Lapidation ou pendaison : le dilemme de Sakineh

A une image de cauchemar, à une pratique barbare, à une torture d'un autre siècle succède, non pas la clémence, mais une alternative révoltante.

Depuis plus de six ans, une femme croupit dans sa cellule de Tabriz, condamnée à la lapidation pour adultère et complicité de meurtre. Chaque jour qui passe la rapproche inéluctablement de ce supplice auquel elle est destinée, au terme d'un simulacre judiciaire dont l'Iran a le secret. "Quelle est l'imprescriptible faute qui a valu à cette mère de famille de 43 ans de recevoir, 99 coups de fouet et d'être, après cela, enterrée vive, jusqu'au cou, et voir une horde de mâles lui fracasser la tête à coups de pierres jusqu'à ce que mort s'ensuive?", questionne Bernard Henri Levy, à l'initiative d'une pétition contre ce massacre organisé.


Deux histoires d'amour sont prétextes à ce verdict tragique. Les cinq juges devant lesquels est passée Sakineh n'ont jamais réussi à prouver qu'elle était impliquée dans l'agonie de son mari, et ses relations extraconjugales auraient eu lieu plusieurs années après le décès de celui-ci.

 

Alors que l'on croyait la sentence suspendue depuis juillet, en raison du tollé international soulevé par cette affaire et des "doutes" quant aux "preuves" dans le dossier, Sakineh Mohammadi Ashtiani pourrait finalement être exécutée... au bout d'une corde !

Du supplice au crime


Selon des propos cités dimanche par l'agence Fars, Malek Ajdar Sharifi, chef de la justice de la province iranienne de l'Azerbaïdjan orientale –où elle est incarcérée-, a déclaré que dans la mesure où  la lapidation ne pouvait être appliquée, le chef de la justice iranienne, l'ayatollah Sadegh Larijani, avait estimé que la justice pouvait "choisir la pendaison" pour appliquer la peine de mort, mais avait demandé "l'avis d'autres juristes religieux" sur le sujet.

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Photo portrait de Sakineh mise a disposition par Amnesty International pour usage editorial uniquement. 28/08/2010

Si les Chiennes de garde sont aux abois, d'autres célébrités se sont indignées.
Révulsée par la perspective de ce sort atroce, Isabelle Adjani a redonné courage et espoir à la martyre en lui écrivant: "Sakineh, votre nom bat dans mon cœur, et mon cœur bat en vous écrivant. Votre nom est sur toutes les lèvres et se murmurera à faire crever les tympans des juges qui restent sourds aux gémissements des femmes dont vous êtes l'irréductible figure de liberté".
Face à cet ignoble châtiment, notre First Lady a aussi, il y a un an, rédigé un plaidoyer poignant qui lui a valu d'être blasphémée par la presse de Téhéran. Le journal Kayhan, quotidien proche du gouvernement de Mahmoud Ahmadinejad, a publié un article offensant intitulé "Les prostituées françaises rejoignent la lutte des droits de l'homme". Dans l'édito persan, on pouvait lire ces lignes violentes: "Carla Bruni était déjà parvenue à briser le mariage de Sarkozy et à devenir la première dame de France (...) Il y a peu, l'épouse infâme de Nicolas Sarkozy et Isabelle Adjani, l'actrice française à la morale corrompue, ont apporté leur soutien à Sakineh...".

Cette fois, ni insultes ni opprobre jetés. Le responsable de la justice iranienne qui avait évoqué la pendaison vient de déclarer que les médias avaient rapporté des "informations tronquées à l'interprétation incorrecte". La République islamiste d'Iran serait-elle sensible aux pressions de l'Occident ?