"Sur un rallye auto, les femmes sont plus fines stratèges que les hommes"

Depuis 21 ans, Dominique Serra organise le Rallye Aïcha des Gazelles au Maroc. Véritable course d'orientation à travers le désert, cette compétition féminine attire cette année plus de 220 participantes toutes nationalités confondues du 19 mars au 2 avril. Interview.

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Dominique Serra, créatrice et directrice générale de l'événement © Maienga

Avec Dominique Serra, pas de faux-semblants. La poignée de main se fait franche et les paroles fusent durant l'interview. C'est qu'il faut savoir prendre le train en marche, ou la voiture, avec cette femme. A quelques jours de la 21e édition du "Rallye Aïcha des Gazelles Maroc", où des concurrentes de tous les pays mettent à l'épreuve leur sens de l'orientation, l'organisatrice rappelle les valeurs de cette célèbre compétition féminine. Rencontre.

Comment le Rallye Aïcha des Gazelles est-il né ?
D'une volonté de valoriser les femmes en entreprise. J'ai lancé cette idée de course féminine dans le désert il y a 21 ans, alors que je travaillais pour le Medef qui cherchait à mettre sur pied une opération de communication. Je me suis dit qu'il était temps de remettre en cause le préjugé qui veut que les femmes et l'automobile ne fassent pas bon ménage. C'était vraiment difficile de mettre cela en place, et s'il n'y avait pas eu cette cohésion et cette solidarité féminine autour du projet, il est probable que j'aurais abandonné.

Donnez-nous un mot pour définir le rallye ?
Humanité ! Le rallye regroupe tout ce qu'il y a de bon, de beau dans une compétition. Les femmes découvrent ou affirment leur estime d'elles-mêmes, et parfois changent de vie. C'est une aventure humaine qui permet de changer le regard qu'elles portent sur elles.

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Pas facile de retrouver son chemin dans le désert... © Maiënga


Quel est le profil des femmes qui participent à la compétition ?
Elles ont entre 25 et 65 ans et leur dénominateur commun est l'envie de se dépasser. La compétition leur permet de savoir de quoi elles sont capables et leur donne un espace de liberté incroyable. Les femmes viennent toutes dans l'optique de vivre une histoire qui leur appartient.

Qu'est-ce qui changent en elles à la fin de la compétition ?
Leur confiance et la fierté d'avoir participé à ce challenge. Cette expérience leur permet de se dépasser et de découvrir une part d'elles-mêmes qu'elles ne soupçonnaient pas. Le rallye peut parfois être explosif avec toutes ces personnalités qui se rencontrent, et c'est justement ça qui est bon !

Qu'est-ce qui différencie un rallye masculin d'un rallye féminin ?
Une femme est plus dans la parole et un homme dans la retenue. Ce qui intéresse les hommes dans un rallye c'est surtout la vitesse. Les femmes, je pense, sont plus fines stratèges quand il s'agit d'arriver d'un point A à un point B. A l'arrivée, leur joie explose, elles dansent, elles chantent, contrairement aux hommes qui restent plus discrets.

Quel est votre meilleur souvenir après toutes ces années de compétition ?

"La compétition est un catalyseur d'émotions"


Je me souviens d'une femme très timide qui a participé au Rallye Aïcha des Gazelles il y a quelques années. Elle ne parlait pas et semblait très renfermée sur elle-même. A l'issue de la compétition, le changement qui s'est opéré en elle était palpable, elle a pris confiance en elle à 100 % et a eu le courage de se séparer de la personne avec qui elle vivait et qui ne lui correspondait absolument pas. Et puis, il y a tous ces souvenirs de demandes en mariage en plein Rallye, c'est formidable. La compétition est un peu un catalyseur de toutes ces émotions.

Vous êtes une femme de défi, quels sont les conseils que vous pouvez donner aux femmes qui nous lisent ?
De ne jamais rien lâcher. Il faut toujours regarder devant soi car la vie est courte. Je pense sincèrement que la volonté et la détermination font changer beaucoup de choses !