Florence Cassez, portrait d'une femme libre

Florence Cassez, emprisonnée au Mexique retrouve sa liberté après sept ans d'enfermement. Retour sur le calvaire de la Française présumée coupable d'enlèvement.

Partie vivre au Mexique, Florence Cassez n'en revient qu'après sept année passées derrière les barreaux. Retour sur une histoire d'amour qui a mal tourné.
Il était une fois en 2003, une jeune femme en quête du soleil de Mexico. Florence Cassez, alors directrice d'une boutique à Calais quitte son poste pour l'eldorado mexicain. Elle y rejoint son frère Sébastien, à la tête d'une entreprise d'équipement médical. Ce dernier joue les entremetteurs et lui présente Israel Vallarta Cisneros, soupçonné d'être à la tête du réseau d'enlèvement les Zodiaques, Los Zodiacos. La jeune femme ne s'en émeut pas. Elle ne voit en lui que le vendeur de voiture qu'il prétend être. Elle s'éprend du (bad) boy et organise même une rencontre officielle avec ses parents, en visite au Mexique. Après une première rupture et un retour en France, Florence retombe dans les bras de son amant, jusqu'à ce 8 décembre 2005 où elle est arrêtée en sa compagnie sur l'autoroute. La police la met à l'écart lui prétendant qu'elle sera libérée rapidement. C'est sans compter le coup de théâtre qui l'attend.

Une arrestation, un feuilleton. Le 9 décembre 2005, la scène de l'arrestation est rejouée selon un scénario orchestré par la police judiciaire fédérale. Genaro Garcia Luna, chef de l'équivalent du GIGN français, a convoqué la presse au ranch d'Israel Vallarta pour une prise en flagrant délit - en direct - d'enlèvement. Trois personnes, parmi lesquelles un enfant de 10 ans, quittent la cabane du jardin du couple : pour le public, médusé par ces (fausses) images, la culpabilité de la Française ne fait pas de doute.
Machination ? Après 18 mois de procès, la condamnation tombe. Florence Cassez écope de quatre fois 20 ans pour quatre enlèvements, huit ans pour association de malfaiteurs, quatre ans pour possession d'armes à l'usage exclusif des forces armées et quatre ans pour possession de munitions, soit 96 ans d'emprisonnement. L'accusation repose sur les témoignages des(dits) otages.
Première faille. Des trois personnes kidnappées retrouvées, seule une reconnaît la Française lors des confrontations. Les deux autres victimes retrouvent la mémoire seulement trois mois plus tard. Ces dernières prétendent l'avoir reconnue à sa voix, son accent français, sa peau et ses cheveux. Pour la presse française au Mexique, cette nouvelle déclaration aurait été soufflée par la police judiciaire fédérale après l'intervention de Florence Cassez dans une émission.

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Florence Cassez, en 2005 à la prison fédérale de Mexico © STR/AP/SIPA

Mensonge et trahison. Le 11 février 2006, la Française témoigne en direct de sa prison dans l'émission Punto de Partida. Elle y dénonce le montage de son arrestation et prend à parti le chef de son arrestation Genaro Garcia Luna. Ce dernier, confondu en direct, avoue une mise en scène demandée par les médias mais ajoute "que cet élément ne sera pas pris en compte lors du procès de la Française". Et il voit juste. Lors du procès, qu'importent la mise en scène de l'arrestation, le témoignage d'un couple de voisins affirmant n'avoir jamais vu de personnes dans la cabane ou encore l'innocence de Florence Cassez clamée par son compagnon, seules prévalent les déclarations des trois "victimes". La jeune femme est prise au piège dans les méandres de l'(in)justice mexicaine et clame son innocence : "Je suis innocente. [...] Un enfant de 12 ans comprendrait les anomalies, les mensonges, la farce qu'il y a derrière ce dossier". Elle fait appel.

Jamais sans ma fille. En France, un Comité de soutien est créé. Les parents de Florence épaulés par Jean-Luc Romero crient à l'injustice. De Lille à Paris, en passant par le Canada, leur appel au secours est entendu et soutenu : Nicolas Sarkozy les reçoit à l'Elysée, les parlementaires français réclament sa libération, Ingrid Bettancourt  lance un appel pour la libération de sa "sœur Florence", les plateaux télé leur donnent la parole, des rassemblements s'organisent à Lille, Orléans (où Florence Cassez est faite citoyenne d'honneur en 2010) et les personnalités (Alain Delon, Mélissa Theuriau ou Marion Cotillard)multiplient leur témoignage de soutien.

Retour de bâtons. En 2009, la Française obtient une réduction de peine. Les choses bougent, très doucement. Le transfert de la jeune femme dans une prison française est même évoqué par le président mexicain Felipe Calderon quelques jours avant la visite officiel de Nicolas Sarkozy. Les pourparlers commencés sous de bons auspices – le chef de l'Etat français et son homologue mexicain conviennent d'un groupe de travail juridique binational pour étudier ce transfert – se concluent par un rejet et un transfert vers une prison stricte et excentrée de la capitale. La cause ? Les aveux de David Orozco, membre de la bande des Zodiaques, accusant Florence Cassez d'être l'une des têtes pensantes du gang des kidnappeurs d'une part, et la crainte du Mexique que la jeune femme soit libérée.
France versus Mexique. Malentendus, consternation, les relations entre la France et le Mexique se glacent. Le 14 février 2011, le Mexique se retire de "l'Année du Mexique en France" après la décision de Nicolas Sarkozy de dédier l'événement à Florence Cassez. En France, l'avocat de la française, Franck berton contre attaque. Il porte plainte contre le ministre mexicain de la Sécurité, saisit la Cour internationale de justice avec le soutien de Nicolas Sarkozy et dépose un pourvoi en cassation. Rejeté encore.

Les maux de Florence. En mars 2011, la jeune femme dépose un recours en révision de son procès devant la cour Suprême du Mexique. C'est le début de la fin... de son calvaire avec la proposition un an plus tard, d'une libération immédiate et absolue, pour non-respect des droits durant l'instruction. Le nouveau rejet de cette proposition n'entachera pas la ténacité de la jeune femme qui clame son innocence à travers la chanson que lui dédie le groupe de rock français, La Jarry.
23 janvier 2013 : une femme libérée.
Après sept ans d'emprisonnement, la cour Suprême s'est prononcée en faveur d'une libération. Florence Cassez est libre.

"Florence Cassez de retour en France"