Elizabeth II, fidèle à elle-même après 60 ans de règne

Le Times a fait sa Une du "règne extraordinaire" d'une reine au faîte de sa popularité. Le Financial Times a titré "60 ans et quasiment pas de faux-pas". Le tabloïd Daily Mirror l'a dépeinte en "mère de la Nation", comme "un roc de dignité et de sagesse". Une avalanche de télégrammes de félicitations a aussi marqué l'occasion. Le locataire du 10, Downing Street a souligné "sa dignité et autorité sereine" et l'archevêque de Cantorbéry à quel point elle était "une source d'inspiration". La reine d'Angleterre célébrait hier son jubilé de diamant, un événement qu'elle a confiné à l'intime (du moins jusqu'à la traditionnelle parade Trooping the Colour), préférant sacrifier à deux de ces engagements cérémoniels qui font son quotidien : la visite de la mairie de la bourgade moyenâgeuse de King's Lynn et d'une maternelle voisine, dans le comté de Norfolk. Comme à l'accoutumée, si l'on excepte les photographes et caméras de télévision en nombre, elle a été accueillie par le triple hourra d'une centaine de badauds, et a reçu son lot habituel de bouquets. La veille, un petit garçon lui avait offert son paquet de bonbons, à la sortie de la messe.

Un anniversaire en catimini

Trois raisons ont été avancées par l'entourage royal pour expliquer cette sobriété. La première est que le 6 février marque aussi la disparition de son père George VI, mort à 56 ans dans son sommeil, alors qu'elle effectuait un séjour au Kenya. Elle illustre aussi le souci de frugalité du palais de Buckingham qui a réduit son train de vie en ces temps d'austérité. Elle s'explique enfin par le fait que l'essentiel des célébrations qui iront crescendo sur cinq mois culmineront aux beaux jours, en juin. Le clou des réjouissances sera une parade navale sur la Tamise (on parle d'une flottille de mille bateaux), sans précédent depuis le règne de Charles II, il y a trois siècles.

Pas d'abdication en vue

La leçon du jour cependant est que la reine n'a pas l'intention de céder la place à son fils aîné le prince Charles, 63 ans, ou à son petit-fils William, deuxième dans l'ordre de succession. Lilibet fait toujours l'unanimité chez les Britanniques. Arrière grand-mère (depuis fin 2010, d'une petit Savannah), la queen continue d'assurer réceptions et déplacement officiels à un rythme effréné. Le temps, ne semble atteindre ni sa vaillance, ni son entrain, sa santé. De constitution solide, la souveraine n'a en effet quasiment jamais manqué à ses obligations.

Entre passion et désaffection

Pourtant, depuis son accession à la tête du Commonwealth, le 6 février 1952, la reine a traversé des phases de tumulte qui ont sapé son prestige et sa cote auprès de ses sujets. De Winston Churchill à David Cameron, elle a connu douze Premiers ministres différents, mais aussi douze présidents américains et six papes et assisté à des transformations radicales du Royaume-Uni. Mais elle a dû aussi surmonter les épreuves tandis que les unions de trois de ses enfants s'achevaient par des divorces houleux, nuisant durablement à l'image de la famille royale placée sous le regard constant des médias en quête de scandales. La mort de la princesse Diana, dans un accident de voiture à Paris en 1997, a semblé ouvrir un fossé entre la reine et les Britanniques, qui ne comprenaient pas son absence apparente d'émotion alors qu'une rare ferveur populaire entourait le souvenir de la princesse. Beaucoup accusèrent alors la reine d'avoir isolé Diana de la famille royale en raison de son divorce avec le prince Charles, héritier du trône.

Mais la royauté connaît un regain de popularité depuis le mariage, en avril dernier, du petit-fils de Sa Majesté et de Kate Middleton. Les problèmes de santé de son mari, le prince Philip, opéré du cœur  à Noël dernier, ont également rapproché la monarque de ses sujets.