Homoparentalité : au coeur du débat ... et ceux qui sont "pour"


Que pensez-vous de l'ouverture de l'adoption aux couples homosexuels ?

 "Je suis d'accord et pour mille raisons ; d'abord, je comprends mal que l'on autorise l'adoption monoparentale et non homoparentale, et qu'il suffise de ne pas dire que l'on est homosexuel pour pouvoir adopter. C'est une position quasi homophobe car on cache sa façon d'être au monde... Je suis plus inquiet de l'adoption par une famille monoparentale et par les mères isolées dans une relation duelle avec leur enfant que par l'adoption d'un couple homoparental. 

Deuxième raison : j'ai souvent officié comme expert auprès d'enfants issus de couples dont un des parents est devenu homosexuel après sa vie en couple hétérosexuel. La question était de savoir si ce parent avait un droit de visite : d'expérience, les enfants n'ont jamais été hostiles vis-à-vis de ces parents !

le pr marcel rufo
Le Pr Marcel Rufo © Marcel Rufo

Les enfants ayant deux parents du même sexe présentent du reste les mêmes troubles que ceux que l'on observe chez les enfants issus de familles classiques : désaffection de l'école, trouble de la conduite ou encore addiction... Je n'ai vu aucune différence !

Troisièmement, dans un pays d'égalité des droits, le PACS devrait permettre de bénéficier des mêmes droits à fonder une famille. Hors légalement un PACS ne suffit pas au niveau juridique. Et si je me reporte au nombre d'enfants élevés par des couples homosexuels, ils sont légion !" 

Un enfant a-t-il besoin d'un père et d'une mère ?

Le statut du pater familial s'est délité, et c'est tant mieux. Il y a plus d'égalités entre les sexes. Je trouve alors curieux l'argument de mes confrères psychanalystes selon lequel il faut un père et une mère, comme si tous deux vivaient sur une île déserte, sans tante, sans grand-père, ni cousins... Le père et la mère sont une mosaïque, il y a une multitudes de figures maternelles et paternelles qui viennent d'ailleurs. De plus, je n'ai pas vu de singularité dans les familles homoparentales, elles ont les mêmes difficultés que les autres familles. Je suis contre la stigmatisation d'une population sous le prétexte qu'elle a une sexualité différente.

... Et la PMA, qu'en pensez-vous ?

 Mon point faible sur la question est que, si je suis favorable au don de sperme pour les lesbiennes, je suis opposé à la gestation pour autrui pour les hommes : il se crée des liens importants pendant une grossesse, entre le foetus et la mère. S'il ne connaît pas sa mère ensuite, c'est un peu comme un abandon intra-utérin, à mon sens. Je pense que les hommes devraient considérer qu'ils sont stériles, et avoir recours à l'adoption pour fonder une famille. Par contre, je suis tout à fait favorable à la co-parentalité : dans ce cas l'enfant n'a pas un père et une mère, mais deux pères et deux mères, ce qui est encore mieux !

Plus largement, je souhaiterais que lorsque les parents signent l'adoption, la famille, les cousins, les grands-parents la signent également. Et mon rêve, ce serait que les familles homoparentales adoptent de grands enfants, de 9 ou 10 ans, et que ces enfants puissent signer également l'adoption en acceptant d'être enfant d'une famille homoparentale, de façon à donner eux-mêmes une leçon à la société. Enfin, c'est au suivi des enfants adoptés qu'il faut penser, qu'ils le soient par des familles homoparentales ou non : 30 % des enfants adoptés ont des troubles cognitifs. Il faudrait suivre leur évolution en ce sens, d'abord tout petits, puis enfants et adolescents.

elever son enfant
Elever son enfant © Hachette Santé

 A lire : Elever son enfant de 0 à 6 ans, Ed. 2012, Pr Marcel Rufo, Editions Hachette Santé



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