Laurent Capelluto est à vous tout de suite

A l'affiche de Je suis à vous tout de suite, l'acteur belge qui flirte avec le cinéma français s'est prêté au jeu de l'interview, une fois. Et quelle fois ! Rencontre.

Laurent Capelluto, qui c'est celui-là ? Habitué des seconds rôles dont un remarqué et remarquable dans un Conte de Noël d'Arnaud Desplechin, l'acteur belge est à l'affiche de Je suis à vous tout de suite, le nouveau film de Baya Kasmi. Tombée sous le charme de son air pince-sans-rire et sexy, la réalisatrice lui a confié le rôle de Paul, l'amoureux transi d'Hanna, une jeune femme atteinte du syndrome de la gentillesse. C'est dans un café parisien que nous le rencontrons. Fraîchement arrivé de Bruxelles, l'acteur nous parle sans langue de bois de son entrée sur la scène théâtrale et cinématographique. Découvrez cet acteur passionnant et passionné par son métier.

Laurent Capelluto et Vimala Pons dans Je suis à vous tout de suite en salles le 30 septembre © Le Pacte

Médecin malgré lui. Dans Je suis à vous tout de suite, Laurent Capelluto est Paul. Un médecin "gentil, limite banal", dixit Baya Kasmi, la réalisatrice. Etrange coïncidence pour cet étudiant en médecine repenti. Avant d’atterrir sur les planches du Conservatoire royal de Bruxelles, le jeune Laurent, très "prompt à satisfaire les demandes familiales", intègre médecine. Fasciné par les figures médiatiques de l’époque - Léon Schwarzenberg "un cancérologue très présent pour ses patients" et Bernard Kouchner "héros moderne" - et attiré par le prestige social du métier, le jeune homme ne prend conscience de son imposture que lorsqu’il se retrouve nez à nez avec un cadavre humain "en plus je suis mal à l’aise dans les hôpitaux". Trop jeune pour avoir la clairvoyance d’affirmer qu’il souhaite faire du théâtre et enfermé dans un carcan familial doté d’un certain niveau de vie "enfant d’expatrié, j’ai grandi dans une bulle dorée", Laurent Capulleto soigne son échec sur les bancs d’une école d’ingénieur. Il joue un rôle mais pas celui qu’il veut. "J’étais complètement déconnecté", plaisante-t-il aujourd’hui.
Etre ou ne pas être. Ces quatre années  dans la blouse d’un étudiant modèle lui ont permis de mûrir "à 18 ans, on est trop jeune pour savoir ce que l’on veut" et de se convaincre que le seul acte d’autorité qu’il imposera à la majorité de ses enfants sera une année sabbatique "loin du cadre familial et scolaire pour découvrir qui l’on veut être profondément". Pour Laurent Capulleto, être passé par le théâtre, univers qu’il affectionne depuis l’enfance. L’élève modèle (qu’il ne peut pas ne pas être) est reçu d'emblée au Conservatoire de Bruxelles. Il y rencontre Pierre Laroche, "pair spirituel" qui lui donne la confiance nécessaire pour assumer de jouer la comédie. Son apprentissage se poursuit au Théâtre national de Belgique, puis à l’Infini Théâtre, compagnie au sein de laquelle il devient acteur permanent.
Le Prénom. Le cinéma, il s’y fera un (pré)nom tardivement. Le marché belge, peu développé ou évoluant dans le milieu confidentiel des Festivals, ne fait pas du 7e Art une priorité pour les acteurs. Les productions belges sont moins nombreuses ou co-produites par des distributeurs Français. Lorsque Laurent Capelluto est nommé pour son second rôle dans Un conte de Noël d’Arnaud Desplechin, les journalistes belges le prennent d'ailleurs pour un français "alors que cela faisait déjà 10 ans que je tournais dans des pièces de théâtre belges" précise-t-il, amusé. Ce manque de considération pour le monde du théâtre et du cinéma n’a pas que des inconvénients : "En France, les élèves de Conservatoire sont très inquiets de se savoir repérer par des directeurs de casting. En Belgique, on est beaucoup plus détendu puisque de toute façon il n’y a pas ou peu de marché !". En découle une liberté de jeu, valable aussi dans le choix des rôles. Là où les acteurs français choisissent leur rôle pour des questions d’image, Laurent Capelluto lui, se pose rarement la question.
Bourgeois gentilhomme. Il a beau avoir un mode de vie très éloigné de la smala filmée par Bahia Gasmi, il se dit "bourgeois, avec une vie très rangée", Laurent Capelluto a été touché par la sincérité, la lucidité et l’intelligence des propos de la réalisatrice. Ce gentilhomme qui "aime accompagner un réalisateur dans un projet lorsqu’il fait sens" n’a pas hésité à se glisser dans la peau de Paul, un homme à la fois rassurant et naïf.
Amants magnifiques. Dans Je suis à vous tout de suite, le personnage de Laurent Capelluto s’éprend d’Hanna, une jeune femme qui couche avec des hommes par excès de gentillesse. Plus qu’une question morale sur le bien ou le mal de cette situation, Baya Kasmi interroge la confiance en soi selon Laurent Capelluto : "Paul fait preuve d’une grande ouverture d’esprit simplement parce qu’il aime Hanna". Leur scène d’amour, très belle, en est la preuve. Pudique, l'acteur s'est prêté au jeu car "il fallait qu’ils se rencontrent physiquement" explique-t-il. "Ce n’était pas simple mais grâce à Vimala et la délicatesse de l’équipe, je me suis laissé emporter" précise-t-il. Vis-à-vis de sa vie de couple et de famille, c’est plus simple de se mettre nu que de se mettre à nu "certains regards, mots peuvent parfois être bien plus difficiles à assumer" avouera-t-il. Mesdames, Laurent Capelluto est à vous tout de suite... mais pas tout le temps ! 

Portrait chinois :
Laurent Capelluto, si vous étiez une odeur ?

Celle de mes enfants.

Un plat ?
La molokheya, un plat qui porte le nom de la plante dont il est composé. Il y a aussi des épinards, de l’ail et du cumin. C’est une recette que ma grand-mère puis ma mère préparait.

Une chanson ?
"Say a little prayer" d’Aretha franklin. J’adore la ferveur de cette chanson. Chaque écoute me donne une pêche d’enfer.

Une femme ?
Ma grand-mère. Elle m’a inculqué la fantaisie. Elle me répétait de faire avec sérieux les choses fantaisistes et avec fantaisie les choses sérieuses. Et elle me conseillait aussi de consacrer un moment dans la journée pour faire le pitre. Question de santé, paraît-il.

Un pays ?
La Belgique parce que j’aime que son identité ne soit pas figée. En Belgique, rien n’est acquis. La question d’identité n’est pas vécue comme une conviction ce qui m’arrange beaucoup.

Quel artiste belge aimeriez-vous nous faire découvrir ?
Laurent Blondiau, un incroyable trompettiste. Il a plusieurs formations dont Mâäk’s Spirit. C’est aussi un porteur de projet, un initiateur de big band. Il est peu connu, découvrez-le vite. En littérature, Tom Lanoye est formidable.

Affiche du film à découvrir en salles le 30 septembre 2015 © Le Pacte