Christian Vincent, l’éclaireur

Il a révélé Fabrice Luchini dans "La Discrète" et lui fait revêtir le costume sec et antipathique de président de Cour d’Assises dans "L'Hermine", un film intelligent et sensible à découvrir en salles le 18 novembre. Rencontre Avec Christian Vincent, réalisateur passionnant.

Christian Vincent © Gaumont Distribution

Prix du scénario à la Mostra de Venise, L'Hermine, nous montre Fabrice Luchini en austère et redouté juge Michel Racine, confronté à la femme qu'il a aimé il y a six ans. Quelle délectation de voir l'acteur passer du masque de l'autorité à celui de la douceur !
Nous avons échangé avec le réalisateur du film, Christian Vincent, qui signe un drame humain où les moments de théâtralité et d'intimité s'alternent et se complètent très justement.  

Journal des Femmes : Comment est né ce projet de L'Hermine ?
Christian Vincent : C'est parti de l'envie commune avec mon producteur Matthieu Tarot  de tourner à nouveau avec Fabrice Luchini. Il l'avait rencontré en tant que co-producteur sur Gemma Bovery d'Anne Fontaine et moi il y a 25 ans avec La Discrète. L'envie était là, restait à trouver l'histoire. Il se trouve que depuis quelques temps je pensais régulièrement au métier de président de Cour d'Assises alors j'en ai parlé à Matthieu qui s'intéresse de près au monde de la justice. Je suis allé assister à un procès à Bobigny et c'est là que tout a commencé, j'ai voulu aborder cet univers sans idées préconçues, je me méfie énormément.

Qu'est-ce qui vous a marqué durant cette phase d'observation ?
J'ai été épaté, voire émerveillé, par la qualité des gens que j'ai rencontrés. Leur honnêteté, la grande conscience de ce qu'ils font, j'ai été étonné de découvrir le déroulement d'un procès d'assises, notamment avec la première journée consacrée à l'enquête de personnalité qui sert à cerner l'accusé ou la victime que les jurés se doivent de connaître avant de procéder à une condamnation. C'est impudique, mais nécessaire.
On retrouve la diversité de la France dans un procès: métissage culturel, intellectuel, de nationalités, langues, religions, la diversité ou des gens qui n'auraient jamais du se croiser se croisent. C'est quelque chose qui me convient parfaitement car je veux filmer la France et sa diversité. Les cercles fermés, l'entre-soi, le cinéma bourgeois ne m'intéressent plus.

Fabrice Luchini interprète Michel Racine, un magistrat détesté de tous, qui va s'adoucir grâce à une femme...
Le travail du film L'Hermine est d'humaniser Michel Racine, j'avais envie de montrer Fabrice Luchini sous un nouveau jour avec ce personnage attendrissant, aimant, encore amoureux d'une femme qu'il avait rencontrée il y a six ans.

© Gaumont Distribution

Choisir l'actrice danoise Sidse Babett Knudsen était une évidence ?
A l'époque où je pensais au film je ne manquais pas un épisode de la série danoise Borgen portée par Sidse Babett Knudsen alors quand j'ai appris qu'elle parlait le français, j'étais eu le déclic. Le personnage de Ditte a beaucoup de compassion, elle est touchée par Michel Racine, mais pas forcément amoureuse de lui non plus. Sidse Babett Knudsen me fait penser aux héroïne de  John Ford, à la fois sexy et virile.

Qu'est ce qui a changé après vos débuts avec La Discrète au côté de Fabrice Luchini ?
En 25 ans j'ai beaucoup appris, je me suis désinhibé et je n'arrive plus sur les tournages avec la peur au ventre et Fabrice est beaucoup plus apaisé. Je pense que le rôle de Michel racine coïncidait avec ce qu'il avait envie de faire, tout comme il y a 25 ans je lui offrait un rôle où le public avait envie de le découvrir. Avec L'Hermine, je trouve que c'est un nouveau éclairage sur lui, une nouvelle facette de l'acteur.
Fabrice compte énormément pour moi même si nous ne sommes pas des amis, je lui dois beaucoup, il me doit. On est heureux et fières de ce nouveau projet, j'aime ce film et je ne lui trouve pas beaucoup de défauts.

© Gaumont Distribution