Gosia Baczyńska pour son défilé automne-hiver 2015: la styliste nous dit tout

Nous avons rencontré Gosia Baczyńska la veille de son défilé prêt-à-porter automne-hiver 2015-2016. La styliste polonaise nous a parlé des inspirations de sa dernière collection, de l'ambiance du défilé, de la Pologne, et de Paris. Entretien.

Gosia Baczyńska pour son défilé automne-hiver 2015: la styliste nous dit tout
© Imaxtree.com

La styliste polonaise nous a reçu ce mercredi 4 mars 2015 dans la résidence de l'Ambassadeur de Pologne. Dans cette luxueuse demeure aux murs dorés, le show du lendemain soir était encore en préparation à une heure plutôt tardive, dans une atmosphère mêlant adrénaline, fatigue et émotion. Gosia Baczyńska défile à la Fashion Week de Paris depuis quatre ans, mais sa maison existe depuis dix-huit ans. Représenter la Pologne dans la capitale française est un honneur, mais aussi une lourde responsabilité à porter, aux yeux de la créatrice.


La vision de la mode est-elle différente en France et en Pologne ?
Bien que la France et la Pologne soient deux pays européens, leur expériences culturelles respectives font que leurs visions de la mode sont forcément différentes. Je viens à la Fashion Week de Paris depuis quatre ans et le fait d’être confrontée à cette extraordinaire scène de la mode internationale, et en même temps au monde polonais, a fait évoluer ma propre vision de la mode. 

Comment est la Polonaise typique, par rapport à la Parisienne ?
C’est une question difficile. La Parisienne est la quintessence du chic naturel. Elle a un côté sobre et en même temps extrêmement élégant. C’est quelque chose d’évident pour nous. Son style n’est jamais exagéré, tout est dans la nuance, tout est fin et jamais too-much. On disait un peu la même chose des Polonaises, avant d’être sous ce régime communiste où tout a été détruit, notamment la beauté dans tous les sens du terme. La vraie question est alors "Comment est la polonaise d’aujourd’hui ?" Elle a changé. Ce manque d’accès aux mondes de la mode et de la beauté en général pendant une pèriode a fait d’elle une femme beaucoup plus curieuse, peut-être moins classique et surtout envieuse de nouveauté.

Ressemble-t-elle à la Parisienne ?
Absolument. Elles ont beaucoup de points communs. Peut-être que la Polonaise s’habille plus pour le soir, parce que c’est encore dans les traditions. Tandis que la Parisienne se débrouille merveilleusement bien avec une paire de boucles d’oreilles et des talons aiguilles qu’elle a au fond de son sac, et elle sort comme ça. La Polonaise a encore cette envie de se changer pour sortir et enfiler une jolie tenue. Finalement, c’est exactement ce que je vis en tant que créatrice. Il y a une sorte de lutte intérieure entre ce minimalisme et quelque chose de plus élaboré. J’aime les silhouettes et les lignes pures, mais je ne suis pas minimaliste en tant que créatrice. Ce que je veux dire, c’est que la nouvelle Polonaise est proche de la Parisienne, et l’entre deux, c’est ma lutte artistique.

La musique est un élément clé de vos défilés. Qu’est-ce qu’elle apporte en plus ?
La musique a un rôle très important parce qu’elle créé l’ambiance. Je raconte toujours des histoires dans mes collections, et la musique aide à la raconter et installer une atmosphère autour de celle-ci. La musique fait vraiment partie de la préparation, de la création. Je peux vous avouer que je ne connais pas encore la musique du défilé de demain. Ce sera une surprise pour moi aussi. Elle sera jouée en live à la batterie par un grand musicien et DJ polonais, Smolik, qui va improviser. L’idée m’est venue après avoir vu le film Birdman.

Si c’est une improvisation, y aura-t-il un rapport avec la collection ?
Ce compositeur connait très bien la collection et son histoire. Nous en avons parlé tous les deux, des créations, des inspirations, de l’ambiance. Alors la musique sera improvisée mais déjà préparée et inspirée. Et comme toute improvisation, elle sera en interaction avec ce qu’il se passera sur le catwalk. C’est une expérience, et je suis heureuse qu’il vienne ici spécialement pour cette occasion. Le lendemain, il repartira très tôt avec la batterie à l’autre bout de la Pologne parce qu’il a un concert.

Quelles sont vos inspirations pour cette saison ?
L’histoire commence par la découverte d’un selfie pris en 1909 - sûrement un des premiers selfies - d’un jeune new-yorkais extrêmement beau. Il m’est alors venu cette pensée utopique que la technologie amenait à l’éternité. On retrouvera d’ailleurs le visage de ce jeune homme comme motif de la collection. La seconde inspiration est le film muet Frankenstein réalisé par James Walsh au romantisme tragique. C’est ce contraste entre la jeunesse éternelle et la recherche de beauté éternelle de Frankenstein qui se rencontrent dans mes créations. A ces deux notions, un esprit Art déco et le New York des années 20 se sont ajoutés indirectement, parce que j’affectionne particulièrement ces deux périodes. C’est encore très émotionnel, vous le comprendrez mieux pendant le défilé.

Gosia Baczyńska © Imaxtree.com