Naziha Mestaoui, une artiste qui transcende les réalités

Artiste et architecte de formation, Naziha Mestaoui est la créatrice du Videomapping, croisant l'espace et l'image. Soutenant la cause de la Fondation l'Oréal pour les Filles et la Science, elle nous a dévoilé sa vision de la science, de la société et de l'être humain.

Naziha Mestaoui, une artiste qui transcende les réalités

Le Journal des Femmes : Parlez-nous de votre parcours, vous imaginiez-vous être artiste à 16 ans  ?   
Naziha Mestaoui : Quand j'étais jeune, j'ai fait une enquête sur ce que je voulais faire de ma vie, mon premier grand choix d'adulte. L'idée que j'avais, c'était de changer le monde ! Très vite, j'ai compris que, par les techniques scientifiques, je pouvais créer ma réalité et la transmettre, d'où toutes les passions qui suivirent. 

Pourquoi soutenez-vous la cause de la Fondation L'Oréal qui est de favoriser les vocations scientifiques féminines ?
N.M. : Pour montrer à quel point la science est créative. Mon but est de faire passer un message, qui est de prendre du recul par rapport à ce qu'on a vécu et de faire comprendre qu'on est acteur de notre vie. Chacun crée sa réalité. Je pense que rien n'est inaccessible. C'est un choix à prendre, à nous d'incarner nos positions.

Vous avez participé à une conférence sur la créativité de la science, pourquoi s'y intéresser ?
N.M. : S'intéresser aux sciences, c'est s'intéresser à la construction de notre société. Cela permet de nous la réapproprier. Ce sont ces domaines scientifiques qui créeront un nouveau type de société, de réalité. Rien n'est prédéterminé, on est victime de rien, il suffit d'agir.

Parlez-nous de vos derniers projets...
N.M. : Le dernier projet que j'ai montré est à Sao Paulo, Yubu Pan Damini. Il permet de voir l'invisible. La physique quantique critique la réalité comme une multitude de vibrations (le son, la lumière, la pensée et la matière). J'ai voulu montré ces vibrations normalement invisibles. J'ai donc travaillé sur les chants sacrés de la tribu Huni Kui avec des shamans. J'ai fabriqué un grand bassin d'eau à l'intérieur duquel je fais jouer ces chants et une série d'ondes qui vont se répercuter à la surface de l'eau. Ainsi, la matière permet de voir le son. Parallèlement, j'ai utilisé des interfaces cérébrales qui permettent d'analyser les ondes cérébrales du shaman quand il joue. Ces ondes et celles du son vont donc se mélanger. Toutes ces vibrations qui composent la réalité sont présentes dans le bassin : l'énergie, la pensée, et le chant. Les shamans ont également peint leurs chants : c'est une autre façon de donner matière à l'immatériel. 

naziha mestaoui yubu pan damini 2014
Yubu Pan Damini 2014: Installation issue de la collaboration avec la tribu Huni Kui autour des chants sacrés. © Naziha Mestaoui