Puggy : un vent de fraîcheur souffle sur "Colours"

Après plus de 10 années de succès, le trio belge Puggy s'apprête à lancer son quatrième album. "Colours", dans les bacs le 22 avril 2016, rassemble 11 titres frais aux sonorités différentes. Rencontre.

Puggy : un vent de fraîcheur souffle sur "Colours"
© Boldatwork

C'est l'histoire de trois amis bruxellois qui se réunissaient dans leur salon pour faire de la musique… Au fil du temps, Matthew le chanteur et guitariste, Romain le bassiste, et Ziggy le batteur deviennent naturellement Puggy. Après un premier album sorti en 2007, des centaines de concerts et deux autres disques, le groupe s'apprête à lancer son quatrième opus sobrement intitulé Colours. A quelques heures d'un mini concert parisien et quelques jours avant une série de dates à la Maroquinerie à Paris (du 16 au 21 avril), nous avons rencontré le groupe dans un café de la capitale. Confidences.

De gauche à droite : Romain, Matthew et Ziggy © Boldatwork

Pourquoi ce nom "Puggy" ?
Matthew :
On répond quelque chose de différent à chaque fois qu'on nous pose cette question. Au début, on se disait que l'une des réponses allait plaire et devenir virale… La vraie raison sera peut-être donnée un jour mais ça ne sera pas aujourd'hui (rires).

Le groupe est composé de 3 membres. Le fait d'être un trio est-il une force ?
Matthew :
Dans un trio, il y a rarement un leader et deux autres membres qui suivent. On est tous sur un pied d'égalité. C'est une sorte de démocratie dysfonctionnelle… qui fonctionne !

Romain : Ça a aussi un côté très pratique. Au début de notre carrière, c'était simple de voyager lors des tournées mais aussi pour les enregistrements. Le trio est né naturellement, le côté pratique est venu après.

Ziggy : Être trois nous permet de tout faire : on compose nos propres morceaux, on n'est pas " trop " pour prendre des décisions mais pas " trop peu " sur scène dans le sens où on n'a pas besoin de musiciens en plus.

Parlez-nous un peu de votre parcours…
Romain :
Quand on a commencé à Bruxelles, on n'arrivait pas à trouver de manager. On s'est donc exportés à Londres avant de revenir en Belgique deux ans plus tard pour se faire signer. En 2007 est sorti notre premier album et on a fait l'ouverture du Festival Couleur Café à Bruxelles. Juste après notre performance, un incendie a arrêté l'événement. Comme notre prestation était la seule qui avait pu être filmée, elle est passée en boucle sur les chaines du monde entier. Une semaine après, on a reçu un mail nous proposant de faire la première partie de la tournée européenne du groupe Incubus. On n'y croyait pas mais on s'est lancés et c'est ce qui nous a fait découvrir le monde professionnel. Depuis, on a signé en France chez Universal-Mercury et 3 albums sont sortis.

Votre 4e album s'appelle Colours. Un moyen de montrer votre palette d'influences ?
Romain :
On voulait exprimer un sentiment de fraîcheur, de renouveau, de simplicité…

Matthew : On voulait aborder ce quatrième album différemment, par peur de se répéter. Avant, on composait nos morceaux puis on les enregistrait pendant deux semaines. Cela créait un album uniforme, aux sonorités similaires. Sur celui-ci, on a travaillé conjointement pendant un an et on obtient un disque varié, avec des sonorités différentes mais qui reste homogène et le plus important, c'est qu'on nous reconnaît. On n'a pas essayé de ne pas être nous, mais d'être nous puissance 10.

Quelles ont été vos sources d'inspiration pour cet album ?
Matthew :
On n'a jamais eu de système de composition. L'inspiration peut surgir à tout moment : lors d'une balade, une série de phrases qui expriment un sentiment vague… Parfois, on a juste envie de raconter une histoire et d'autres fois, la volonté de parler de sujets plus difficiles comme Lonely town.

Romain : Il arrive que les textes viennent avec la musique aussi. Une vibe qui se dégage d'un morceau particulier et les mots s'emboîtent naturellement dessus. On n'a jamais créé une musique par un texte fini.

Matthew : Ça commence toujours par le besoin d'exprimer quelque chose et ça se termine par la volonté de faire ressortir quelque chose à la personne qui écoute. C'est notre démarche en tout cas.

Votre tournée a déjà commencé. Quel est l'accueil du public ?
Romain :
Pour Change the colors, le public est très enthousiaste même s'il ne connaît pas encore le morceau. Territory les laisse assez perplexes mais on aime bien le jouer. L'album est encore tellement frais, on a hâte que nos fans l'écoutent et nous disent réellement comment ils le perçoivent.

Que ressentez-vous sur scène ?
Romain :
On adore ! C'est là où on aime être.

Matthew : C'est pour ça qu'on fait ce métier.

Romain : On a aussi la chance de faire des clubs aux formats plus intimes. L'atmosphère confinée et même les odeurs de transpiration te font sentir qu'il y a une vie qui se dégage de tout ça. On est des musiciens avant tout, on n'est pas dans le spectacle.

Avez-vous des rituels avant de monter sur scène ?
Matthew :
Je fais des vocalises qui agacent tout le monde.

Romain : Moi je les écoute (rires).

Matthew : On essaie de manger sainement.

Romain : On n'a pas vraiment de rituel particulier…

Matthew : Notre rituel c'est de monter sur scène et d'envoyer.

Faire les premières parties d'Incubus ou des Smashing Pumpkins : un rêve devenu réalité ?
Matthew :
Je suis un grand fan des Smashing Pumpkins et Romain de Incubus, donc de pouvoir tourner avec eux, c'était juste énorme ! On a aussi fait des concerts avec Deep Purple en France. En dehors du fait que tu as accès aux bords de scène de groupes que tu apprécies, tu apprends beaucoup en les observant. Avec Deep Purple, la personne qui nous a accueillis le matin était le bassiste du groupe. Cet homme a vendu des millions de disques, a influencé des centaines de musiciens et c'est lui, dans toute son humilité qui nous accueille…

Romain : Ce sont d'ailleurs souvent les groupes les plus connus qui sont les plus gentils et généreux.

Matthew : On a rarement été déçus par des gens qu'on admirait.

Quel est votre meilleur souvenir de concert ?
Ziggy :
Il y en a beaucoup mais peut-être le Forest National à Bruxelles il y a deux ans. C'était un moment magique de voir 8000 personnes chanter nos chansons…

Matthew : L'Olympia aussi.

Romain : Je dirais la première fois qu'on a rempli le Bataclan. On avait fait La Cigale avant mais au Bataclan, il y avait une atmosphère particulière qui se dégageait.

Matthew : On avait fait deux soirs complets et on avait même rajouté une troisième date qui était elle aussi à guichets fermés. C'était dingue.

Vous êtes très actifs sur les réseaux sociaux. C'est important de rester proche de son public ?
Romain :
Je pense que ça l'est car même si tout change autour, ce lien perdurera. C'est le trésor d'un groupe.

Matthew : On a la chance d'avoir des fans vraiment sympas, qui viennent nous voir de très loin. C'est normal d'être présents pour eux.

Un artiste ou un groupe que vous aimeriez rencontrer ?
Matthew :
Ella Fitzgerald, qui est selon moi la plus grande chanteuse de toutes époques et tous sexes confondus.

Romain : Sur ce disque, on a eu la chance de collaborer avec David Kosten. On voulait travailler avec lui et on l'a fait pendant un an.

Matthew : Je passerais bien un disque à faire du café pour Radiohead juste pour voir comment ils fonctionnent…

Ziggy : Paul McCartney aussi !

Matthew : Regarder travailler Sufjen Stevens...

Romain : Par curiosité,  Quincy Jones. Faire un arrangement avec lui et le voir travailler doit être hallucinant.

Le groupe existe depuis plus de 10 ans. Que retenez-vous de cette décennie ?
Matthew :
Les premières dates à Bruxelles, le premier Olympia, la première Cigale, le premier Bataclan… Toutes les premières fois finalement.

Ziggy : A chaque fois, c'était vraiment magique.

Matthew : Le Taratata aussi qui a été un tremplin. Nagui avait choisi le morceau How i needed you et il avait totalement raison. Le lendemain, on était dans les charts iTunes en France sur un disque qui n'était pas encore sorti…

Ziggy : On a gagné entre 20 et 30000 likes sur Facebook dans les heures qui ont suivi. C'était dingue !

Colours, dans les bacs le 22 avril 2016 © Mercury

Qu'est-ce que vous menez à la baguette ?
Romain :
Le jonglage.

Ziggy : Le bon vin.

Qu'est-ce qui vous met des trémolos dans la voix ?
Romain :
Le la bémol, un bon bouquin, un bon film.

Matthew : Les livres de Murakami et tous les films de Charlie Chaplin. La version de Nina Simone de I love you porgy aussi qui me fait pleurer.

Romain : Le live à Berlin d'Ella Fitzgerald.

Qu'est-ce que vous envoyez valser ?
Matthew :
Le buzz. Aujourd'hui, les gens passent leur temps à réfléchir à comment faire parler d'eux dans la presse. Ce qui m'a toujours fait plaisir à Bruxelles, c'est que quand on me reconnaît dans la rue, on me dit "j'aime ce que vous faites" et pas "j'ai vu vos fesses dans tel magazine"… J'apprécie le fait d'être reconnu pour ce que je fais.

Romain : Quand on m'appelle pour faire de la pub pour un produit…

Ziggy : Les télé-réalités. Tout ce voyeurisme et le côté bas de l'émission me déplaisent.

La dernière fois que vous l'avez mise en sourdine ?
Matthew :
J'ai des opinions et parfois, je dois me retenir quand on aborde certains sujets. Mais ça arrive rarement.

Ziggy : Sur scène, quand quelque chose ne va pas, j'ai tendance à dire des gros mots dans le micro en oubliant que le public m'entend… Il faut vraiment que je fasse attention à ça !

Romain : Je ne la mets jamais en sourdine.

La dernière fois que vous vous êtes réveillés en fanfare ?
Matthew :
Tous les jours sauf quand on rentre de tournée où on est vraiment fatigués.

Romain : Je ne suis pas vraiment du matin…

Quelle chanson entonnez-vous le plus en ce moment ?
Matthew :
Coward, le nouvel album de Yael Naim. Je suis extrêmement jaloux car j'aurais aimé écrire quelque chose d'aussi beau.

Romain : Le titre Colours de Donovan. Il chantonne un peu comme Johnny Cash et c'est génial !

Ziggy : Le dernier disque de Rodrigo Amarante.

Quelle musique adoucit les mœurs selon vous ?
Romain :
L'album Kind of blue de Miles Davis. Quand tu l'écoutes, tu es apaisé.

Ziggy : J'ai toujours adoré les variations de Bach par Dinu Lipatti, un pianiste roumain. C'est probablement la musique la plus belle jouée par un monsieur mort beaucoup trop tôt.

Matthew : Gilberto Gil. Quand tu mets ses musiques, tout le monde danse, c'est magique.

Vous arrive-t-il de jouer du pipeau ?
Matthew :
Jamais entre nous et encore moins en tournée. L'intégrité, la sincérité et l'honnêteté sont les choses les plus importantes en tournée.

Découvrez le premier extrait de Colours, Lonely Town :