En direct de La Croisette: 5 questions à... Augustin Trapenard

Figure incontournable de Canal+, Augustin Trapenard est la nouvelle caution littéraire et cinéma de la chaine cryptée. A Cannes, où il a délocalisé son émission Boomerang (diffusée chaque matin sur France inter à 9h10) dans un studio du Palais des festivals, le dandy anime aussi chaque jour à 20h07 précises, le Petit Cercle, une version courte et quotidienne de l'émission cinéma de Canal. Nous l'avons rencontré, sous le soleil...

En direct de La Croisette: 5 questions à... Augustin Trapenard
© Augustin Trapenard

Depuis 5 ans de couverture cannoise, que retenez vous du Festival ?
Augustin Trapenard : A titre personnel, Cannes fut un baptême du feu cinématographie. Lorsque j'y suis venu pour la première fois pour le Grand Journal, je m'étais jusqu'alors cantonné à la littérature et ce plongeon dans le festival fut une révélation pour moi. Par la suite, on m'a confié la présentation de Boomerang sur France Inter et il m'a fallu m'ouvrir à d'autres formes de culture. En recevant à mon micro des figures telles que Martin Scorsese, Tim Burton ou encore Quentin Tarantino, ma cinéphilie a encore grandit. Aujourd'hui je vis le festival comme un moment intense qui concentre les meilleurs films de l'année en une dizaine de jours.

Comment décrire le festival de Cannes ?
Augustin Trapenard : C'est d'abord un lieu de travail extraordinaire. Moi qui croyais que Cannes se résumait aux paillettes et aux montées de marche, je me mettais le doigt dans l'œil. Il y a tellement de films à voir que c'en est même parfois frustrant. Et puis Cannes, c'est surtout un festival qui s'est régulièrement engagé au fil de son histoire. A l'image de la polémique Netflix qui divise la Croisette cette année. A titre personnel, je me suis toujours engagé pour les librairies indépendantes, et de la même façon je défendrai toujours l'aspect théâtral du cinéma, le plaisir de voir un film en salle et cet incomparable sentiment de communion. Ça ne m'empêche pas pour autant d'être abonné à Netflix, et à Canal +, et d'avoir le plaisir de visionner des films chez moi. Mais je crois que Cannes doit rester un bastion qui résiste à l'abandon progressif de la salle de cinéma. Enfin, Cannes c'est surtout l'excellence des sélections, de la compétition officielle à la Quinzaine des réalisateurs en passant par la semaine de la Critique.

A quoi ressemble une journée cannoise typique pour vous ?
Augustin Trapenard : Je me lève de très bonne heure pour préparer mon billet du matin pour France Inter, puis je travaille un peu avant d'aller enregistrer Le Petit Cercle au Patio Canal le midi. Après c'est cinéma, cinéma, cinéma, j'enchaine le plus de projections possibles, le plus souvent jusque minuit. Ensuite il me reste à écrire mon interview du lendemain et recommencer ainsi pendant 10 jours. A ce rythme là, je n'ai même pas le temps de sortir, ce que je regrette âprement, croyez-moi !

Quelle place pour les femmes au Festival ?
Augustin Trapenard : Elle a beaucoup évolué et c'est heureux. Si Cannes a longtemps été indissociable de l'égérie, entre ses maitresses de cérémonie et ses actrices, le festival fait cette année une belle place aux plus grandes réalisatrices. Dans la compétition officielle d'abord où concourent Linn Ramsey, dont j'avais adoré le film précédent (We need to talk about Kevin), Sofia Coppola qui s'est révélée à Cannes, ou encore Naomi Kawase dont le cinéma poétique m'a encore fait pleurer 10 bonnes minutes. Mais dans les sections parallèles aussi, avec le film de Claire Denis, et surtout le grand retour d'Agnès Varda qui pour moi est central car j'ai été élevé avec ses films. Cléo de 5 à 7 reste pour moi l'un des plus grands films français, et témoigne de la féminité de la nouvelle vague. Il prouve que l'histoire du cinéma hexagonal verse aussi du coté des femmes, du féminin et du féminisme. La présence d'Agnès est quelque chose qui devrait tous nous rendre extrêmement fiers, et son film Visages Villages (réalisé avec l'artiste JR) se termine par un émouvant hommage à Godard. L'une des plus belles scènes de cinéma que j'ai pu voir cette année.

Quelle est votre actrice fétiche ?
Augustin Trapenard : Sans hésitation Julianne Moore. Même si j'avais adoré Carol, pour moi un grand film de Todd Haynes compte forcément Julianne Moore à son casting. Et cette année, je suis d'autant plus comblé que dans Wonderstruck, elle incarne une actrice, c'est à dire qu'elle est elle-même toutes les actrices. Le plan où elle marche au milieu d'une maquette de Manhattan justifie la raison pour laquelle je crois encore au cinéma.