On s'aime, mais on se sépare, se rabiboche et rebelote : pourquoi ?

Ils s'aiment, mais se quittent. Se retrouvent et se déchirent. Ces couples "aller-retour" carburent à la rupture (désastreuse) et aux retrouvailles (prometteuses). Comment expliquer une relation si tumultueuse ? Est-ce le reflet d'un amour qui ne sait vivre autrement ou d'une histoire qui a fait le tour ?

On s'aime, mais on se sépare, se rabiboche et rebelote : pourquoi ?
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On les appelle les couples "aller-retour". Leur truc : se séparer pour mieux se retrouver, se retrouver pour mieux se séparer. De l'extérieur, on trouve ça dingue et intriguant. Et, par élan de sympathie et peur de ne pas balayer devant notre porte, on en conclut que c'est leur fonctionnement. Plus joli encore : leur façon de s'aimer. De l'intérieur, c'est autre chose. Ces couples souffrent, qu'ils fassent l'autruche ou non. Une relation aller-retour, c'est épuisant, ça fait mal. Comme le résume très justement Evelyne Dillenseger, psychanalyste, ces amoureux "ne sont pas bien ensemble et pas bien séparément".

Que faire quand on vit une histoire aussi rocambolesque à la Ross et Rachel ("mais on avait rompu !") ou, plus parlant, à Elisabeth Taylor et Richard Burton ? Faut-il persévérer ? Fuir ? Accepter ?

Le syndrome du hérisson

"Ces couples s'aiment mais ne se supportent pas. Ils vivent dans un lien d'amour et de haine, de liberté et de dépendance. On peut caractériser ces couples de couples passionnels", explique la spécialiste. C'est donc la passion qui les anime. Et la passion, ça rime avec impulsion et "extrêmes". Ces amoureux flirtent avec le tout ou rien. On s'adore et on se déteste. L'entre deux, qui ne serait autre que le quotidien, n'a pas de place. Si généralement, on aime dire qu'il vaut mieux être seul que mal accompagné, eux pensent qu'il vaut mieux être malheureux ensemble que l'un sans l'autre.

Juliette, 30 ans, a connu ça pendant sept ans : "On a rompu une bonne quinzaine de fois… et je n'exagère pas. Quand on se quittait, c'était violent – des insultes, des 'je ne veux jamais te voir' . Une semaine plus tard, on craquait. Il nous était impossible de vivre l'un sans l'autre", confie-t-elle. Noémie est, quant à elle, en plein dedans : "On ne parvient pas à faire autrement. A chaque fois que l'on se quitte, c'est pour de bon. Quand on se retrouve, c'est aussi pour de bon. Mais on se ment, on se plante, ça recommence", détaille-t-elle. "On peut les comparer aux hérissons : ils se piquent quand ils se rapprochent et ont froid quand ils s'éloignent", explique la psychanalyste. 

Je ne suis rien sans toi

"La plupart du temps, ces couples ne veulent pas s'avouer qu'ils sont face à un échec. Ils ont peur d'affronter la vie, la solitude, le marché du célibat", analyse Evelyne Dillenseger. Bien sûr, quand on baigne dedans, on a le sentiment de se retrouver "par amour" et non pas par défaut. Le bonheur des retrouvailles a quelque chose de magique : il efface la souffrance. On oublie vite ce que l'on a pu ressentir de si désagréable la semaine ou le mois passé… On a le sentiment de faire le bon choix en revenant. Quel est le bon choix, au fond ? Communiquer, peut-être. Mais au sein même de ce type de relation, chaque discussion peut mener à une nouvelle dispute ou de nouvelles retrouvailles. Bien sûr, la case "communiquer" est essentielle, mais communiquer avec soi peut être un premier pas : à quoi aspire-t-on ? En vrai, est-ce que l'on revient vers l'autre pour les bonnes raisons ?
Les mauvaises raisons – question d'éclairer – seraient donc la crainte de vivre seule, de ne jamais trouver quelqu'un d'autre, de perdre un tas d'habitudes qui ont fini par nous constituer. Parfois, on reste aussi pour le sexe, il faut l'avouer. "L'entente sexuelle est importante dans un couple, mais ne suffit pas à être heureux ensemble. Se raccrocher au sexe, comme preuve que tout va bien est illusoire", note la spécialiste. Serait-on en train de trouver de fausses excuses ? Toujours. "Ces couples ont en commun une forte angoisse de séparation et se jouent à se faire peur", avance la psychanalyste.

Séparation définitive ou retrouvailles définitives ?

Le problème, dans ce genre d'histoire, c'est qu'on se détruit, qu'on détruit l'autre et qu'on détruit le couple. La rupture définitive est-elle alors envisageable ? "C'est ce que l'on recommande le plus fréquemment face à une telle souffrance", souligne Evelyne Dillenseger.

Bien entendu, ce n'est pas ensemble que l'on sera capable de prendre ce genre décision. Le plus important, c'est que l'un des deux prenne le temps de réfléchir, de se poser les bonnes questions, de décortiquer la situation dans son coin pour prendre la bonne décision. "Il a fini par partir. Terriblement dur, mais aujourd'hui je le remercie", poursuit Juliette. S'il a eu le courage de fermer la porte "pour toujours", c'est parce que Romain a atteint son seuil de tolérance à la souffrance. A un moment donné, ça devient impossible, trop difficile à vivre.

"Parfois, je me dis que je le retrouverai peut-être, mais dans plusieurs années", avoue Juliette, qui pense encore à son ex. Les couples qui se remettent ensemble bien des années plus tard, ça existe. Lorsqu'ils retombent l'un sur l'autre, que ce soit voulu ou hasardeux, un sentiment de nouveauté les envahit : après avoir passé des années loin l'un de l'autre, ils se redécouvrent. Une nouvelle personne est là, qui a changé, appris de ses expériences. "Ils se rassurent : ils n'avaient pas tort d'y croire, simplement ils se sont rencontrés au mauvais moment, souvent trop jeunes. Les retrouvailles confirment leur amour", précise la psychanalyste. Ces couples nous enseignent quelque chose : au fond, si cette personne est la bonne, la vie se chargera de nous le rappeler. Laisser du temps au temps, la vraie solution ?