Les Iraniennes au stade : petite révolution ou grande avancée ?

A l'occasion de la Coupe du monde, les Iraniennes ont eu l'opportunité de pénétrer dans un stade de football pour suivre sur écran géant les matchs de leur pays. C'est une petite révolution dans ce pays ultra-conservateur où les femmes n'ont plus le droit, depuis 1981, de supporter leur équipe en direct des tribunes.

Les Iraniennes au stade : petite révolution ou grande avancée ?
© CHINE NOUVELLE/SIPA

Ils étaient des milliers à se presser aux abords du stade Azasi de Téhéran, lundi 25 juin, pour assister à la rencontre entre l'Iran et le Portugal sur grand écran. Et parmi ces supporters venus en masse pour encourager et soutenir leur équipe nationale, de nombreuses femmes étaient présentes. Le 20 juin, elles avaient déjà été des centaines à grimper dans les tribunes pour regarder l'affrontement entre leur pays et l'Espagne. Un événement pour ces Iraniennes, qui depuis 1981, ont l'interdiction de pénétrer dans n'importe quelle enceinte sportive. La raison avancée par le gouvernement ? L'utilisation par ces messieurs d'un langage grossier, complètement inapproprié pour la gent féminine.
Cette explication, qui prête fortement à sourire, n'a pas réussi à convaincre les citoyennes de ce pays du Golfe persique. Depuis plusieurs années, elles militent pour lever cette interdiction et n'hésitent pas à se rendre, au nez et à la barbe des autorités, à des matchs de foot. Nombreuses d'entre elles sont allées jusqu'à se déguiser en hommes pour berner les services de sécurité et encourager leur équipe fétiche. Des exploits partagés sur la Toile qui leur ont parfois coûté une arrestation et un placement en détention. 

Et après ? 

Cette ouverture des stades aux femmes est loin d'être officielle. Le régime a seulement donné son accord pour les matchs de l'équipe nationale dans le cadre du Mondial 2018. Selon un membre du Conseil national de la résistance iranienne, Afchine Alavi, ce semblant de révolution est la réaction d'un pouvoir en difficulté. Il a déclaré à L'Equipe : "Le régime a pris une décision un peu tactique afin de prouver à l'Occident qu'il lâche du lest, mais sans changer sur l'essentiel." Car après la Coupe du monde, rien ne dit si l'interdiction sera levée de manière pérenne. Malgré la décision de l'Arabie Saoudite d'ouvrir ses tribunes au public féminin en janvier et malgré la volonté du président iranien Hassan Rohani de faire des concessions, les conservateurs du pays n'approuvent pas ce projet.
La participation des femmes aux retransmissions du Mondial est certes une bouffée d'oxygène, mais ne constitue pas une avancée en matière de droits. Les Iraniennes se heurtent toujours à de nombreuses restrictions. Du port obligatoire du voile, contre lequel ont protesté de nombreuses femmes au début de l'année, à l'interdiction de chanter en solo, rien n'est encore gagné pour ces femmes, dont la liberté passe aussi par la possibilité de voir un match de foot en live.