"Mon jardin a la bougeotte, comme moi, mais il s'accommode très bien de mes absences"

Zéro contrainte, c'est un peu le credo de Marie-Claude ! A coup de compromis, de végétaux foisonnants, d'influences anglaises et de mobilier au charme désuet, elle a fait de son petit jardin normand un lieu coquet et romantique.

"Mon jardin a la bougeotte, comme moi, mais il s'accommode très bien de mes absences"
© Marie-Claude Bilisko

Pourriez-vous tout d'abord vous présenter en quelques mots ?
Je suis enseignante retraitée depuis douze ans et je vis en Normandie dans une maison de campagne, dans un petit village de l'Orne. J'ai le grand privilège de posséder un jardin que j'investis avec bonheur : ce n'est ni exagéré, ni pédant de dire que c'est une réelle immersion-communion d'y "travailler", de prendre soin de lui, de l'investir chaque saison.
La décoration, le jardinage et la pratique de l'anglais sont mes occupations favorites ! J'ai une grande admiration pour les Anglais pour leur mode de vie, leurs villages, leurs jardins, le confort de leur maison ; je suis une grande adepte de la série Inspecteur Barnaby pour les images...
Ma philosophie de jardinière me souffle de ne pas m'imposer de contraintes quelles qu'elles soient : cultiver raisonnable, utile ? Non, je gère mon conflit avec mes plantes ; certes, mes envies ne correspondent pas forcément à la nature du sol ou à l'ensoleillement ou aux parties ombragées ! Je m'adapte ou elles s'adaptent, c'est une suite de compromis et de concessions ! Je reste cependant à l'affût de leur bien-être et de mon besoin d'équilibre, d'esthétique (le mien) et de mes goûts. Planter, déplacer, abandonner, replanter... Mon jardin a la bougeotte comme moi mais il s'accommode très bien de mes nombreuses absences... Karel Capek a écrit L'année du jardinier pour tous les jardiniers amateurs qui abandonnent périodiquement leur jardin : ne jamais le confier à quelqu'un est la morale de l'histoire !

livret maria images 012
Clématite, hostas et décoration en fer forgé dans le jardin de Marie-Claude © Marie-Claude Bilisko

Depuis combien de temps possédez-vous ce jardin ?
L'histoire avec ce jardin dure depuis cinq ans. Auparavant, c'était un jardin "à l'anglaise" mais peu généreux, pour l'entretien facile d'une résidence secondaire. Il appartenait à un couple d'Anglais.

Comment vous est venue cette passion pour le jardinage ?
Ma passion pour le jardinage est née au cours de mon enfance : une immersion quotidienne dans les fabuleux jardins familiaux en Poitou, dans lesquels père et grand-père s'occupaient du potager pour nous nourrir, jardins traversés par des ruisseaux et des lavoirs que ma mère fleurissait de dahlias. Les parcelles étaient bordées de petites haies de buis... C'est si loin et si actuel, avant-gardiste de notre époque où les topiaires ont tant d'importance. Ma grand-mère m'emmenait chaque semaine dans les vieux cimetières et nous nous extasions devant les ornements de fonte et les couronnes de perles. L'arrivée en Normandie n'a fait qu'accroître mon intérêt pour les beaux jardins - jardins anglais, jardins à la française. L'Orne en offre une palette qui suscite la passion.

Quels sont les grands travaux que vous y avez effectués ?
Je ne parlerai pas de "grands travaux", si ce n'est la construction de la véranda qui est parfaitement intégrée à l'ambiance désirée : intérieur et extérieur sont dans le prolongement l'un de l'autre, sans heurt de style ou de couleurs. Le jardin est le double végétal de la mise en scène d'un lieu de repos et... les soirs "normands", nous dînons sous "serre".
Structurer le jardin s'est fait sur plusieurs années. Trois espaces y ont été créés, reliés par un grand portail rouillé, puis par une tonnelle donnant l'illusion d'avoir un grand jardin à découvrir, à demi-clos, à demi-ouvert, pour surprendre le visiteur.

livret maria images 046
Dans le jardin de Marie-Claude, plusieurs coins de détente permettent de se poser et d'admirer différentes perspectives © Marie-Claude Bilisko

Y a-t-il un endroit que vous appréciez plus particulièrement dans votre jardin ?
J'ai privilégié les coins de détente, plusieurs salons de jardin d'où une nouvelle perspective se dessine, et un foisonnement de plantes aux feuillages harmonieux par la couleur et la hauteur. Mon coin préféré est au fond du jardin, sous le pommier où, justement, couleurs et hauteurs ont été particulièrement étudiées. C'est la partie la plus éloignée de la maison, de la rue, de l'extérieur : silence et rêverie enveloppés de végétal.

Quels animaux trouve-t-on dans votre jardin ?
Il m'est arrivé de découvrir des crapauds jaunâtres en déplaçant une pierre. Les oiseaux utilisent les abreuvoirs et font leur nid dans les trous des murs en pierre. Une chatte sauvage a fait ses petits dans une brouette et les chouettes nous surprennent quand le soir tombe.

Quelle est la rencontre la plus surprenante que vous avez faite dans votre jardin ?
La rencontre la plus discrète, la plus timide, fut celle d'un hérisson, vite apeuré, vite enfui...

Côté déco de jardin, quels sont vos goûts ?
La décoration de mon jardin a beaucoup évolué au fil du temps et des saisons. J'ai été très imprégnée de nombreuses visites de jardins privés ou publics, en France et en Angleterre. J'ai aussi été abonnée à une revue anglaise, Gardens, et cliente et admiratrice du Jardin Boutique à Champsecret dans l'Orne. J'y ai bénéficié d'une influence qui touchait certains points de ma personnalité :
 le goût pour les objets rouillés (gazebo, arches, vestiges),
 plus de plantes que de fleurs, pour leurs couleurs (collection de heuchères et de hostas),
 de jolis salons en fonte,
 beaucoup d'importance donnée à la structure et à la perspective,
 une grande préférence pour la symétrie.

Avez-vous prévu de nouveaux aménagements ?
Pourquoi pas un ruisseau qui s'écrase, cristallin, sur un éboulis de pierres.