Soumise : "A 23 ans, j'ai eu un maître pendant 6 mois", le témoignage SM de Fanny

A 23 ans, Fanny est étudiante et décide de se faire un peu d'argent comme serveuse pour des évènements sadomasochistes. Un jour, elle est invitée à pénétrer l'envers du décor, comme simple observatrice. Elle rencontre alors "son maître" qui lui propose un contrat de soumise. Fanny nous raconte aujourd'hui son expérience, dont elle ne regrette rien. Un récit prenant.

Soumise : "A 23 ans, j'ai eu un maître pendant 6 mois", le témoignage SM de Fanny
© Fotolia

"J'en suis venue à tester le SM par simple hasard. Etant étudiante, je réponds à l’annonce de l’ami d'un ami qui cherche des serveuses pour des événements sadomasochistes : des soirées sur des péniches et chaque année, une grande soirée dans un lieu tenu secret avec d’énormes dancefloors, des démonstrations… Je regarde quelques photos et j’accepte : l’esthétique du milieu me plaît beaucoup. Je me retrouve à servir des vodkas pommes à de la population "encuirée". Ambiance réellement festive et sans grosses tensions sexuelles. Forcément, on me propose parfois, contre monnaie, de faire telle ou telle chose.

Je bosse ainsi pendant trois ans. Un soir, lors d’une pause, je suis approchée par un homme qui m’entraîne vers les "coulisses" ; il m’aborde très simplement, comme l’aurait fait un jeune homme lambda. Pas de costume à la Christian Grey, mais toujours habillé de noir. La conversation tourne essentiellement autour du SM, de ses pratiques, des miennes (totale novice).

Le lendemain, nous déjeunons ensemble et il me propose, après de longues explications rassurantes et un interrogatoire psychologique très étrange, si je souhaite débuter un contrat. Il me demande, par exemple, si je suis stable psychologiquement, si je discerne le bien du mal, que ce soit d’un point de vue physique mais aussi moral. Je suis intriguée, curieuse, son regard me séduit. Je me dis que si tant de gens viennent à ces événements, c’est qu’il existe forcément une source de plaisir dans les pratiques SM. Je lui plais, il me plait… J’accepte.    

J’ai rendez-vous chez lui la semaine suivante. On établit les règles de contrat (mot de sécurité, pratiques acceptées…). Une fois signé, il m’annonce qu’il est marié et papa, me donne son lieu d’habitation, (différent de là où nous nous trouvons), me parle très naturellement de son "autre vie" (sa femme, sa maison sur les quais de Seine...). J’apprends qu’il a 38 ans. Il ne boit jamais d’alcool de peur de se faire démasquer. Personne n’est au courant dans son entourage. Il se fait appeler P. Je ne peux le contacter qu'à certaines heures précises de la journée (à 13H00 ou entre 23h00 et 2h00).

Les séances se passent de la façon suivante : c’est moi qui lui donne le signal de départ. Il faut savoir que la soumise est en fait maître du jeu. Le maître évolue dans l’espace qu’elle lui laisse. Les soumises décident des pratiques, posent leurs limites... le contrat sert à ça. Il sert à nous protéger et le maître se protège ainsi pour éviter les accusations.

Cependant, je remarque rapidement que le souci de ces relations soumise-maître, c’est que le syndrome de Stockholm se développe… P. arrive à créer le manque, je deviens dépendante. Puis jalouse des autres "soumises", de sa femme... Il gère quatre soumises en même temps et se plait d’ailleurs à nous mettre en concurrence (et ça marche). Très vite, je me sens en compétition avec les autres, sans même les connaître.

Lors des séances, parfois nous faisons l’amour, parfois non. Quand c’est le cas, il utilise toujours un préservatif. Moi, en parallèle, je suis obligée de prendre une contraception.

La douleur me procure du plaisir, au bout de quelques séances. La première fois, j'ai le réflexe de lui dire, énervée : "Tu fais quoi là ?". Mais au bout de quelques heures, ça va, on s’habitue, on se prend au jeu, on finit par aimer ça. Il essaie de me pousser un peu plus vers mes limites niveau physique. Quand le plaisir disparait et que je suis obsédée par la douleur, je l'ordonne d'arrêter. Mon mot de sécurité est "flûte". Le but est de trouver un mot banal, qui sonne étranger aux conversations que je peux avoir avec lui, pour le reconnaitre vite et agir vite si on doit tout stopper, détacher, reposer... Je n’ai jamais peur car il est toujours soucieux de ce que je ressens.

Il utilise des cordes, il m’attache, me suspend et me frappe avec un martinet. J’ai évidemment des traces sur le corps mais mon maître s’arrange toujours pour qu’elles ne soient pas visibles quand je suis habillée.

Une séance peut durer une heure, comme une après-midi ou une soirée entière. A chaque désobéissance, je subis une punition. On s’amuse à se désobéir l’un à l’autre. Il est switch (le fait d'être maitre et soumis à la fois) mais je suis incapable de le dominer, c'est le rôle d'une autre soumise (la numéro 2... moi, je suis la numéro 4). En fonction de qui il a devant lui, il peut être un sévère maître ou un soumis complet.

Quand on débute avec un maître, il nous "dresse". Une fois "dressée" (on se connait bien, on suit parfaitement ses ordres, conseils…), il nous offre un collier à mettre à chaque séance. Le collier, c’est comme un collier de chien, avec une encoche pour une laisse et un écriteau avec notre nom. C’est une récompense qui se mérite, il faut être assidue, obéissante, sympa, ne pas faire de crise de jalousie… Ainsi, on devient soumise officielle. Pour ma part, je n’obtiens pas le collier. C’est très dur, il faut être disponible tout le temps. Je le vois une à trois fois par semaine. Mon maître a réussi à faire déménager deux de ses soumises pour qu'elles habitent à côté de son "appartement SM".

En dehors des séances, je suis sommée de répondre à ses sms dans la minute, je dois lui envoyer des photos de mon corps, sinon, nos séances sont annulées ou il me punit.

On se voit ainsi pendant de longs mois, toujours dans cet appartement. Puis, nos rendez-vous s’estompent pendant deux semaines pour des raisons "personnelles", qu’il invoque. Je m’éclipse à ce moment-là et mets un terme au contrat avant sa fin. Parfois, il me recontacte pour me proposer un nouveau contrat.

Je n’ai jamais parlé de cette aventure à mes amis de la vie de tous les jours. Ils ne sont pas au courant, je doute qu'ils soient aptes à comprendre. Néanmoins, quand, dans une conversation, le sujet est lancée, je parais bizarrement très informée...

Aujourd'hui, c'est terminé et je ne regrette rien. J'ai trouvé cette expérience enrichissante. La violence dans le sexe s'est beaucoup banalisée avec le porno. Dans le SM, en réalité, c'est une approche beaucoup plus dans le respect de l'autre, de la reconnaissance de l'autre en tant que personne et non objet, vraiment. La seule chose que je trouve terrible, c'est le fait qu'un homme peut vraiment avoir une double vie. C'est que mon maître m'a prouvé."