Pourquoi l'enfant devient turbulent Leur prise en charge

Comment ces enfants sont-ils pris en charge ?

D'une manière générale en France, ces enfants restent exposés très longtemps à ces traumatismes. La protection de l'enfance dans notre pays en est restée à l'âge de pierre. Il est difficile de faire bouger ce dispositif. On commence souvent trop tard, quand l'enfant est suffisamment fort pour faire très mal. Il faudrait mettre en place une aide à la parentalité très intensive, soit si ça ne marche pas, séparer ces enfants de leurs parents rapidement.

'la protection de l'enfance dans notre pays en est restée à l'âge de pierre'
"La protection de l'enfance dans notre pays en est restée à l'âge de pierre" © Le Journal des Femmes / Cécile Debise

Et à l'étranger, comment fait-on ?

L'exemple du Québec est intéressant. Là-bas, on intervient avant l'âge de deux ans. Après cet âge, les troubles sont irréversibles. On ne place pas plus d'enfants qu'en France mais on les place avant que leur violence soit fixée. Plus tard, la prise en charge est très lourde. Il faut des équipes spécialisées, c'est coûteux. Par exemple, dans mon livre, le cas de Joël a nécessité 582 000 euros pour le traitement et le résultat reste aléatoire. Notre absence de politique de prévention nous coûte extrêmement chère. La difficulté, c'est qu'il faut d'abord empêcher ces enfants d'être violents pour qu'ils commencent à penser. Tant qu'on les laisse agir, on ne peut rien faire. Il faut parfois se battre avec eux, les isoler des autres enfants quand ils sont dangereux, être des adultes très contenant et en même temps toujours écouter très attentivement ce qu'ils ont à dire, une fois calmés.

Comment faites-vous pour soigner ces enfants ?

Ce qui est compliqué avec les enfants barbares, c'est qu'après les traumatismes qu'ils ont subis, ils redoutent toute relation. Ils commencent par refuser notre aide et sont très méfiants. Nous les recevons à l'hôpital, cinq fois par semaine ou à temps complet, souvent pendant plusieurs années. Et nous nouons une relation signifiante pour eux. Une psychothérapie une fois par semaine est souvent insuffisante. Ensuite, à travers les jeux qu'ils vont faire, nous allons nommer ce qu'ils peuvent ressentir et pour la première fois, leur désespoir et leur angoisse seront partagés. Les enfants ont vécu leur traumatisme dans la solitude la plus totale. Petit à petit, en partageant leurs sentiments, ils vont pouvoir passer de l'absence d'espoir au chagrin puisqu'il y aura un adulte pour reconnaître ce qu'ils ressentent.

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