Nolwenn Leroy : "Mon album et la maternité sont entièrement liés"

Il aura fallu cinq années pour que Nolwenn Leroy revienne dans les bacs. Cinq années pour préparer "Gemme", son sixième album - le plus intime selon certains -, élaboré pendant la grossesse de l'artiste. Nous l'avons rencontrée.

Nolwenn Leroy : "Mon album et la maternité sont entièrement liés"
© Mercury

"L'album ne parle pas de maternité mais les deux sont liés" confie Nolwenn Leroy. Il faut dire que pendant la préparation et l'enregistrement de Gemme, son sixième album, l'artiste était enceinte de son premier enfant. Neuf mois et un bébé plus tard, Nolwenn Leroy dévoile un opus tourné vers la minéralité. Synthèse de ses précédents disques, Gemme marque un tournant dans sa carrière. Produit par Jamie Ellis - "qui a contribué à la couleur et au son de l'album" - et pensé pour la scène - Nolwenn Leroy nous a confié avoir déjà en tête les lumières et décors de sa future tournée -, Gemme contient 11 titres dans lesquels l'artiste chante l'amour et ses peurs les plus profondes. C'est une Nolwenn Leroy apaisée et heureuse que nous avons au téléphone le jour de la sortie de l'album. "Ça a beau être mon 6e disque, je suis angoissée comme pour le premier" nous avoue-elle. Confidences d'une artiste accomplie.

Journal des Femmes : Aujourd'hui sort Gemme, votre 6e album. Comment vous sentez-vous ?
Nolwenn Leroy : C'est toujours la même angoisse et excitation à la fois, comme pour le premier disque. Cet album, je l'ai gardé pour moi pendant des mois et aujourd'hui, il ne m'appartient plus. Je suis impatiente d'avoir le retour du public. C'est du bonheur bien sûr, une angoisse positive… On a besoin de cette excitation, c'est ce qui nous donne l'envie d'écrire de nouvelles chansons et faire de nouveaux disques.

Cet album est plus intime que les précédents. Vous y mettez davantage en avant vos peurs et vos doutes. Qu'en pensez-vous ?
Absolument. C'est peut-être lié à ce que je traversais à ce moment-là. Quand on s'apprête à donner la vie, on a peur de tout. C'est angoissant d'amener un être dans ce monde de fou, mais on a tout de même envie de garder espoir et rester positif. Je pense que cela se ressent dans l'album. Les thématiques sombres sont présentes mais il y a une victoire de la lumière sur l'ombre. C'est ce qu'est une gemme finalement. Cette pierre est extraite des profondeurs de la terre, de l'ombre, mais à travers elle, passe la lumière. C'est très symbolique.

Dans Combat pour la paix et Trace ton chemin, vous abordez des thématiques sombres qui contrastent avec la mélodie plutôt entraînante.
J'ai toujours aimé cette dichotomie : associer une thématique profonde à une mélodie plus légère. Le plus important est de rester positif malgré tout.

L'Ankou parle de la mort. Une thématique que vous craignez ou qui vous fascine ?
Lorsque l'on devient parent, on n'a pas peur de sa propre mort mais de celle des êtres chers. Au-delà de ça, la vision celte de la mort est différente de la vision judéo-chrétienne. L'Ankou, c'est la faucheuse mais c'est aussi quelque chose qui nous accompagne tout au long de notre vie et frappe à un moment donné. C'est une fatalité avec laquelle il faut vivre…

Gemme, 6e album de Nolwenn Leroy © Mercury

Vous avez déclaré que la grossesse vous avait donné une énergie incroyable. Est-ce qu'elle a changé votre manière d'écrire ou vous a donné de nouvelles préoccupations ?
L'album ne traite pas du tout de la maternité mais les deux sont entièrement liés. Pendant ma grossesse, je me sentais solide, forte et capable de déplacer des montagnes. C'était une période de plénitude qui dure encore aujourd'hui d'ailleurs. Même si elle n'est pas présente dans l'album, je pense qu'elle a influencé les angles des thèmes choisis et ma manière d'interpréter mes textes.

Pourquoi ne pas avoir écrit sur la maternité justement ?
En temps normal, j'ai beaucoup de mal à partager des choses de l'ordre de l'intime. Le lien avec la maternité s'est fait à travers la symbolique et l'imagerie du disque, avec cette grotte dans laquelle je suis qui symbolise la gestation. L'album est un nouveau cycle qui s'ouvre après les animaux dans Histoires Naturelles et Le Cheshire Cat et moi, et l'océan dans Bretonne et Ô filles de l'eau. Avec Gemme, je suis passée à la minéralité. Ce cycle des éléments est bien antérieur à ma grossesse mais tout s'imbriquait.

Trois de vos titres sont en anglais. Pensez-vous un jour faire un album entièrement en anglais ?
J'aimerais bien. Il faut savoir que j'écris toutes mes chansons en anglais avant de faire des versions françaises. C'est une langue naturelle pour moi : j'ai vécu aux Etats-Unis, j'y ai fait mes études, je l'utilise au quotidien… J'aime parler et chanter en anglais. Ma voix se place différemment.

Pensez-vous déjà au prochain album ?
Evidemment. Bretonne et Ô filles de l'eau se sont enchaînés, et j'ai ensuite fait une tournée. J'avais besoin de faire un break après tout ça. Il m'a fallu cinq ans pour sortir ce nouveau disque mais j'aimerais que le suivant vienne rapidement. Je ne sais pas encore si ce sera un album de chansons originales ou un album-concept… L'idée, c'est de faire plaisir au public avant tout.

On vous a connue en 2003 à la Star Academy. Quel est votre plus beau souvenir de ces 15 années passées ?
Peut-être ma collaboration avec Laurent Voulzy qui a marqué un tournant dans ma carrière. Travailler à ses côtés est une chance incroyable. Il m'a donné confiance en moi, en mon écriture et ma composition, et a révélé la vraie Nolwenn. Grâce à lui, j'ai pu prendre ce nouveau départ sur des bases solides. C'est sûrement lui qui a fait toute la différence.

Un rêve pour l'avenir ?
Chanter davantage à l'étranger. Je l'ai beaucoup fait pour Bretonne. J'aimerais partager ma musique au plus grand nombre même si les artistes français ont du mal à s'exporter. J'aimerais surtout continuer à écrire et faire ma musique.

"Je ne me suis jamais sentie aussi forte et vulnérable à la fois"

Quelle est votre mélodie du bonheur ?
Belle-Ile-en-Mer de Laurent Voulzy. C'est une chanson intemporelle, réconfortante, chantée par la voix douce de Laurent qui nous parle d'amour, de bonheur, de soleil, de Bretagne… Tout est réuni !

Est-ce qu'il vous arrive de jouer du pipeau ?
Pas de vrais mensonges mais il m'arrive de faire des mensonges par omission ou de petits mensonges du quotidien, des trucs pas graves.

Quelque chose que vous menez à la baguette ?
Mon parcours. Je n'ai pas de manager, ce qui n'est pas courant dans le milieu. Je travaille toute seule, de manière artisanale. J'essaie de faire en sorte d'être la plus sincère possible et que cela ne m'échappe pas. J'ai besoin de savoir que tout est cohérent.

Qu'est-ce qui vous met des trémolos dans la voix ?
En ce moment, c'est mon bébé. Je ne me suis jamais sentie aussi forte et vulnérable à la fois. On a beau nous le dire avant, on ne le réalise que quand on le vit soi-même.

Ce que vous envoyez valser ?
J'ai tendance à lire toutes les critiques car elles sont importantes pour avancer, mais parfois, je préfère les laisser de côté.