Médicaments grossesse : lesquels prendre ou éviter enceinte ?

Quels sont les médicaments interdits pendant la grossesse, comment se soigner lorsqu'on est malade ? Le point sur les recommandations pour les futures mamans.

Médicaments grossesse : lesquels prendre ou éviter enceinte ?
© Dmitrii Shironosov-123rf

"Enceinte, les médicaments, c'est pas n'importe comment !"

[Mise à jour du 30 juin 2022]. Un an après sa campagne d'information sur les risques liés aux médicaments pendant la grossesse, l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) rappelle de nouveau aux futures mamans ou celles qui allaitent que "les médicaments, c'est pas n'importe comment". Cette campagne vise à à inciter les femmes à discuter au préalable avec leur professionnel de santé et à transmettre les 4 bons réflexes à avoir :

  • Anticiper sa grossesse avec son médecin ou sa sage-femme
  • Ne pas faire d'automédication
  • Ne pas arrêter seule un traitement
  • Toujours informer de sa grossesse les professionnels de santé consultés.

"Certains médicaments, même parmi les plus courants, peuvent comporter des risques pour l'enfant à naître". C'est par exemple le cas des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) comme l'ibuprofène ou l'aspirine qui ne doivent jamais être pris après le 5e mois de grossesseIl est recommandé de toujours demander conseil à un professionnel de santé avant de prendre un médicament, y compris ceux sans ordonnance, ou issus d'une ancienne prescription, ainsi que ceux à base de plantes ou d'huiles essentielles. L'ANSM rappelle par ailleurs qu'une femme enceinte ne doit pas décider seule de mettre fin à un traitement ou de modifier les doses prescrites. "Elle pourrait perdre les bénéfices de son traitement ou voir réapparaitre ses symptômes, ce qui est susceptible de mettre en danger sa santé comme celle de son bébé" précise l'Agence du médicament. Enfin, si vous prenez un traitement chronique et que vous découvrez votre grossesse pendant le traitement, il est recommandé d'en informer votre médecin dès que possible. "C'est lui qui évaluera l'opportunité de poursuivre, de modifier ou d'arrêter le traitement".

Quels sont les médicaments interdits aux femmes enceintes ?

Pendant la grossesse, les futures mamans ont parfois du mal à se soigner puisque de nombreux médicaments sont déconseillés. "Pendant la grossesse, il faut à tout prix éviter l'auto-médication" nous précise le Professeur Philippe Deruelle, gynécologue obstétricien. Et ce, même si ces médicaments vous ont déjà été prescrits par le passé et même s'il s'agit de médicaments en vente libre. "Énormément de médicaments sont déconseillés voire contre-indiqués chez la femme enceinte. On peut notamment citer les anti-inflammatoires, les traitements contre l'acné comme le Roaccutane®, les antiépileptiques, les hypertenseurs ou les immunosupresseurs. La vigilance est également de mise avec les psychotropes " poursuit le praticien. Selon le site du CRAT (Centre de référence sur les agents tératogènes), "une quinzaine de substances sont tératogènes chez l'humain (en dehors des antimitotiques), et une quarantaine sont fœtotoxiques, ce qui représente environ 10% des spécialités sur le marché". 

  • Aspirine et grossesse. Certains médicaments que l'on prend couramment sont strictement contre-indiqués pendant la grossesse. C'est notamment le cas de l'aspirine, fortement déconseillée pendant la grossesse car elle favorise les saignements et peut entraîner des malformations cardiaques du fœtus. Il est conseillé de la remplacer par un antalgique, comme le paracétamol.
  • Les anti-inflammatoires sont totalement interdits. Le risque est moindre au premier trimestre de la grossesse, mais ils sont totalement proscrits à la fin du second trimestre. "Cette interdiction concerne aussi bien les comprimés que les pommades", précise le Docteur Deruelle. "Il n'existe pas de médicament autorisé avec le même effet, ajoute le praticien, mais le médecin pourra prescrire un antalgique de type paracétamol ou un anti-douleur de classe 2 contenant un dérivé morphinique comme le Tramadol, à utiliser avec précaution."
  • Antileptiques et grossesse : L'ANSM alerte les futures mamans et les professionnels de santé concernant les médicaments à base de topiramate, de prégabaline et de valproate, utilisés tous les trois dans le traitement de l'épilepsie. Des études mettent en évidence des risques de malformations du foetus, de troubles autistiques et neurodéveloppementaux.
  • Les médicaments à base de modafinil (Modiodal® et ses génériques), ne doivent plus être utilisés pendant la grossesse ou chez les femmes en âge de procréer, sans contraception efficace, a précisé l'ANSM en juin 2019. En cause : "l'utilisation du modafinil pendant la grossesse est suspectée être à l'origine de malformations congénitales", précise l'Agence nationale de sécurité du médicament.
  • Le Gylénia, prescrit pour les femmes qui souffrent de sclérose en plaques, ne convient pas aux femmes enceintes. Le traitement doit donc être interrompu pendant la grossesse, recommande l'Agence européenne du médicament, en raison des risques de malformations congénitales.
  • L'ANSM prévient également les futures mamans, les femmes allaitantes ou en âge de procréer de ne plus utiliser le médicament Mycophénolate (indiqué en cas de rejet de greffe d'organes), en raison des risques de fausses couches et de malformations congénitales.
  • Isotrétinoïne et grossesse. Dans un communiqué du 18 février 2021, l'ANSM avertit les femmes enceintes des risques pendant la grossesse de l'isotrétinoïne, traitement utilisé pour soigner les acnés sévères. Risques de malformations, troubles neuro-développementaux et troubles autistiques... Les femmes doivent donc arrêter leur traitement si elles attendent un enfant.

Conseils et actualités sur les médicaments pendant la grossesse :

Médicament pendant la grossesse : quels sont les risques ?

Lorsqu'une femme enceinte prend un médicament, celui-ci peut être transmis au fœtus par l'intermédiaire du placenta. Il faut savoir que le risque diffère en fonction du stade de la grossesse et que certains médicaments peuvent être contre-indiqués en début de grossesse et présenter moins de danger au troisième trimestre, et inversement. 

  • Au premier trimestre de la grossesse : Au stade de l’embryogenèse, le risque est avant tout malformatif. L'embryon est en plein développement et certaines molécules peuvent provoquer des malformations. En effet, de la conception à la 10e semaine de grossesse environ, les organes se développent (à un stade débutant), et des fausses couches sont possibles. C'est une réaction naturelle : le corps de la femme comprend qu'en cas de malformation, l'embryon ne sera pas viable. Du coup, pendant cette période, la prise de médicaments est critique.
  • Au deuxième trimestre et au troisième trimestre : Le risque est d'ordre fonctionnel. Le médicament peut avoir des conséquences sur la croissance du fœtus, mais aussi le fonctionnement et la maturation des organes (faible poids à la naissance, atteintes rénales, etc). Dans les cas les plus graves, cela peut entraîner un avortement spontané, une fausse couche, un accouchement prématuré ou encore une mort fœtale in-utero.

Diabète, épilepsie, dépression : comment faire pendant la grossesse ?

  • Antidiabétiques et grossesse. Certaines femmes suivent un traitement au long cours avant leur grossesse et doivent le poursuivre même si elles sont enceintes. Il est important d'évoquer le projet de grossesse avec le médecin et d'étudier avec lui les différentes alternatives thérapeutiques. "Une femme qui prenait des antidiabétiques oraux sera la plupart du temps mise sous insuline pendant la grossesse, car il est plus facile d'en modifier les doses" explique le médecin.
  • Les traitements anti-épileptiques font également l'objet d'une attention particulière, d'autant plus depuis le scandale de l'anti-convulsivant Dépakine. Ce médicament à base de valproate de sodium, dont les effets tératogènes sont bien connus, a longtemps été prescrit à des femmes enceintes, avec des conséquences dramatiques. "On peut envisager un arrêt du traitement en accord avec le neurologue ou un changement du médicament pour un autre" précise le Docteur Deruelle. Par ailleurs, l'Agence du médicament a récemment annoncé que cinq traitements contre l'épilepsie (le topiramate : Epitomax® et ses génériques, le phénobarbital (Gardénal®), la primidone (Mysoline®), la carbamazépine (Tégrétol®) et la (fos) phénytoïne (Prodilantin®) pouvaient causer des malformations congénitales et des troubles du développement chez le nouveau-né. Dans un avis du 29 juin 2022, l'ANSM alerte également contre les médicaments à base de topiramate, de prégabaline et de valproate, utilisés tous les trois dans le traitement de l'épilepsie. 
  • Concernant la prise d'antidépresseurs pendant la grossesse, le médecin se veut mesuré. "Si on entend régulièrement qu'ils pourraient accroître le risque de diabète, d'autisme ou d'obésité, les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine auraient notamment une incidence réelle sur le développement neurocomportemental du bébéles études sont contradictoires", détaille le praticien. En cas de pathologie psychiatrique lourde, il est primordial que la femme enceinte évoque son désir de grossesse avec son psychiatre. Dans tous les cas, il faudra réévaluer le traitement et déterminer la nécessité de poursuivre la prise en charge médicamenteuse. Si elle s'avère utile, on prescrira le traitement minimal efficace.

Le pictogramme "Femme enceinte" sur les boites de médicaments

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Les médicaments tératogènes ou fœtotoxiques sont signalés depuis le décret du 17 octobre 2017 par un pictogramme représentant une femme enceinte sur le conditionnement extérieur du médicament. Il existe deux signalétiques. Un médicament interdit est signalé par un un panneau rond, un médicament dangereux est signalé par un panneau triangulaire. 

 

Médicaments pendant la grossesse : que faire en cas de doute ?

Avant de prendre un médicament pendant la grossesse, il faut s'assurer que celui-ci est sans danger. Comme l'explique le Pr Deruelle, "n'importe quel professionnel de santé est en capacité d'aller chercher l'information et de consulter le site du CRAT afin de fournir à la patiente une réponse claire". Il est également possible de consulter le centre de pharmacovigilance de sa région qui donne des infos à date très précises, notamment sur les nouveaux médicaments. Pour consulter la liste mise à jour des médicaments dangereux pendant la grossesse, consultez le site du CRAT

Merci au Professeur Philippe Deruelle, gynécologue obstétricien et au Docteur Elisabeth Paganelli, gynécologue médicale et secrétaire au SYNGOF
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