Ecole : quel enseignement pour quel enfant ?

Bien que les leçons à l'école soient collectives, il est important d'adapter l'enseignement à la personnalité de l'enfant. Stéphane Clerget explique les différences entre les élèves.

Le caractère collectif de l’enseignement a du bon, et pas seulement en termes économiques. Les enfants se motivent mutuellement pour apprendre et progresser (par imitation ou identification). Cependant, un enseignement collectif ne doit pas empêcher de privilégier le mode d’apprentissage le plus adapté à tel ou tel enfant.

On n’apprend pas tous par les mêmes voies. Ainsi, parmi d’autres modes, on distingue deux grandes catégories: ceux qui privilégient le système visuel et ceux qui privilégient le système auditif. Pour étudier, les premiers tireront un meilleur profit des images, des schémas, des tracés et de l’écrit. Il importe qu’ils soient installés en classe face au tableau. Le groupe des auditifs a besoin d’entendre le contenu pour bien apprendre. Ce sont les plus pénalisés quand il y a du brouhaha en classe. On leur conseillera de lire à voix haute quand ils apprennent leurs cours. Les enfants kinesthésiques, dont on tolérera en classe et au domicile qu’ils ne restent pas en place, profiteront le plus des exercices pratiques pour intégrer un savoir. Cela explique qu’ils soient généralement bons en technologie et en physique-chimie, car l’enseignement transmis fait souvent suite à une expérience à laquelle ils participent et qui mobilise leur gestuelle. Ils retiendront d’autant mieux une leçon qu’ils devront la réciter, un texte qu’ils devront le jouer. Ces enfants doivent aller autant que possible au tableau.

La concentration des enfants dépend aussi de leur personnalité. À titre d’exemple, on peut différencier deux catégories qui s’opposent : les pointilleux et les bille en tête. Les pointilleux sont ces enfants qui, confrontés à un travail, vont entrer dans les détails sans avoir une vue d’ensemble. À l’inverse, les «bille en tête» ont rapidement une vue d’ensemble, parfois erronée, et partent sans réfléchir. Surtout, ils risquent en permanence d’être hors-sujet. On aidera les «bille en tête» en les astreignant à se mettre à la place d’un formateur qui doit expliquer à un plus jeune son cheminement. On leur posera questions sur questions pour les aider à fractionner leur travail. Pour les pointilleux, on les entraînera à résumer un texte en deux phrases ou à faire un travail en un temps très court. Dans la vie de tous les jours, on les poussera à classer les différents objectifs de la journée selon leur priorité, à établir des listes par ordre d’importance et à faire des choix entre plusieurs propositions de loisirs ou d’autres activités.

Quand nous finalisons un travail, chacun d’entre nous le juge par des voies internes et des voies externes. La voie interne correspond à notre propre jugement. La voie externe correspond aux jugements d’autrui, et prioritairement au jugement des personnes supposées détenir le savoir. Le point d’équilibre se situe entre ces deux voies. Les enfants ont majoritairement un cadre de référence externe, associant le jugement des parents et des professeurs. Mais en grandissant, il intègre les jugements de ses référents adultes pour pouvoir s’auto-évaluer. Chez l’enfant, le développement du versant interne est important car, sur le plan scolaire, il lui permet de prendre des initiatives et d’avancer de façon autonome quand il a un objectif de travail. Pour cela, il convient de développer sa confiance en lui et surtout son autonomie en différents domaines, pas seulement sur le plan scolaire.

Certains enfants sont plutôt orientés vers la voie interne. Ce sont les enfants qui n’en font qu’à leur tête, qui disent «je sais, je sais» et qui refusent d’être aidés. Ce manque de souplesse pénalise leur apprentissage. Cela va souvent de pair avec un esprit frondeur à la maison. Ce sont des enfants auxquels il convient d’enseigner plus clairement les limites sans présenter l’autorité comme un rapport de force du plus grand vis-à-vis du plus petit. Cette autorité doit bien leur apparaître comme un ensemble de règles et de lois qui s’appliquent à tous, avec la notion de minorité qui impose que, jusqu’à 18 ans, les enfants doivent obéissance à leurs parents. Il convient également de leur faire entendre les règles œdipiennes, car ce sont des enfants qui se prennent volontiers pour le «petit mari» ou la «petite femme» du parent dominant.


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