Journée des Droits des Femmes du 8 mars : les femmes sont appelées à faire grève (au moins dès 15h40 !)

A l'occasion de la Journée internationale des Droits des Femmes, celles-ci sont à l'honneur chaque année le 8 mars. Mais connaissez-vous l'origine de cette journée ? On fait le point sur les actions menées ce 8 mars 2023, dans un contexte de grève nationale.

Journée des Droits des Femmes du 8 mars : les femmes sont appelées à faire grève (au moins dès 15h40 !)
© CHARLES BURY/SIPA

[Mis à jour le mercredi 8 mars à 15h30] Le 8 Mars, à l'occasion de la Journée internationale des Droits des Femmes, elles montent au créneau. Alors que les manifestations contre la réforme des retraites battent leur plein, les organisations syndicales, féministes et politiques appellent à une grève féministe dans la continuité de la mobilisation générale.

Les femmes, appelées à faire grève ce 8 mars

L'objectif ? Lutter contre les inégalités "au travail et dans la vie", a précisé la porte-parole d'Attac France et cofondatrice du groupe Les Rosies, Youlie Yamoto. En outre, la réforme des retraites "va pénaliser plus fortement les femmes", a-t-elle déploré. A Paris, le rendez-vous a été donné le 8 mars à 14h à la place de République. Quant aux femmes qui ne pourront pas faire grève, elles sont tout de même exhortées d'arrêter de travail à 15h40, heure à laquelle, chaque jour, "les femmes arrêtent d'être payées", en fonction de l'écart salarial avec les hommes, précise Sophie Binet, dirigeante confédérale de la CGT. Elles sont également appelées à cesser toute corvée ou travail domestique, pour protester contre la charge mentale

Ecart salarial : les femmes sont (toujours !) moins payées que les hommes 

L'inégalité salariale, un fléau difficile à juguler. Selon l'enquête "Les femmes au travail" (Women in Work Index), publiée en mars 2023, les avancées vers l'égalité entre hommes et femmes dans l'OCDE ont été "excessivement faibles" sur les dix dernières années, avec un écart de salaire de 14%. En 2011, l'écart de salaire était à 16, 5 %. La France est 23e parmi les pays de l'OCDE dans l'indice de PwC sur l'égalité salariale, Dans le secteur privé, les femmes sont rémunérées en moyenne 24,4 % de moins que les hommes, selon l'étude de l'Insee "Femmes et hommes, l'égalité en question", publiée le 7 mars 2023. 

Les inégalités hommes-femmes coûtent cher !

D'après une étude dévoilée en 2022 par la Fondation des Femmes sur France Inter, les inégalités hommes-femmes coûtent pas moins de 118 milliards d'euros, par an et en France. "Les inégalités se mesurent avant tout en vies brisées, marginalisées, ou ignorées. Mais puisqu'il faut visiblement parler chiffre pour peser dans le débat, nous avons décidé de calculer ce coût des inégalités entre femmes et hommes", a expliqué Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des Femmes.

Les "comportements virils", par exemple, coûteraient environ 89 milliards d'euros à la société. "84 % des accidents mortels sont causés par des hommes. C'est un surcoût extrêmement important pour la collectivité", a expliqué la chercheuse Lucile Peytavin. En ce qui concerne les violences conjugales, 3,6 milliards d'euros seraient perdus à cause des frais médicaux pour les victimes, mais aussi des aides sociales nécessaires, par exemple.

L'égalité femmes/hommes : qu'en pensent les Français ?

Selon une étude Ipsos Global Advisor, réalisée en 2021, l'égalité salariale entre les sexes est primordiale pour un Français sur deux. Mais la plupart des citoyens sont plutôt pessimistes quant à une éventuelle amélioration de la situation. Environ 11% pensent que l'égalité femmes/hommes sera moindre, et seulement 5% estiment qu'elle progressera. 52% des Français restent convaincus que la crise sanitaire ne changera rien.  

A quels domaines est-il urgent de s'attaquer ? La flexibilité au travail pour les femmes est primordiale, pour 32% des Français, mais surtout la lutte contre les violences (41%). En troisième position, 26% des citoyens souhaitent que les femmes aient un meilleur accès au système de santé.

Journée des droits des femmes : qui l'a initiée en France ?

Mais qui a donc permis la reconnaissance de cette Journée internationale des droits des femmes en France? On le sait peu, mais en 1982, la psychanalyste et militante MLF Antoinette Fouque a œuvré pour convaincre le président de la République de l'époque, François Mitterrand, de reconnaître le 8 mars comme la Journée des droits des femmes.

Elle souhaitait même à l'époque que cette journée soit chômée, fériée et payée! Pour célébrer son combat, les éditions Des Femmes ont publié en janvier trois livres afin d'en savoir davantage sur la lutte qu'elle a menée jusqu'à sa mort en 2014. Rettrouvez les livres Qui êtes-vous, Antoinette Fouque? Entretiens avec Christophe Bourseiller, Gravidanza – Féminologie II, Génésique – Féminologie III.

L'égalité des sexes : quelle priorité pour les citoyens ?

L'égalité femmes-hommes est enfin devenue une priorité pour les citoyens. Un rapport datant de 2021 des associations Focus 2030 et Women Deliver montre que les préoccupations ont (heureusement) évolué. Une majorité des personnes sondées parmi plusieurs pays déclarent que l'égalité des sexes "leur importe à titre personnel" (80 % en France). Près de 65 % (64 % en France) estiment
que leur gouvernement devrait en faire davantage pour promouvoir l'égalité femmes-hommes dans leur pays.

L'étude menée dans 17 pays montre que l'égalité des sexes est très importante pour 52 % des sondés et assez importante pour 28 % d'entre eux. Pour 3 % des personnes interrogées, elle n'est pas du tout importante.

Genèse du combat

Les femmes du monde entier sont mises à l'honneur durant la journée du 8 mars, devenue une date symbolique pour tous les combats liés à la cause féminine. Mais connaissez-vous la genèse de ce jour ?  La Journée du 8 Mars tire son origine dans la lutte pour l'égalité face à une société patriarcale, malgré plusieurs récupérations politiques. De la Russie communiste en passant par les slogans percutants des mouvements féministes français des années 1970, lumière sur les origines de cette journée unique dans notre calendrier.

La Journée des Droits des Femmes est née en Russie 

Le 8 mars 1917, à Petrograd, devenue Saint-Pétersbourg, des femmes descendent dans les rues pour faire entendre leur voix. Elles réclament de quoi manger et le retour de leurs époux partis au combat : c'est le début de la Révolution russe mais aussi celle des femmes du globe. Face à la misère et au froid, elles font grève et demandent la paix en marchant pacifiquement. C'est ainsi que la date du 8 mars est devenue une date-clé. En 1921, Lénine proclame le 8 mars comme étant la Journée des Femmes, en mémoire à celles qui ont fait naître la Révolution russe. Discours et affiches de propagande invitent les travailleuses opprimées à se rallier aux contestations communistes pour défendre leurs droits. Après la Seconde guerre mondiale, on célèbre la gent féminine lors de la Journée des Femmes un peu partout en Europe, aux Etats-Unis et en U.R.S.S. En France, le mouvement "Femmes Solidaires" de l'Union des Femmes Françaises (UFF), qui compte 1 million d'adhérentes en 1947, procède à des avancées en matière de droits. Le 8 mars est désormais intrinsèquement lié à la lutte des femmes dans le monde.

A partir des années 1970, les combats s'amplifient et prennent une tournure plus féministe. Simone Veil est la première femme à entrer au Conseil supérieur de la magistrature, le premier manifeste féministe "Le torchon brûle" paraît et le Mouvement de Libération des Femmes (MLF) naît. Associations, mobilisations, slogans : ces dernières se battent contre l'avortement, l'inceste, le viol et pour l'IVG et l'égalité des droits.

La Journée Internationale des Droits des Femmes n'a que 40 ans

En 1977, l'ONU proclame le 8 mars comme étant la Journée Internationale des Femmes, dans le prolongement de l'"Année de la Femme", qui a été décrétée en 1975 en réponses aux nombreux mouvements féministes. Néanmoins, cette date célébrant les femmes n'a pas immédiatement été bien perçue, considérée globalement comme une récupération politique de la lutte féminine. En France, il faudra attendre 1982 pour que les femmes puissent jouir d'une journée qui leur soit consacrée.

Le 8 mars, célèbre-t-on "la" femme ou "les" femmes ?

En 2016, le Comité ONU Femmes France se mobilise pour que l'appellation "Journée Internationale des Femmes" soit mise en place. En effet, on a longtemps entendu parlé de "la Journée Internationale de la Femme", or, il s'agirait d'une erreur de traduction de l'anglais "International Women's Day". Une faute qui a réussi à s'éparpiller comme une traînée de poudre, à tel point que l'on ne connaît plus le véritable nom de cette journée !

Pour clarifier les choses, Najat Vallaut-Belkacem, alors ministre des Droits des Femmes, expliquait en 2013 : "Le 8 mars n'est pas, comme on l'entend parfois, la journée de "la" femme, qui mettrait à l'honneur un soi-disant idéal féminin (accompagné de ses attributs : cadeaux, roses ou parfums)".  Si la réponse est claire, l'idée de réduire les personnes de sexe féminin par le simple fait de dire "la Journée de la femme" peut porter à débat. Nous disons bien "les droits de l'Homme", pourquoi ne pas pouvoir parler de "la Journée de la Femme" sans passer pour un machiste qui sous-entend que toutes les femmes se ressemblent ? Selon certains, le plus simple est de parler sobrement du "8 Mars".