Pourquoi punit-on un enfant ?

Lorsqu'on punit un enfant, des choses plus profondes se jouent. Le Dr Gilles-Marie Valet détaille les deux fonctions éducatives des punitions.

Il s’agit de répondre à une conduite inappropriée pour en éviter sa reproduction, ou de limiter les débordements de l’enfant, quelle qu’en soit l’origine. Surcharge pulsionnelle, envie ou jalousie excessive, maladresses ou mauvaises intentions… quand il est question de punir, ce qui est en jeu dans ce que l’on considère comme une bêtise n’est pas toujours interrogé.
D’un point de vue éducatif, on peut résumer la fonction des punitions à deux aspects particuliers : celui d’indicateur des limites et celui de renforçateur négatif.

La punition agit comme indicateur des limites.

Elle vient sanctionner la transgression d’une règle ou la réalisation (en acte et/ou en parole) de quelque chose d’interdit. Quelles que soient les raisons de cet interdit (danger pour l’enfant, non-respect des autres ou de l’environnement, atteintes à des valeurs essentielles pour la famille ou en tout cas pour celui qui punit…), elle intervient pour que l’enfant comprenne que ce qu’il a fait ou dit n’est pas accepté (donc pas acceptable dans ce contexte-là) par l’adulte.
On pourra souligner alors que la valeur éducative de cette indication reste limitée. Car elle ne va porter que sur les zones défendues sans nécessairement dessiner les contours de tout ce qui est autorisé.
Or on peut supposer qu’une éducation dynamique doit justement mettre en lumière toutes ces zones praticables et accompagner l’enfant dans l’exécution de ces possibilités. À l’image du tuteur qui, pour aider les jeunes pousses fragiles à s’élever, leur indique la direction du ciel (avant de leur laisser le loisir de s’épanouir comme bon leur semble). À moins qu’on veuille obtenir des bonsaïs, pour lesquels on utilise des ligatures et des pots étroits, afin de maintenir leurs tiges et d’atrophier leurs racines.

Les punitions s’exercent aussi comme renforçateur négatif

L’intervention disciplinaire a pour vocation par sa répétition de faire disparaître un comportement inopportun. Le terme négatif est à entendre dans le sens qu’il permet de soustraire quelque chose de préexistant, indépendamment du caractère agréable ou non du procédé utilisé (à l’inverse, un renforçateur positif encourage l’apparition ou l’accentuation d’un phénomène, que celui-ci soit recherché ou indésirable…).
Cependant, les mécanismes en jeu s’appuient le plus souvent sur la dissuasion. En effet, les punitions incitent l’individu à renoncer à un comportement en l’associant à une conséquence désagréable.
À ce titre, on peut souligner que cet aspect des choses trouve son expression la plus concrète, et de fait la plus critiquable, dans les châtiments corporels. Pour que l’enfant se souvienne bien (on pourrait se demander de quoi : de sa faute, de ce qui lui est interdit, ou de la punition elle-même ?) pour que « ça rentre bien », on pense qu’il faut « marquer le coup », aussi bien physiquement que psychiquement.
D’ailleurs, dans ce type de corrections, ce n’est pas par hasard si les coups sont portés sur la tête : comme si cela permettait de faire « rentrer les choses » plus facilement…
Cette fonction de renforçateur négatif peut aussi être comprise dans sa dimension d’exemplarité. Comme dans cette famille nombreuse où l’aîné est systématiquement corrigé devant le reste de la fratrie pour s’assurer que ses frères ne feront pas la même chose.


En savoir plus : "Se faire obéir sans (forcément) punir" du Dr Gilles-Marie Valet, aux éditions Larousse.


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