Sexisme au travail : le machisme se professionnalise

L'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est loin d'être acquise : rémunération, statuts, conditions de travail, partage des tâches et des responsabilités, stéréotypes... 80% des femmes se disent "confrontées à des attitudes ou des décisions sexistes".

Vous apportez le café chaque matin à votre boss qui vous gratifie d'un "merci ma belle" ou gagnez deux fois moins que votre confrère, à fonction égale ? Le sexisme ordinaire perdure dans le monde du travail, dans les propos comme dans les actes. C'est le résultat d'une étude de l'institut de sondage LH2 pour le   Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes  (CSEP) publiée ce matin.

Plus de la moitié des femmes (54 %) estime avoir rencontré un frein professionnel en raison du genre : absence d'augmentation ou de prime (36 %), de promotion (35 %), d'attribution de mission (31 %)... 46 % disent avoir déjà eu le sentiment d'être traitées différemment dans certaines situations : être chargée de tâches dévalorisantes ou sous-estimées par rapport à leurs compétences, manquer d'autonomie...

Du côté du langage, 81 % des femmes et 59 % des hommes ont déjà entendu au boulot des jugements comme "elle est hystérique" ou "elle est pire qu'un homme" à propos de celles qui exercent des responsabilités. Beaucoup de remarques sont focalisées sur l'intellect, l'humeur ou le physique. Ainsi, "elle fait sa blonde" ou "ne fais pas ta blonde" a été entendu par 69 % des femmes interrogées, "elle est de mauvaise humeur elle doit avoir ses règles" par 59 % et "c'est quoi cette Barbie ?" par 42 %.

"Ma petite, ma chérie, ma cocotte" : une femme interrogée sur deux (49 %) affirme qu'un collègue masculin l'a déjà interpellée en utilisant un surnom sexiste, et 38 % des hommes affirment en avoir été témoins. Pour les femmes, ces remarques connotées "peuvent modifier le comportement des salariés" (93 %), "ont un impact sur la confiance en soi" (92 %) et "déstabilisent le travail de ceux qui les subissent" (92 %). À l'inverse, 13 % des femmes et des hommes estiment qu'elles "font partie du jeu des relations" entre hommes et femmes.

L'homme vu en "leader" doué pour l'action et fort en charisme, la femme en "assistante", dotée d'empathie et d'un sens de l'organisation: l'attribution de compétences spécifiques en fonction du sexe (répartition socio-genrée des rôles) se pérennise aussi, selon une étude de l'association IMS-Entreprendre pour la Cité. Pourtant, hommes et femmes décrivent le patron "idéal" comme relevant d'un modèle androgyne, conjuguant des qualités attribuées aux deux sexes (charisme, leadership, empathie, organisation...). Mais les femmes s'auto-déprécient, le sentiment et le vécu de discrimination renforçant cet état de fait.
Ainsi, 57,5% des employées pensent que leurs supérieurs favorisent les hommes pour les postes haut-gradés. Elles sont aussi 67% à penser que les hommes sont mieux payés.
Par ailleurs, pour plus de la moitié des hommes (53,1%) et 48,7% des femmes, les femmes qui réussissent leur carrière finissent par se masculiniser, une idée qui peut renforcer un phénomène d'autocensure de la part des salariées.

Enfin, selon une étude Harris Interactive pour Sarenza, interrogés sur les mesures prioritaires à développer pour favoriser la parité dans l'entreprise, les Français plébiscitent le développement de structures pour accueillir les enfants, la sensibilisation à l'égalité et la promotion d'exemples de femmes ayant réussi une belle carrière et celles d'hommes qui se sont épanouis au foyer.