Faire l'amour pendant les règles : ils aiment et témoignent

Il n'y a aucune contre-indication médicale à partager un moment intime lorsqu'on saigne. Pourtant, selon un sondage réalisé par Always et Tampax en 2013, 80 % des sondés renoncent à une partie de leur vie sexuelle pendant les menstruations. Audrey, Hélène et Rémi, la trentaine, aiment ça, faire l'amour pendant les règles. Ils témoignent.

Faire l'amour pendant les règles : ils aiment et témoignent
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Faites-vous l'amour pendant vos règles ? On a posé la question autour de nous. Et on a souvent obtenu la réponse suivante : "Non, pourquoi ?" C'est comme ça, c'est imprimé, les règles sont un obstacle aux rapports sexuels pour beaucoup. Mais d'où nous vient cette idée ? Pourquoi les règles empêcheraient-elles de faire l'amour alors qu'il n'y a aucune contre-indication à ça ? Pour comprendre, il faut remonter le temps. Phénomène longtemps incompris par le corps médical, les règles ont été considérées comme sales et impures jusqu'au milieu du XIXème siècle. En période de menstruations, avoir des rapports sexuels était décrété dangereux pour l'homme qui pouvait alors attraper une malédiction. Toutes ces croyances ont traversé les siècles et ancré les mentalités. Faire l'amour pendant les règles est donc perçu comme "sale", même si c'est bien souvent inconscient : on se dit qu'il ne faut pas, qu'on ne peut pas et c'est tout. De plus, le sujet est rarement évoqué au sein du couple.

Parce que le mouvement est lancé, parce qu'il est temps de tuer le tabou, parce que les règles n'empêchent pas de prendre du plaisir et d'en donner, Audrey, Hélène et Rémi, la trentaine, ont décidé de nous raconter comment ils avaient découvert le sexe pendant les règles et pris du plaisir.

"Faire l'amour pendant mes règles m'a réconciliée avec ma féminité", Audrey, 34 ans

Je suis complexée par pas mal de trucs : gros cul, petits seins, poils au menton… Des détails pour certains, mais moi, ça m'empêche de me lâcher au lit. Je suis du genre à rentrer le ventre, à chercher les bonnes positions, le bon angle et le bon profil. Et niveau cunnilingus : même pas la peine. Cette pratique demande trop de lâcher-prise pour moi, donc je ne ressens aucun plaisir. J'ai refusé pendant quatre ans que mon ex s'y essaie. Lui et moi, ça s'est terminé il y a déjà deux ans (et ça n'a rien à voir avec ça).

"J'ai compris que rien n'était sale ou honteux"

L'été dernier, je rencontre un mec dans un bar. Je suis dans de bonnes dispositions : bronzée (d'abord) et puis je viens de passer une après-midi sportive. Et même si ça ne se voit pas, moi je me sens mieux dans mes pompes. Je sais également que je ne le reverrai pas, je pars le lendemain. Tous ces éléments font que je me sens plus à l'aise que d'habitude. Il me complimente, on se détend… et on rentre ensemble. On commence à faire l'amour et il fait une pause cunni. Je sers les jambes, mais il continue. Je finis par m'abandonner et il me sort au bout de quelques minutes : "C'est bon comme ça !" Je demande "Comment, comme ça ?" Il répond "avec les règles". J'ai bondi intérieurement, j'ai trouvé ça un peu bizarre qu'il trouve ça bien, même qu'il adore et que ça ne le refroidisse pas. Surtout pour une première rencontre. En tout cas, nous avons fait l'amour avec mes règles et cette soirée a été pour moi comme un déclic. J'ai compris que rien n'était sale ou honteux. Ni mes règles, ni aucune partie de mon corps. Et que s'il y avait des gens pour aimer le "cunni aux règles", il y en avait forcément d'autres pour aimer mon gros cul ou mes petits seins. Et depuis ce mec, c'est comme devenu un principe : si un mec s'offusque pour des poils, je n'en veux pas. Ça ne veut pas dire que je les laisse pousser, non plus que j'ai hâte d'avoir mes règles pour faire l'amour, mais je ne veux pas d'un homme qui nage en plein cliché de propreté et pureté. Je veux un homme qui aime les vraies femmes et les vraies femmes ont leurs règles et n'ont pas toujours la culotte parfaitement blanche. Cette aventure m'a réconciliée avec ma féminité.

"Je veux qu'une femme se sente à l'aise quand elle a ses règles et ne se prive pas de son plaisir", Rémi, 30 ans

J'ai découvert le sexe pendant les règles de manière "naturelle" si je peux dire. Lors d'un rapport sexuel, nous avons taché les draps. Ma partenaire de l'époque a été un peu honteuse que ça arrive, car elle n'attendait pas ses règles. Elle n'était pas vierge et j'ai eu peur sur le moment de lui avoir fait mal… Cet incident ne m'a pas effrayé. Je l'ai rassurée, ce n'était pas un problème à mes yeux. Et nous avons donc recommencé, en mettant une serviette éponge sur les draps. Je dirais que niveau sensations, ça ne change pas énormément, si ce n'est que le vagin est plus humide. J'ai ensuite rencontré d'autres femmes. A chaque fois que j'ai eu des rapports "avec règles", c'était par hasard. En découvrant le sang, quelques-unes m'arrêtaient avant que je les pénètre et nous étions plutôt sur de la stimulation externe, des massages, des caresses...

"J'aurais tendance à remplacer ma bouche par mes doigts"

L'arrivée des coupes menstruelles a été pour une de mes relations un élément déterminant pour qu'elle se sente plus sûre d'elle à ce moment-là et pour accepter un cunnilingus par exemple. Faire un cunnilingus ne me dérange pas. J'avoue être amateur du parfum d'une femme et compte tenu des changements hormonaux, celui-ci évolue, change, se fortifie ou au contraire s'allège. Pour ce qui est du sang qui pourrait parfois apparaître – si la fille ne porte pas de tampon ou cup - ce n'est pas un parfum ou un goût que j'apprécie particulièrement. J'aurais tendance à remplacer ma bouche par mes doigts par exemple. Après, il y a la question des IST qui entre en ligne de compte et je ne le fais qu'avec des partenaires de confiance. D'autres femmes me disaient avoir leurs règles et refusaient les rapports sexuels car elles ne se sentaient pas en forme. Je comprenais et je n'insistais pas. Tout est une histoire de consentement mutuel… avec ou sans règles. Je tiens à ce qu'une femme se sente complètement à l'aise. Je ne trouve pas les règles sales. OK, ça tâche les draps, le sang est parfois légèrement grumeleux et ça n'a pas un aspect très "sympathique", mais c'est naturel, ça prouve qu'une femme est fertile, ça rythme sa vie tous les mois. C'est sale essentiellement pour des raisons idéologiques liées aux religions et aux croyances… et à la méconnaissance du sexe féminin dans son ensemble.

"Les hommes qui me font l'amour pendant mes règles me font presque un cadeau", Hélène, 33 ans

Mon ex, avec qui j'ai partagé une longue relation, ne voulait pas du tout essayer de faire l'amour pendant les règles. Il avait peur que la vue du sang le dégoûte et lui fasse perdre son érection. J'ai respecté et je n'ai jamais insisté. J'entendais souvent des amis me dire que eux, ça ne les dérangeait pas et j'ai gardé ça dans un coin de ma tête : tous les hommes ne sont pas contre. Et puis j'ai été marquée par une scène dans un roman  de Tonino Benacquista - je ne me souviens plus lequel : un couple d'amants avait laissé des traces sur le lit. Presque une trace de pénis ensanglanté sur les draps blancs. Ce passage m'avait beaucoup excitée, ça montrait une grande fougue, une passion qui fait fi des conventions.

"Je trouve ça presque meilleur que quand je n'ai pas mes règles"

Quand je me suis retrouvée célibataire, j'ai eu plusieurs plans cul. Généralement, ils étaient à l'aise avec les règles. Quand une relation est basée sur le sexe, on n'oublie pas pourquoi on est là et on ne voit pas d'obstacle à faire l'amour. Je les prévenais toujours avant le rendez-vous et ils ne déclinaient pas, du moins pas tous. Même coucher le premier soir avec mes règles, c'est arrivé ! J'ai prévenu le mec quand on est arrivés chez moi et on a décidé de jouer, sans pénétration. Finalement, à force de caresses, on avait trop envie et on l'a fait. Je trouve ça presque meilleur que quand je n'ai pas mes règles. Je me sens valorisée et je suis ravie de tomber sur des mecs ouverts à ce point. Je trouve que les hommes qui me font l'amour pendant mes règles me font presque un cadeau, puisque d'autres hommes refusent absolument. Ça montre que je les excite suffisamment pour qu'ils ne voient pas mon cycle comme un obstacle. Juste des conditions un peu particulières à maîtriser pour prendre du plaisir l'un et l'autre. Pour autant je ne me sens pas obligée de faire des choses pour "compenser". Par exemple je ne fais rien d'anal me concernant (ça ne me tente pas, mais je ne juge pas). Aucun d'entre eux n'a insisté pour me sodomiser pendant cette période. Pour moi c'est important. Les règles, c'est naturel, c'est un fluide corporel, au même type que la salive, la cyprine, le sperme. Une femme a ses règles en moyenne de ses 13 ans à ses 60 ans, 5 jours par mois. Ça fait des milliers de jours sans sexe, alors que de nombreux partenaires sont d'accord ? C'est inconcevable pour moi.