Entretien avec le Directeur Général de Tiffany & Co. "Une femme va regarder près d'un million de fois sa bague de fiançailles dans sa vie"

Vous parliez tout à l'heure de ce diamant jaune exceptionnel qu'est le "Tiffany Diamond". Ou le plus légendaire au monde...
Tout à fait. En hommage à l'histoire de Tiffany intimement liée entre les Etats-Unis et la France, et à l'occasion de l'ouverture de notre boutique sur l'avenue des Champs-Elysées, le Tiffany Diamond revient sur son lieu de naissance : Paris.  Il faut savoir que ce diamant de 128 carats a été porté sur les épaules sublimes d'Audrey Hepburn, qui est la seule femme au monde à l'avoir porté ! En ce moment même, la vitrine de la boutique de New York sur la Cinquième Avenue est vide parce que ce sublime diamant nous est prêté ici, et ce jusque mi-juillet. Il a quitté la boutique américaine en jet privé avec ses bodyguards pour venir jusque-là. C'est tout à fait exceptionnel.

On doit notamment à Tiffany, l'invention de la bague de fiançailles telle que nous la connaissons aujourd'hui : pouvez-vous nous en dire un peu plus ?  
Il faut savoir que Tiffany, en 1886, avec la "sertissure Tiffany", invente, comme à l'époque le 925 millièmes sur l'argent qui est devenu une norme mondiale, la nouvelle norme de la bague de fiançailles. Avec quelque chose qui paraît à la fois évident et simpliste aujourd'hui, mais qui était tout simplement génial à l'époque : c'est de se dire, alors qu'on pratiquait beaucoup le serti clos, on va monter la monture sur griffes, avec ces fameuses six griffes qui vont permettre de faire rentrer la lumière. Et de la même manière que la notion "we cut for brilliance", le fait de porter une attention considérable à la brillance de la pierre, nous a amenés à la monter de cette manière-là. Parfois les idées les plus simples sont les plus intemporelles, et les plus exceptionnelles. 
Quand vous savez qu'une femme va regarder une bague de fiançailles (qu'elle a toute sa vie) plus que ses enfants dans sa vie... Car c'est un million de fois qu'elle va la regarder ! Donc c'est pour cela que ce n'est pas un petit achat, ce n'est pas un petit moment. Sur le plan de la charge émotionnelle, c'est quelque chose qui incarne l'amour que quelqu'un de fondamental pour elle, va lui porter. On est quasiment sur une catégorie de produits de ce qui se fait au plus haut en valeur intrinsèque et même sensible.
Le fait de reconnaître cela nous amène à faire les choses de manière différente : déjà comprendre, écouter, ce que nos clients veulent. Et dans la manière de proposer, de se dire, on va vendre beaucoup plus qu'un produit, mais une expérience, comme le point de départ d'une histoire. 

D'ailleurs pour l'anecdote, il paraît que les demandes en mariage sont de plus en plus fréquentes dans la boutique de la Cinquième Avenue à New York...
En effet ça l'est. Mais la semaine dernière, il y en a eu une ici ! (NDLR, sur la boutique des Champs-Elysées). Nous étions en "soft opening" (en rodage) et nous avons eu un client qui est venu, très ému, et qui a regardé les bagues : il a demandé à en faire discrètement empaquetée une. Le couple s'est fait servir une coupe de champagne dans l'un des salons privés, et monsieur, devant notre équipe, s'est mis à genou et a demandé madame en mariage.

Jean Schlumberger (en 1956), Elsa Peretti (1974), Paloma Picasso (1979), Franck Gehry... Ces artistes ont fait le charme et contribué au succès de la marque. Allez-vous continuer les collaborations ?
A ce sujet, il y a pour la maison une actualité majeure. En effet, Tiffany vient de s'adjoindre les services de Francesca Amfitheatrof, qui devient la première Design Director mondiale et de manière transversale sur nos catégories. Elle va donc lancer sa première collection à son nom, signée. Et elle reste à l'intérieur de la maison. Car avant, c'était le studio de créations qui dirigeait, maintenant on aura une directrice du design. Ce qui constitue un élément absolument majeur ; quasiment aucune autre marque joaillière ne fait cela.