Quels sont les signes d'une dépression post-partum ?

Dans les semaines qui suivent l'accouchement, une jeune maman peut souffrir de dépression post-partum et d'anxiété. En France, cela concernerait 16,7 % des mères à deux mois post-partum. Signes, durée, différence avec un baby blues, traitement... Éclairage avec le Dr Jacques Dayan, psychiatre.

Quels sont les signes d'une dépression post-partum ?
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Après la naissance de bébé, dans l'année qui suit, certaines mamans peuvent se sentir complètement dépassées et épuisées, physiquement et moralement, par leurs nouvelles responsabilités en tant que parent. Elles se retrouvent sans le savoir dans une réelle souffrance psychique, qu'on appelle la dépression post-partum (DPP). En France, en moyenne, 16,7 % des mères sont concernées par cette maladie deux mois après leur accouchement, rapporte une nouvelle enquête nationale de Santé Publique France, menée auprès de 7 133 femmes et publiée dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire du 19 septembre 2023. Comment repérer les symptômes ? Qui consulter ? Les conseils du Dr Jacques Dayan, psychiatre.

Quels sont les symptômes d'une dépression post-partum ?

Très souvent, la maman éprouve une fatigue qui confine à l'épuisement. Il est évidemment normal d'être fatiguée après un accouchement et avec l'arrivée de nouvelles responsabilités. Mais dans le cas d'une dépression post-natale, il s'agit d'une fatigue hors du commun, qui peut même être impressionnante vue de l'extérieur. Voici les signes d'une dépression post-natale : 

  • Fatigue extrême.
  • Fébrile et hyper-active. 
  • Troubles du sommeil (insomnie ou hypersomnie).
  • Pleurs répétés.
  • Troubles de l'humeur et le sentiment de vulnérabilité.
  • Irritabilité ou des colères disproportionnées et/ou répétées.
  • Anxiété constante, allant parfois jusqu'à des crises d'angoisse puissantes.
  • Avoir l'impression de ne pas aimer son bébé.
  • Aimer son enfant se révèle être une véritable souffrance.
  • Sentiment de ne pas être capable de s'occuper de bébé, être désemparée.

Quand survient la dépression post-partum ?

La dépression se manifeste dans l'année qui suit la naissance, "avec un pic à 6-8 semaines après l'accouchement, puis entre le 9e et le 15 mois", précise le CNGOF. 

"Il y a un pic à 6-8 semaines après l'accouchement, puis entre le 9e et le 15 mois."

Comment faire la différence entre dépression post-partum et baby blues ?

Il est un épisode par lequel près de 80% des mères passent : environ trois jours après la naissance, elles sont envahies par une vague de tristesse et pleurent sans raison. C'est le baby-blues, un phénomène court et normal, intimement lié à la fatigue et à la chute brutale des hormones (œstrogènes et progestérone) dans lesquelles la femme enceinte baigne jusqu'à l'accouchement. Ces symptômes durent quelques heures à quelques jours et disparaissent d'eux-mêmes sans aucune intervention. "Il suffit alors à l'entourage d'être présent et compréhensif", explique le Dr Jacques Dayan, psychiatre. 

Même si certains symptômes semblent similaires, le baby-blues n'a absolument rien à voir avec la dépression post-natale. Celle-ci est sérieuse, durable, profonde et peut s'avérer très grave si elle n'est pas prise en charge par une équipe de professionnels. 

Quels sont les facteurs de risque d'une dépression post-partum ?

Faible estime de soi, événements de vie stressants, isolement social, difficultés conjugales, bouleversement physiologique et fatigue liée à l'arrivée de l'enfant sont les causes les plus fréquentes d'une dépression post-natale. Par ailleurs, s'il n'y a pas de profil type de la maman dépressive, plusieurs facteurs favorisants ont cependant été identifiés et peuvent créer un terrain favorable à la dépression post-partum. Les voici :

  • Le fait de vivre dans la précarité n'aide pas à envisager les choses de façon positive. "D'une manière générale, le milieu social dans lequel on évolue joue bien-sûr un rôle", détaille Jacques Dayan.
  • Vivre seul, sans soutien et sans écoute peut également influencer le moral de manière négative.
  • Une relation de couple difficile peut envenimer les choses.
  • Avoir déjà fait une dépression post-natale rend les mamans un peu plus à risque d'en faire une autre "mais ça n'est en aucun cas systématique", insiste le Dr Dayan. 
  • Avoir déjà fait une dépression "classique" à un moment donné dans sa vie.
  • Avoir eu un accouchement difficile.
  • Avoir eu des relations difficiles avec ses propres parents dans la toute petite enfance pourrait aussi jouer un rôle important, même si cela est très difficile à démontrer.

Comment prévenir les risques d'une dépression après l'accouchement ?

Le CNGOF recommande un repérage en amont, dès l'entretien prénatal précoce, à 4 mois de grossesse. "Il faut que toutes les maternités de France prévoient cet espace d'écoute, de discussion, pour repérer les fragilités", précisent les gynécologues. Autre opportunité de repérer la dépression chez les jeunes mamans : l'examen post partum, prévu 6 semaines après l'accouchement. "Ce rendez-vous devrait être l'occasion de vérifier si l'allaitement se passe bien, où en sont les relations avec le compagnon, et comment se passe le vécu psychique de la mère" ajoute le CNGOF.

Que faire en cas de dépression post-natale ?

L'entourage joue un rôle à la fois primordial et extrêmement difficile auprès de la maman dépressive. "Le premier bon réflexe consiste à accepter que la dépression post-natale existe, insiste le Dr Dayan. Il faut admettre que l'on peut déprimer même lorsqu'il y n'a pas eu de catastrophe." Une fois cet état de fait accepté, il s'agit d'offrir une oreille attentive. Se sentir écoutée et entourée peut déjà être d'un grand réconfort pour la maman. De même que pouvoir partager ses soucis et les soumettre à un regard extérieur peut l'aider à les relativiser un peu, ce qui devrait lui apporter un certain soulagement.

Qui consulter en cas de dépression post-partum ?

L'idéal est de se rendre dans une unité parent-enfant composée de toute une équipe de professionnels (pédopsychiatres, psychologues, puéricultrices, infirmières...). Selon la situation, la maman pourra y rester avec son bébé à la journée, en hospitalisation à temps plein ou pour de simples consultations. Des consultations à domicile peuvent également présenter une solution intéressante.

Une autre alternative : aborder le sujet avec la sage-femme lors de la consultation post-natale. Elle pourra ainsi vous orienter vers la personne et les solutions adéquates. Le médecin traitant peut aussi l'orienter vers le service ou le professionnel qu'il estime le plus adapté. Cette option est probablement préférable à celle de consulter directement un psychologue ou un psychiatre "généraliste".

Quelle prise en charge pour les mamans souffrant de dépression post-natale ?

La prise en charge de la dépression post-natale ressemble un peu à celle d'une dépression classique. La première mesure consiste à consulter le plus vite possible. Moins les symptômes seront ancrés dans le quotidien de la maman, plus vite elle s'en sortira. Dans beaucoup de cas, un simple soutien psychologique peut suffire à redonner des forces à la maman et à lui faire envisager les choses sous un angle plus positif. Cela peut prendre un peu de temps, bien sûr, mais les résultats sont bons. On hésite davantage à donner des psychotropes que dans le cadre d'une dépression "classique".

"Mais les antidépresseurs peuvent être prescrits lorsque la situation est inquiétante et ne s'améliore pas rapidement avec une psychothérapie", explique le Dr Dayan. Il faut toutefois bien réfléchir car ces médicaments ne sont généralement pas compatibles avec l'allaitement, ce qui est susceptible de causer une culpabilité supplémentaire à la maman.

Dans l'immense majorité des cas, la dépression post-natale va se résorber en quelques mois grâce à une thérapie adaptée. Car c'est là tout l'enjeu dans le traitement de la dépression post-natale : réagir assez vite pour que le lien entre la mère et l'enfant puisse tout de même se créer rapidement. "Cela arrive que ce ne soit pas le cas immédiatement, ce qui peut poser des problèmes pour la suite du développement de l'enfant", estime l'expert.

Merci au pédopsychiatre Jacques Dayan.

  • Prévalence de la dépression, de l’anxiété et des idées suicidaires à deux mois postpartum : données de l’Enquête nationale périnatale 2021 en France hexagonale : https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/sante-mentale/suicides-et-tentatives-de-suicide/documents/article/prevalence-de-la-depression-de-l-anxiete-et-des-idees-suicidaires-a-deux-mois-postpartum-donnees-de-l-enquete-nationale-perinatale-2021-en-franc
  • « Blues » ou dépression après l’accouchement, des conséquences trop souvent négligées, communiqué du CNGOF, mars 2019 : http://www.cngof.fr/patientes/presse/640-baby-blues-06032019
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