Youssou N'Dour veut faire swinguer le Sénégal

Politique spectacle. Le chanteur sénégalais Youssou Ndour, 52 ans, a annoncé qu'il se présenterait à l'élection présidentielle de février, dans une déclaration sur "sa" télévision, Futurs Médias (TFM).

"Je suis candidat", a proclamé lundi soir Ndour, arguant d'"un devoir patriotique suprême" et expliquant répondre à des sollicitations de nombreux Sénégalais. Un pas de plus dans son opposition à l'actuel leader Abdoulaye Wade, qui brigue, à 85 ans, un troisième mandat.

"C'est vrai, je n'ai pas fait d'études supérieures, mais la présidence est une fonction et non un métier. (...) A l'école du monde, j'ai appris" et "le voyage instruit autant que les livres", a précisé celui qu'on surnomme "le gamin de la Médina", quartier populaire de Dakar où il est né en octobre 1959, dans une famille modeste.

Un "self-made-man"

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Youssou N'Dour, à Dakar, le 3 janvier 2012. © AFP

"Je voudrais faire du Sénégal un pays qui se fait tout seul par la main et la force de ses enfants. Ma vie est faite de 10% d'inspiration et 90% de transpiration. Voilà pourquoi j'ai les moyens de mettre le Sénégal au travail", a-t-il affirmé, lançant: "Je veux et je souhaite un Sénégal debout et fier comme le lion rouge (...). Avec vous pour gagner dès le premier tour."

S'il n'est pas un universitaire, ou un intellectuel comme Abdou Diouf, Youssou Ndour, père et grand-père, est parti de rien, pour devenir une gloire internationale. Roi du 'mbalax', genre musical dansant et saccadé, artiste le plus populaire d'Afrique de l'Ouest, auteur de plus de 20 albums, il a accompagné au micro les plus grandes célébrités et s'est engagé, entres autres combats, contre le paludisme et la faim, en ayant réussi à préserver relativement bien sa vie privée.

Manitou des médias

Star du show-biz, homme d'affaires avisé, l'interprète de "Seven Seconds" (en duo avec la Neneh Cherry) est à la tête d'un studio, de sociétés de production, de micro-crédit, et anime une fondation caritative. Il dirige aussi un groupe de presse privé composé du journal L'Observateur (quotidien le plus lu du pays avec un tirage de 60 000 exemplaires), de la Radio Futur Média (RFM), et du magazine La Sentinelle.

Souvent critique envers le pouvoir en place, il a peiné pour crever à l'écran. Son projet de télévision a été bloqué par le président Abdoulaye Wade. Une censure déguisée qui a amené le magnat de l'engagement à se radicaliser. Youssou N'Dour a mis sur pied un mouvement citoyen baptisé "Fekke ma ci bollé" ("Je suis là, donc, j'en fais partie" en wolof). Musulman mystique influencé par le maraboutisme, il a alors sorti le single  "Tout est obscur" pour dénoncer la pauvreté, le délestage, et la corruption de sa société...

Une mélodie magique ?

Devenu en 2010 l'heureux propriétaire de la cinquième chaine du pays, le crooner n'hésite plus à scander "les dépenses astronomiques de l'Etat" et un "climat de tension" dans un pays où le revenu moyen par habitant est de trois dollars par jour et où les fréquentes coupures d'électricité à répétition rythment les heurts entre citoyens et forces de l'ordre.

Reste à savoir si la popularité de ce seigneur des canaux se transformera en plébiscite dans les urnes, le 26 février.

"Youssou N'dour : candidat à la présidentielle au Sénégal"