autres, mais je me soigne, j'apprends…   

Vous arrive-t-il de vous ennuyer ?
Parfois, à quelques dîners, mais je suis curieuse d'apprendre. J'ai toujours envie de découvrir. Les autres sont tellement étranges et captivants. Si l'on ne s'intéresse pas aux autres, on se prive de la moitié du plaisir d'être sur Terre.

Est-ce que vous savez ne rien faire ?
Oui. C'est important. Après l'intensité des tournages, je suis obligée de poser la machine, il en va de ma survie.

Qu'est-ce que vous avez d'extravagant ?
Mon parcours, mais pas dans le sens extraordinaire. Tout ce que j'ai fait n'était jamais attendu.

Portrait chinois :

Si vous étiez :

un mot : liberté
un végétal : l'iris
un film : The Place Beyond the Pines
une recette : le concombre à la crème
un animal : un chat
une drogue : aucune, je suis contre !
une chanson : Orly de Brel
un parfum/ une odeur : Antaeus de Chanel, que mettait ma grand-mère
un homme : Barack Obama