Se disputer confinés, c'est normal : comment s'engueuler sans faire de dégâts

Ce n'est pas l'entente 24H sur 24, 7 jours sur 7 ? Non, c'est la preuve que nous sommes deux êtres humains, avec des oreilles, des sentiments, des besoins. Mais parfois, de désaccord en désaccord, on va trop loin. En plus de péter une assiette, on effrite notre petit cœur et celui de notre conjoint. Et si on se disputait… bien ?

Se disputer confinés, c'est normal : comment s'engueuler sans faire de dégâts
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Depuis trois semaines, à force de disputes, on se demande si notre couple tient la route. Que se cache-t-il sous nos prises de bec ? Est-ce que cela signifie que l'on n'a rien à faire ensemble ? C'est une question que se pose Catia, 29 ans. Les disputes dans son couple, elle connaît !
Fréquemment, elle et Jérémy ne sont pas d'accord, que ce soit concernant le produit ménager à déverser dans la baignoire ou la destination des futures vacances. Alors, elle s'inquiète : "Je m'interroge. Existe-t-il un stade où les disputes sont annonciatrices d'un malaise dans le couple ?" Non, pas forcément. Comme nous l'explique Latifa Gallo, coach de vie, on pense à tort que les conflits sont une mauvaise chose, or ils sont une facette importante de la communication entre individus. Il est logique de se disputer : nous sommes deux entités, nous avons chacun nos besoins, nos envies, nos fonctionnements.

Vivre ensemble nous entraîne nécessairement vers de potentielles disputes. Certains se fâchent régulièrement, d'autres non. Peu importe, la comparaison est inutile. "La seule chose à retenir tient en une phrase, argumente la coach. Ce ne sont pas les conflits qui sont destructeurs, mais la façon de les traiter." Autrement dit, disputons-nous, mais faisons-le bien.

On ne juge pas 

Et c'est la première règle. Pour bien se disputer, on évite les jugements. Facile à dire, nous avons tous un avis, des a priori. Mais prenons un minimum de recul, c'est-à-dire considérons la pensée de l'autre, son point de vue. Il a le droit de penser comme il pense, non ? On pense bien comme on pense, non ? Posons donc un regard tolérant sur notre amoureux.

"Ce qui est important pour vous ne l'est pas forcement pour votre moitié. En jugeant l'autre, vous le mettez d'autorité sur le banc des accusés et il pourra que réagir vivement car personne n'aime être à cette place, à tort ou à raison !", s'exclame Latifa Gallo. Donc plutôt que de le traiter de flemmard qui ne range pas, de fêtard inconscient, on préférera lui dire que c'est bien d'avoir trouvé son mode de vie, mais qu'on n'a pas le même. Qu'on ne soit pas d'accord sur le rangement, l'alcool, les vacances, l'argent, les enfants, la couleur du mur ou de l'indice de la crème solaire, l'idée est donc de toujours nommer deux points de vue et non croire que le nôtre est le meilleur. "Le jugement nous fait interpréter non seulement les paroles et actes d'autrui mais il aveugle toute communication", conclut la coach.

On reconnaît ses torts

Oui, il est très probable qu'on ait des torts. Peut-être qu'on a raison, il vaut mieux faire la vaisselle ce soir, on dort mieux, mais on a eu tort de s'énerver très vite quand on a vu que Jean-Pierre comptait plutôt prendre un bain. Bref, il est important de savoir se remettre en question. Ce n'est pas un signe de faiblesse (mince je vais passer pour une nouille qui baisse les armes), mais plutôt un signe d'intelligence. On veut progresser. Apprendre. Et on va vers une relation plus authentique, sans rapport dominant dominé, dès lors qu'on ose reconnaître sa faute.

De plus, reconnaître ses torts, comme le précise la coach, c'est aussi éviter de s'embourber dans des excuses (un peu) ridicules (je suis en retard, ma montre est tombée dans la Seine). Et puis, on n'oublie pas qu'une faute avouée est à demi pardonnée et qu'en reconnaissant sa bourde, on répare la blessure de l'autre qui retrouve toute confiance en nous. C'est ça l'amour ou pas ?

On parle de soi

Tu n'es qu'un égoïste ! Tu n'es qu'un idiot ! Tu manques de bon sens ! C'est de ta faute ! Tu ne comprends rien ! (Qu'est-ce qu'on s'exclame, en colère). Bref : à force de "tu" l'autre en prend pour son grade et réagit vivement face à ces accusations. "Ainsi, on attise sa colère ou son rejet", précise Latifa Gallo. Désormais, pour désamorcer une dispute, nous utiliserons le "je". Je suis déçue, je me sens triste… etc. On met nos émotions en avant. Du coup, plutôt que de lui dire : tu dis des bêtises, on dira "lorsque j'entends ça, je me sens énervée".

Mais il n'y a pas que nos émotions que l'on doit exprimer. Il y a aussi nos besoins. Et bonne nouvelle : ils sont universels et compris de tous. Donc de la même façon, on ne dira pas "tu ne fais aucun effort", on dira "j'ai besoin d'aide". Ça passe mieux, hein. Marlène, 30 ans, a toujours fui le tu qui tue, raconte-t-elle. Et elle constate que ça change tout. "Mon partenaire prend tout bien ! On discute calmement plutôt que de se disputer." CQFD.

On ne fuit pas 

Parfois, quand la dispute se fait sentir (ou se sent déjà), on a bien envie de claquer la porte, comme dans les films, lui qui nous court après (oh non, elle vient de partir, mais je l'aime, je cours, je cours). Mais voilà, double mauvaise idée : fuir, c'est non, se réconcilier d'un coup de balai, c'est non.

Comme le souligne la coach, la base d'un couple solide c'est la communication ! "Communiquer et encore communiquer, lever les non-dits, oser dire et ne pas laisser les malentendus et les  frustrations s'accumuler.

Après une dispute, il est donc essentiel d'échanger sur ce qu'il vient de se passer, après avoir respiré un bon coup (et non pas bouclé une valise). On se comprend mieux et on avance mieux.  On en tire des leçons, chacun, et on prend des engagements mutuels. Ok, je vais mieux ranger. On évite donc le "allez on n'en parle plus" ou bien une fois que tout a été mis à plat et qu'on nage dans un terrain d'entente, comme deux poissons amoureux. Là, on peut mettre de côté, se faire des bisous, des câlins. Et puis ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants.

Merci à Latifa Gallo, auteur de Les 50 règles d'or de la gestion de conflits et de Les 50 règles d'or de l'intelligence émotionnelle, aux éditions Larousse.