Trump président, homophobie au tournant ?

Durant sa campagne, Donald Trump a tapé sur tout le monde, des femmes aux latinos en passant par les musulmans. La communauté LGBT a elle été (relativement) "épargnée". Plus pour longtemps.

Trump président, homophobie au tournant ?
© Pacific Press/SIPA

Quand un pays porte à sa tête un homme ayant mené une campagne anti-immigration, raciste, islamophobe, pro-armes à feu, pro-life et teintée de déclarations sexistes et misogynes, on peut s'interroger: quel sera l'avenir de ces communautés et populations stigmatisées ? Le discours de Trump a (ré)ouvert la voie à une vague de déclarations et de commentaires nauséabonds aux Etats-Unis. Depuis l'élection américaine le 8 novembre dernier, la communauté LGBT est dans le flou : le président en devenir ne s'était jamais exprimé clairement sur les nombreux sujets relatifs aux droits des homosexuel(le)s et transsexuel(le)s. Mais la campagne populiste de Trump n'a pas laissé de doutes quant au caractère peu radieux des droits des LGBT américains. Et si le milliardaire s'est gardé de déclarations choc sur cette communauté, ses choix parlent pour lui.

Mike Pence, le pro-anti

Ultra-conservateur, Mike Pence, le vice président en devenir des Etats-Unis – amené à diriger le pays en cas de mort, de démission, d'incapacité ou de mise en accusation du président – a l'esprit étriqué la dent dure contre les minorités, le progrès... et les LGBT. Rappelons qu'il est pour le financement public de centres de conversion des homosexuel(le)s, qu'il a mis en place le Religious Freedom Restoration Act dans l'Indiana qui rend illégal d'entraver substantiellement la liberté religieuse d'un individu (traduction : au nom de ses croyances religieuses un commerçant peut refuser de servir une personne homosexuelle, par exemple), qu'il est contre le planning familial et contre l'avortement et qu'il s'est opposé à la directive Obama permettant aux étudiants d'école publique d'utiliser les toilettes selon leur genre identitaire et non leur genre de naissance. Une liste, non exhaustive, des causes réac' chères à l'actuel gouverneur de l'Indiana que Donald Trump a mis en première ligne de son gouvernement. Les prises de positions radicales de Pence laissent entrevoir le pire pour la communauté LGBT et un arrêt net dans la course aux droits et à la protection sociale des trans et des homos acquis pendant les années Obama.  

"On a un nouveau président sale pédé."

Passé les premières heures de dégoût et de colère, les Américains – ceux qui n'ont pas voté Trump - sont descendus dans la rue. Regroupés par milliers avec des drapeaux arc-en-ciel sous la Trump Tower à Manhattan, scandant des "Not my President" en Ohio ou se tenant par la main autour du lac Merritt en Californie, ces Américains désavouent le choix de leur pays et le discours clivant de Trump. Sur le Web, la contestation se fait entendre avec notamment une pétition demandant aux grands électeurs de faire d'Hillary Clinton la Présidente des Etats-Unis (techniquement, le système électoral permettrait aux grand électeurs de choisir d'élire Clinton), déjà signée par plus de 4,3 millions d'internautes. "N'ayez pas peur. Nous allons rétablir notre pays"  leur lançait Donald Trump, le 13 novembre lors de sa première interview télévisée, dans l'émission 60 Minutes. Pourtant, depuis son élection, 5 jours auparavant, les actes de violences physiques et verbales se sont multipliés sur le territoire selon des associations américaines. Plusieurs suicides de personnes trans ont eu lieu aux Etats-Unis selon le journaliste Zach Stafford (citant le porte-parole des parents dont les enfants se sont suicidés), les hotlines de permanences téléphoniques pour les personnes trans connaissent une très nette augmentation d'appels, de nombreuses intimidations envers des homosexuel(le)s sont relevées par des médias américains jusqu'à l'agression physique d'un jeune homme gay à Santa Monica, battu par un groupe de supporters de Trump qui lui a lancé : "On a un nouveau président sale pédé."

Mariage gay & Obamacare

Vers l'apaisement ? Pas vraiment. Certes, lors de l'interview, Donald Trump a condamné les actes de violences à l'égard des minorités, déclarant : "Je suis si triste d'entendre cela et je le dis : arrêtez cela. Si cela peut aider, je le dis et je le dis face à la caméra : arrêtez cela." Dans sa volonté de tempérance, déjà visible lors de son premier discours suite aux résultats de l'élection, il s'est aussi exprimé sur le mariage homosexuel en expliquant qu'il ne serait pas remis en cause. Sur l'Obamacare, permettant une meilleure protection de santé aux Américains, Trump a révisé ses propos, passant de la promesse d'une abrogation de la loi durant sa campagne à un simple amendement. Mais cette loi sur la protection des patients et des soins abordables a, notamment, apporté des améliorations pour les personnes trans et œuvre pour la sensibilisation au virus du Sida, qui touche dramatiquement la communauté LGBT. Quid des quatre années à venir avec le Président Trump et son premier ministre qui avait fait fermer le planning familial de Scott County dans l'Indiana (augmentant les cas de VIH détectés) et a déclaré que les préservatifs n'étaient pas effectifs dans la lutte contre les MST ? Toujours dans cette même interview, qui dessine les contours de ce que sera le gouvernement Trump, le futur Président a fait savoir qu'il nommerait à la Cour Suprême des juges pro-life (et donc anti-avortement) et favorables au port d'armes à feu. Des conservateurs dont on peut craindre un manque de soutien en faveur des LGBT et notamment des droits des personnes transsexuelles

Après la bienveillance à son égard durant les années obamiennes, la communauté LGBT s'apprête à vivre un mandat sous la présidence de Donald Trump... A moins que les grands électeurs renversent le vote et élisent Hillary Clinton, comme le demande la pétition ; une première dans l'histoire des Etats-Unis, et dans les faits presque impossible. Mais ne disait-on pas cela de la victoire de Trump ? 

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