Jasmine Trinca fait contre mauvaise fortune bon cœur

L'actrice italienne Jasmine Trinca est sous les projecteurs pour "Fortunata", de Sergio Castellitto, en salles le 24 janvier 2018. Un drame sur le quotidien d'une femme qui se bat pour élever sa fille malgré les coups bas du destin. Interview.

Jasmine Trinca fait contre mauvaise fortune bon cœur
© Maria Laura Antonelli / A/SIPA

Présenté dans la sélection Un Certain Regard au Festival de Cannes, Fortunata s'immisce dans le quotidien de l'héroïne éponyme, mère célibataire à qui la vie ne fait pas de cadeau. La jeune femme est coiffeuse à domicile le jour, mère débordée toujours. Alors qu'elle cherche son bonheur sur un chemin jonché d'embûches, l'amour, l'amitié, la violence et l'injustice vont venir se heurter à ses rêves. Jasmine Trinca, actrice italienne héroïne de Miele de Valeria Golino et habituée de Bertrand Bonnello, incarne avec ferveur cette femme pleine de vie et d'envie. Nous l'avons rencontrée sur la Croisette.

Le Journal des Femmes : Comment vous êtes-vous retrouvée dans ce film ?
Jasmine Trinca : C'est difficile de tomber sur des rôles féminins forts en Italie. Souvent, les femmes sont là pour raconter les hommes. On ne s'intéresse pas à leur profondeur. Alors dès que j'en ai la possibilité, j'essaie de choisir des rôles qui correspondent à mon idée de la femme. Quelqu'un qui n'est pas l'adjectif d'un sujet masculin, qui existe pour elle-même.

Qui est donc Fortunata ?
C'est un personnage du passé. Elle renvoie à Sophia Loren ou Anna Magnani dans les films italiens des années 50/60. Ce genre de femmes très fortes, des héroïnes du quotidien qui travaillent dur et élèvent leurs enfants. C'est aussi une histoire moderne sur la liberté et l'émancipation féminine. On a besoin de cinéma comme ça, avec un message puissant sans être un manifeste.

C'est quand même un film pessimiste…
Fortunata se ne laisse jamais vraiment aller. Elle est confrontée à l'illusion de l'amour qui sauve, mais elle se rend compte que c'est seulement grâce à elle qu'elle arrivera à trouver la force de se battre. C'est un film qui dit qu'on n'a pas besoin des autres pour parvenir à ses fins.

Ni à la chance… même quand on s'appelle Fortunata. Le destin, vous y croyez ?
Il y a la chance, mais il y a surtout la volonté. Je crois profondément que les gens peuvent changer le cours des choses à force d'énergie. Dans le film, il y a aussi l'idée de la faute. Fortunata se sent continuellement en erreur, peut-être à cause des hommes autour d'elle qui lui donnent cette impression.

C'est assez féminin de ne pas se sentir à la hauteur. L'avez-vous déjà ressenti en tant qu'actrice ?
Oui en tant qu'actrice, mais même dans ma vie personnelle. C'est intéressant d'arriver à le retranscrire face à la caméra. Utiliser son manque de confiance de manière créative, ça devient positif.

En tant que mère, comment avez-vous appréhendé ce rôle de maman rejetée par sa fille ?
C'était fort parce que même si on joue un rôle, une part de nous transparaît. En tant que maman, j'ai aussi cette idée d'amour profond, naturel, tout en ne sachant pas trop comment être mère. On ne peut pas avoir d'idée trop figée sur ce lien si viscéral.

Vous avez une fille de 8 ans. Qu'est-ce que vous lui inculquez ?
C'est important de transmettre aux enfants la possibilité de l'erreur. A ma fille, je lui apprends tout ce qu'est Fortunata finalement : une notion de liberté, de bien-être envers soi-même. L'idée d'une fille qui doit se réaliser pour atteindre l'individualité. Quand je lui fais des discours sur le genre, elle me répond toujours "oui maman tu me l'as déjà dit...".

Fortunata, de Sergio Castellitto. Avec Jasmine Trinca, Stephano Accorsi... Sortie en salles le 24 janvier 2018.

"Fortunata // VOST"


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