"Quand on aime jardiner, chaque plante est une merveille en soi"

C'est au Québec que Louise cultive chaque jour sa passion du jardinage. C'est son "Jardinuk" qui a remporté vos suffrages lors de l'élection du jardin favori des lecteurs.

Quand avez-vous commencé à aménager votre"Jardinuk" ?

Il y a tout juste 20 ans cette année, dès l'instant où nous sommes devenues propriétaires de cette parcelle de terre. Au fil des décennies, les cultivateurs, en labourant leurs terres, avaient empilé en bordure, les innombrables pierres qui les gênaient. Dès les premières années, je me suis sentie attirée par ces pierres et l'idée de les sortir de l'anonymat m'a rapidement séduite. Je ne pouvais pas encore mesurer l'ampleur de cette passion qui naissait en moi... citadine devenue paysanne, mais l'espace et la nature elle-même sont vite devenus muses et professeurs.

Quelles ont été les différentes contraintes de l'espace qui se sont posées ?

L'espace ne constitue pas une contrainte puisque qu'il est quasi illimité. Cependant, il importait d'aménager le jardin en préservant la vue à partir de la maison. Le jardin de fleurs pourrait présenter un certain relief sans jamais s'élever en hauteur de façon à compromettre la vue sur l'érablière et sa cabane à sucre par exemple. Aussi, seules quelques clématites, plants de houblon ou vignes sont judicieusement intégrés en ce sens, en s'étalant sur la pergola de la remise de jardin ou en grimpant sur les murs des bâtiments.

jardin de louise
Le jardin de Louise, en été. © Louise Bourassa

En fait, je crois que la seule contrainte à laquelle j'ai été confrontée fut celle que la nature elle-même m'a posée. Aux abords du ruisseau, j'ai inlassablement tenté de naturaliser certaines plantes choisies avec soin dans les jardineries locales, mais j'ai finalement compris que les plantes indigènes me tiendraient tête sur cette option. Alors, plutôt que d'essuyer d'autres revers et ce, sans compter les pertes, j'ai décidé de m'en faire des alliées et ai trouvé un grand bonheur à cultiver ces dernières, à les mettre en valeur plutôt que d'essayer de les éliminer.

Au printemps et en été, combien d'heures représentent son entretien ?

Le printemps, même s'il éveille en moi une forte fébrilité à mesure que la neige découvre en fondant toutes ces "amies" qui émergent de leur torpeur, représente un dur labeur. Malgré le fait que je m'assure à l'automne de bien nettoyer, le printemps reste un moment que je privilégie pour la division des plants, la relocalisation de ces derniers en m'assurant de préserver l'harmonie mais aussi le bon compagnonnage. Puis, il faut bien le dire, le printemps, c'est la saison des tentations avec tous les nouveaux cultivars que proposent les jardineries... comment ne pas être tentée d'agrandir un peu, juste un tout petit peu... Et voilà qu'on se retrouve avec un jardin qui s'étale sur près de 2 000 mètres carrés, sans compter l'espace gazonné que nous entretenons jusqu'à l'orée de l'érablière.

L'été, les heures ne sont pas moins longues, mais plus légères... Désherbage, taille, tonte et ravissement ! Le plaisir de circuler, tôt le matin, dans la fraîcheur des cosmos qui se balancent, des hémérocalles qui offrent leur nouveauté du jour souriante de rosée, des arbustes qui explosent leurs boutons floraux... Tout ça contribue à faire abstraction de ce par quoi on est passé pour en arriver là, un peu comme après  un accouchement, quand dans nos bras, notre enfant nous sourit. Difficile donc de comptabiliser les heures... pas moins d'une quarantaine par semaine.

Quel est le coin de votre jardin où vous aimez vous reposer ?

Reposer, quand le plaisir réside dans le travail... Mais je dirais que nous apprécions certaines heures du jour où nous nous arrêtons, séduites par la beauté de la lumière qui baigne le jardin. Nous nettoyons avec soin nos mains et courrons chercher les appareils photo pour donner vie à notre passion parallèle. Alors je dirais que l'accueil que nous réserve toujours le grand saule et sa grosse pierre en forme de fauteuil qui ne connaît que l'ombre, reste un coin que nous apprécions particulièrement. C'est un point d'observation unique sur l'ensemble du jardin et qui surplombe l'étang où grouille une petite faune aquatique qui titille le regard.

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Une hémérocalle. © Louise Bourassa

Comment avez-vous effectué le choix des végétaux ?

Quand on aime jardiner, chaque plante est une merveille en soi. On veut faire sienne chaque fleur, chaque couleur, les voir grandir et s'épanouir sous nos yeux. Mais l'amour ne suffit pas, il y a aussi le défi d'offrir le terreau le plus approprié, l'emplacement le plus favorable, les soins les plus réguliers. Autodidacte, j'ai fouillé les livres et publications diverses pour choisir des éléments qui à priori étaient conformes à la zone de rusticité de notre région. Au fil des ans, l'attrait de certaines plantes m'a amenée à "oser" certaines dérogations à ce critère, mais les pertes encourues m'ont ramenée à l'ordre et fait opter pour des valeurs sûres. L'hémérocalle vient donc en tête de liste pour ses nombreuses qualités. Le jardin s'est aussi enrichi au fil des ans, de nombreuses plantes reçues d'amis ou de parents qui n'ont pas, comme moi, la chance de profiter de tant d'espace. Je les recueille donc à droite et à gauche.