Margot Robbie : "J'aimerais ne pas m'excuser pour ce que je suis"

Margot Robbie : "J'aimerais ne pas m'excuser pour ce que je suis"

Après avoir campé la femme de Leonardo DiCaprio dans "Le Loup de Wall Street" et la fiancée du Joker dans "Suicide Squad", Margot Robbie s'affranchit dans "Moi, Tonya". Elle y incarne la patineuse américaine Tonya Harding, suspectée d'avoir explosé le genou de sa concurrente Nancy Kerrigan avec une barre en métal dans les années 90. Rencontre, plus en douceur.

Elle glisse vers l'Oscar. Avec Moi, Tonya, Margot Robbie, 27 ans seulement, concourt pour la statuette de Meilleure actrice face à Frances McDormand, Meryl Streep, Saoirse Ronan et Sally Hawkins. Il faut dire que son interprétation de Tonya Harding a de quoi lui attirer les félicitations du jury. L'actrice repérée dans Le Loup de Wall Street et saluée dans Suicide Squad livre une prestation sans faute en patineuse artistique malmenée par la vie. Sans fard, silhouette athlétique, accent redneck, look eighties... l'Australienne montre l'ampleur de son talent dans ce biopic cinglant sur celle que l'Amérique a adoré détester.
En 1994, la patineuse artistique Nancy Kerrigan se fait agresser à la barre de fer à la sortie d'un entraînement. A quelque semaines des Jeux Olympiques de Lillehammer, le pays soupçonne sa rivale Tonya Harding d'avoir commandité l'attaque. La blonde redneck contre la brune parfaite. Un combat au milieu des paillettes et de la glace, sous les projecteurs. Il n'en fallait pas plus pour passionner les foules. Vingt ans plus tard, l'histoire du vilain petit canard venu d'Oregon intéresse Hollywood et Margot Robbie, qui produit-là son premier film givré. Entretien.

© Mars Films

Le Journal des Femmes : Qu'admirez-vous chez Tonya Harding ?
Margot Robbie : J'adore qu'elle ne se soit jamais excusée d'être ce qu'elle est. Elle vous dit ​droit dans les yeux qu​e c'est ​une beauf, ce que les gens ont tendance à nier aux Etats-Unis. J'aime aussi ​sa capacité à ​s'adapter aux situations, elle est fière de ​ne pas s'​en inquiéter​. Elle accomplit quelque chose dans un sport où elle n'​est pas la bienvenue. Pour moi​,​ c'​était une outsider à la poursuite du rêve américain, ​qui a été très proche de le réaliser.

Vous êtes australienne. Peut-on dire que vous poursuivez aussi le rêve américain ?
Je n'y avais jamais pensé en ces termes, mais j'ai déménagé aux Etats-Unis et j'ai commencé une carrière là-bas, que j'essaie de réussir alors oui, on peut dire que je suis à sa poursuite aussi (sourire).

Tonya est motivée par son esprit de compétition. Elle veut être la meilleure, prouver qu'elle en est capable. Qu'est-ce qui vous pousse à réussir ?
Je n'ai jamais voulu être la meilleure dans quoi que ce soit. Je n'ai jamais voulu arriver la première, mais travailler avec les meilleurs, être parmi eux. Faire ce que j'aime au plus haut niveau, c'est plus excitant, ça me pousse à me surpasser. C'est tout ce que je peux espérer.

Ce rôle vous a demandé de prendre un accent, d'apprendre à patiner, d'être filmée sans maquillage… Quel a été le plus gros challenge ?
Pour les trucs physiques, il suffit de se mettre au boulot. Le parcours émotionnel est plus difficile. Comprendre une relation abusive, pourquoi quelqu'un reste avec une personne violente, c'était compliqué.

Jouer quelqu'un qui existe dans la vraie vie, ça change quelque chose ?
C'est très intimidant de jouer une personne encore vivante et qui va voir le film. C'est même effrayant. J'avais la responsabilité de raconter son histoire le plus honnêtement possible, sans pour autant la rendre parfaite, parce que personne ne l'est. Pour ce faire, j'ai dû différencier la vraie Tonya et mon rôle. Quand je parle de Tonya, je pense au personnage la plupart du temps. Celle de la vraie vie est une entité à part pour moi.

Qu'avez-vous appris de vous sur le tournage ?
Avec chaque personnage, je découvre quelque chose de moi-même. Tous mes rôles me changent. C'était intéressant d'explorer sa façade, ce masque qu'on enfile tous pour être appréciés et appréciables. Tonya dit qu'elle se moque de ce que les gens pensent d'elle, mais quand je regarde ses interviews, j'ai vraiment l'impression qu'elle s'en soucie. Je la comprends. J'aime l'idée de ne pas avoir honte, ni de m'excuser pour ce que je suis, mais j'ai bien trop peur pour le faire vraiment.

Vous êtes productrice du film. En quoi est-ce important de financer, de jouer et d'encourager des personnages féminins forts ?
C'est une industrie énormément déséquilibrée. On doit travailler pour y remédier. De manière plus personnelle, j'adore les films que je fais et les rôles que je joue. Je veux avoir mon mot à dire sur la manière dont le projet est monté et présenté. En tant qu'acteur, vous ne pouvez pas intervenir à ce niveau. Comme producteur, vous pouvez bâtir le projet de fond en comble et le voir être proposé au public de la manière que vous le souhaitiez. Je veux avoir une voix dans cette conversation-là.

Moi, Tonya, avec Margot Robbie. En salles le 21 février 2018.