Polanski aux César : suite au tollé, le réalisateur renonce à la présidence

Roman Polanski a renoncé à présider la 42e cérémonie des César, prévue le 24 février, a-t-il fait savoir par son avocat. Après l'annonce de sa nomination par l'Académie, la polémique avait grondé en raison de son passé. Le cinéaste est toujours poursuivi pour viol sur mineure.

Polanski aux César : suite au tollé, le réalisateur renonce à la présidence
© Gola/PRS/ENPOL/SIPA

[Mise à jour du 24/01/2017 à 9h40] Moins d'une semaine après l'annonce de sa présidence, Roman Polanski a annoncé par le biais de son avocat qu'il ne donnerait pas suite à l'invitation de l'Académie, bien qu'il trouve la polémique "injustifiée". Le cinéaste accusé de viol aux Etats-Unis ne présidera pas la 42e cérémonie des César. Aucune annonce n'a encore été faite quant à son remplaçant.

Son nom marque l'histoire du 7e art, mais suscite toujours un vent de révolte. Annoncé à la présidence des César le 18 janvier, Roman Polanski est devenu la bête noire des internautes, qui appellent au boycott de la cérémonie et du réalisateur de Tess. A travers le hashtag #boycottCesar, c'est toute une communauté qui s'indigne de l'honneur octroyé à un homme toujours accusé d'avoir commis un crime sexuel sur une mineure. Pour les féministes, le choix de l'Académie incarne une "culture de la légalité du viol".

Retour en 1977 : Roman Polanski s'impose comme l'un des plus grands réalisateurs de son époque avec son Rosemary's Baby. C'est au sommet de sa gloire que le cinéaste est accusé de viol par Samantha Geimer, âgée de 13 ans à l'époque. Lors d'une séance photos dans la maison de Jack Nicholson sur Mulholland Drive, Samantha Geimer aurait accepté un verre de champagne servi par Roman Polanski. Le cinéaste aurait alors abusé d'elle dans le jacuzzi après lui avoir donné un sédatif.  En apprenant cela, la mère de Samantha porte plainte.

42 jours de prison

Six chefs d'accusation sont retenus contre Roman Polanski, mais il ne plaide coupable que pour le fait le moins grave : "relation sexuelle illicite avec un mineur". Ainsi, le veuf de Sharon Tate avoue son acte, mais nie l'absence de consentement et passe 42 jours dans la prison de Chino, en Californie. Libéré sous caution avant l'annonce du verdict, il prend alors la fuite vers l'Europe.

Toujours en attente de jugement

Toujours en attente de jugement aux Etats-Unis, ce n'est qu'en 2009 que Roman Polanski est arrêté par les autorités suisses alors qu'il est attendu pour une rétrospective de sa carrière. Son extradition est demandée par les Etats-Unis à de multiples reprises. La Suisse rejette la demande quelques mois plus tard. Roman Polanski devient un fugitif aux yeux de l'UE. Après avoir fui les Etats-Unis pour échapper à la justice américaine, il fait l'objet d'une notice internationale d'Interpol et ne peut se réfugier qu'en France, en Suisse et en Pologne. Pays qui refuse encore aujourd'hui de l'extrader.

Des réactions mitigées

Suite à l'annonce de la présidence de Roman Polanski aux César, une pétition demandant sa destitution a été lancée le 19 janvier par une jeune artiste, Clémentine Vagne. Elle recueille déjà plus de 30 000 soutiens. D'autres militantes féministes telles que Caroline De Haas critiquent l'impunité du réalisateur.
Le choix des César est "une insulte aux victimes de viol" pour beaucoup... mais pas pour le milieu du cinéma. Le silence du directeur de l'Académie, Alain Terzian, fait écho à celui d'autres célébrités, qui ne mâchent pourtant pas leurs mots en cas de scandale.

"On ne peut pas à chaque fois relancer cette affaire"

Aurélie Filippetti a pris la parole face à cette polémique qui, selon elle, n'a pas lieu d'exister. L'ancienne ministre de la Culture a tenu à contextualiser les faits à sa manière : "C'est un très grand réalisateur. C'est quelque chose qui s'est passé il y a 40 ans. On ne peut pas à chaque fois relancer cette affaire parce qu'il y a quand même à un moment donné un problème : à chaque fois qu'on va parler de Roman Polanski, on va parler de cette affaire, on va relancer la polémique."

Une polémique qui sert d'amer rappel au fait qu'agressions, harcèlements sexuels et viols sont des réalités auxquelles même le 7e art ne peut échapper.
En 2010 l'acteur Casey Affleck, frère de Ben Affleck, est mis en cause pour harcèlement sexuel par deux de ses collaboratrices, avant que les victimes ne retirent leurs plaintes suite à un accord avec l'intéressé. Quelques années plus tôt, Woody Allen était accusé par sa fille adoptive Dylan Farrow d'abus sexuel... sans être jamais inquiété.