Une folle de Chaillot flamboyante

Courez à la Comédie des Champs-Elysées pour 1h45 de féerie mais aussi de réflexion quasi philosophique sur ce que font les hommes du monde qui les entoure.

Le metteur en scène Didier Long nous invite dans son premier acte  à la terrasse du café "Chez Francis" où le "petit monde" (chanteur, jongleur, marchand de lacets, bouquetière, etc.) accroche la lumière et savoure son quotidien plein de légèreté. A l'opposé, "les salauds", de sombres financiers sans foi ni loi prêts à forer Paris pour y trouver du pétrole, semblent ne plus rien apprécier hormis les profits qu'ils peuvent tirer de chaque chose.

La folle de Chaillot, jouée par une Anny Duperey pleine de panache et haute en couleur (perruque rousse et  capeline verte parée de colliers et ornements scintillants), s'improvise alors arbitre de ces deux mondes. Elle se lance dans un combat héroïque contre la vénalité de ce monde aidée de l'exceptionnel Dominique Pinon,un chiffonnier-avocat tonitruant, qui dénonce ces drogués de l'orgueil et de l'argent. Pour lui, derrière chaque fleur, chaque chose qui procure du plaisir sur terre il y a malheureusement des "mecs" qui détruisent tout sur leur passage... La folle de Chaillot, pas si folle que cela d'ailleurs, imagine alors un stratagème avec ses amies Catherine Hosmalin (Folle de Passy), Fabienne Chaudat (Folle de la Concorde) et Catherine Salviat (Folle de St-Sulpice) afin de débarrasser le monde de ces tristes corbeaux...

Cette pièce offre un écho saisissant aux préoccupations écologiques actuelles et aux excès financiers en tous genres qui affaiblissent notre économie. Ce qui explique sans doutes que les textes écrits en 1943 n'ont pas pris une ride ! Et les décors sont somptueux : grâce aux costumes de Pascale Bordet et aux lumières de Laurent Béal, le "petit monde" de la folle de Chaillot irradie et donne décidément envie de choisir son camp. Une très belle pièce!