Education au Tadjikistan : les talons comme uniforme

Quand les hommes tentent d'aider les femmes à être plus féminines, ça donne toujours quelque chose de surprenant. Ou de tout à fait à côté de la plaque. Au Tadjikistan, république un peu perdue d'Asie Centrale, c'est un directeur d'Université qui s'y est mis. A l'université d'Etat de Douchanbé, la capitale, Rakhmonov Abdujabbor a décrété un nouveau dress-code pour son établissement. Les étudiantes ne pourront assister à leur cours qu'à condition de porter des talons de 10 cm maximum. Radzhabmo Kosimova, présidente du Conseil des femmes de l'Université justifie cette décision absurde : "Les mocassins gâchent l'apparence des filles. Nous pensons que les talons aident les femmes à se sentir plus féminines, plus sûres d'elles, et que cela rend leurs interlocuteurs plus à l'aise".
On se demande si cette femme a, ne serait-ce qu'une seule fois, porté des talons pour aller en cours, courir, descendre et monter des escaliers. "J'ai des problèmes aux chevilles et j'ai du mal à marcher avec ces chaussures hautes", témoigne une élève. Comme c'est étonnant... Alors que l'uniforme demeure un moyen efficace pour gommer les différences sociales entre les élèves, cette nouvelle règle semble plus se rapprocher d'une vision réductrice de la femme (vous portez des talons, donc vous êtes féminine) que d'une ambition philanthrope de les épanouir.
Preuve en est, l'expérience douloureuse d'une journaliste de l'agence Asia Plus. Son enquête, qui a confirmé l'obligation de porter des escarpins à l'Université, a été violemment interrompue par le directeur qui a confisqué l'équipement de la reporter.
Pire, il l'a fait arrêter, pour avoir soi-disant pris des photos de lui sans son autorisation. Malheureusement, il n'a pu lui effacer sa mémoire et elle a confirmé le contrôle très rigoureux à l'entrée de l'Université : pas de talons, pas d'éducation... Cet établissement est complètement à côté de ses pompes !