Entretien avec Wendy Bouchard, Femme de média en or

Wendy Bouchard rejoint M6 en septembre 2012 pour présenter le magazine d'information et de société "Zone Interdite". Elle reçoit en décembre le trophée "Femmes en Or" dans la catégorie "Femmes de média". Rencontre avec une journaliste hors-pair.

Nous avons rencontré Wendy Bouchard autour de la projection du prochain Zone Interdite "Les Femmes : enquêtes sur les nouvelles victimes de l'alcool", diffusé dimanche 16 mars à 20h50.

Comment expliquez-vous la certaine indifférence du corps médical constatée dans ce reportage face à l'alcoolisme ?

Wendy Bouchard : "J'ai du mal à comprendre, c'est vrai. Je ne sais pas s'il s'agit vraiment d'indifférence, je pense que c'est plutôt un manque de formation. On agit quand-même dans le flou alors que c'est une maladie ancestrale, mais c'est toujours resté un sujet tabou. Ce qu'on vous montre ici justement c'est qu'il y a des femmes, hyperactives, business women qui elles aussi sont tombées dans l'alcool. Il y a toujours une faille, une rupture au départ, une solitude, ou une incapacité à être heureux. Pourquoi les médecins ne s'emparent pas du sujet ? Ça je ne le sais pas, mais ce que je sais c'est que des médecins généralistes arrivent à encourager les groupes de paroles, à faire acte d'information car c'est une voix de guérison formidable."

Et pour ce qui est du médicament baclofène ?

W.B. : "Pour ce qui est du baclofène, c'est une sécurité. Que le corps médical ait encore un doute sur le médicament, c'est déroutant, mais ce qui est déroutant aussi c'est que le baclofène est un médicament détourné de son premier usage (utilisé pour les douleurs musculaires, ndlr.) et que l'on n'a pas encore de référence en la matière. C'est un principe de précaution. Donc je comprends la circonspection du corps médical sur ce sujet-là, ce que je ne comprends pas en revanche c'est que les médecins généralistes ne soient pas plus formés à informer leurs patients."

Vous dites très justement dans le reportage qu'un homme qui boit est qualifié comme quelqu'un de festif, de bon vivant, et qu'une femme est qualifiée de fille facile par exemple. Comment expliquez-vous ces disparités ?

W.B. : "Déjà parce que c'est aussi une maladie moins connue chez les femmes : un alcoolique sur cinq est une femme en France. C'est inscrit dans nos mœurs, dans nos mentalités, un homme est autorisé à boire et une femme alcoolique, c'est terrible. Maintenant les traitements sont les mêmes et la solitude est encore plus importante chez la femme justement parce qu'elles se cachent beaucoup plus qu'un homme."

Comment sont choisis les sujets et reportages du magazine ?

W.B. : "On essaye de percer des "zones interdites", des tabous, des sujets de société qui ne sont pas encore suffisamment mis en lumière. Là, il se trouve que l'alcoolisme, on connait, on sait que c'est un fléau, que ça existe, mais ce qu'on sait moins c'est que de plus en plus de jeunes s'y mettent et comment les femmes s'y mettent et s'en sortent. Il s'agit de lever le voile sur un sujet rependu mais méconnu sur certains aspects. On essaye aussi de faire attention à ce qui peut être un sujet de préoccupation d'une année sur l'autre, car ces enquêtes durent entre 6 mois et 2 ans. On fait attention à flairer les sujets qui seront dans l'air du temps en se disant qu'il faut contenter un public large, mais qui sont aussi des vrais sujets de société desquels on ne peut passer à côté."

Zone interdite existe depuis mars 1993 (21 ans). L'émission a notamment reçu en 2000 le 7 d'or de la meilleure émission d'information. Comment expliquez-vous que l'émission plaise toujours autant au public ?

W.B. : "On l'explique par notre longévité justement, avec toutefois la difficulté d'une concurrence des chaînes de la TNT qui ont bien compris le filon de ces magazines en immersion, sur le long cours et qui avec beaucoup moins de moyens arrivent à faire des choses qui se tiennent. Il faut donc que l''on rivalise de créativité et que l'on aille vers des chemins dans lesquels on n'était pas vraiment attendus comme le Salon de l'Agriculture ou les coulisses du Palais de Monaco. Des sujets qui allient aussi notre histoire, notre patrimoine, avec des indiscrétions. Il faut sortir des sentiers battus ! Les sujets sont visités et revisités et il nous faut être parfois ingénieux, savoir se renouveler. Ce n'est pas toujours simple face à la concurrence, donc on propose des sujets traités de manière inédite."

Vous présentez également "Europe 1 Midi - Votre Journal" sur Europe 1 du lundi au vendredi. Présenter deux émissions, c'est un avantage ou un inconvénient ? 

W.B. : "C'est un inconvénient en termes de temps, mais c'est un gros avantage côté contenu et réflexion parce que ce que je traite au quotidien sur Europe 1 m'aide à voir justement ce qui va rester dans l'esprit des gens, ce qui marquera la société. Là, nous sommes en plein psychodrame des écoutes, on va donc réfléchir très sérieusement à la question de l'atteinte à la vie privée par exemple. Cela me donne un pain quotidien très important et très intéressant pour flairer les sujets qui vont durer."

À quelques jours des municipales, que pensez-vous de la parité en politique ?

W.B. : "C'est un univers tellement machiste que maintenant lorsqu'une femme arrive, on dit que ce n'est pas grâce à son talent mais c'est parce que la loi l'oblige."

 Une étude du service Pressed/iota a récemment montré que la parité dans la presse n'était "pas encore d'actualité". Que pensez-vous de cela ?

W.B. : "Depuis l'origine de la loi sur la parité, je suis plutôt opposée à ces mesures car je fais confiance en le genre humain et a priori il est toujours mieux qu'une femme s'impose naturellement plutôt que la loi ne fasse en sorte qu'elle ne s'impose. Maintenant dans la presse, il y a toujours eu des femmes patronnes de presse, il y a eu de grandes journalistes françaises et il n'y avait pas de loi sur la parité alors que le milieu était plus machiste qu'avant. Qu'il y ait plus de femmes c'est bien, et je le revendique sans être féministe, mais je suis très embêtée avec ces histoires de quota. 

Je pense qu'on est trop obsédées par ce problème, qu'il faut qu'on avance avec et qu'on fasse preuve de nos talents, de nos compétences, qu'on arrête de se victimiser et de toujours se dire minoritaires. Même si dans les faits c'est un peu ça, je pense qu'on a tout à gagner au contraire à garder la tête haute."

 

wendybouchard
Wendy Bouchard © Sipa